Bon, ça y est, j'ai vu
The miracle woman et
The bitter tea of general Yen, deux petits chefs-d'oeuvre, à n'en pas douter. Un cran au-dessus de
Ladies of leisure (excellent celui-là, mais la fin est iréelle au possible -la faute au studio ?-) et très supérieurs à
Forbidden (pas mal, mais trop mélo et trop masochiste...).
Ce que j'aime quand Capra filme ces histoires avec Barbara Stanwyck, c'est tout d'abord cette épatante beauté plastique qu'il déploie autour de son actrice. Une photographie sublime soulignant le visage extraordinaire de Stanwyck. Pour le reste, c'est aussi cette sensualité débordante, à fleur de peau, qu'il déploie durant ses récits. Ainsi, quand les couples se rapprochent (elle et le jeune artiste aveugle, ou elle et le général Yen), on peut ressentir jusque dans le bout des doigts cette sensualité, cet amour, cet érotisme sous entendu. Le pré-code n'a jamais été aussi subtil qu'ici (moins net et tranché qu'à la Warner, moins racé qu'à la MGM, mais plus romantique).
The miracle woman (1931), c'est une superbe histoire d'amour entre une jeune prédicatrice et un jeune aveugle qui tombe amoureux d'elle en l'entendant à la radio alors qu'il allait se suicider. Un mélodrame donc, dans la plus pure tradition, transcendée par ses dialogues, ses situations romantiques merveilleuses, sa mise en scène soignée et délicate, et son couple d'acteurs parfaits. Barbara Stanwyck est évidemment exceptionnelle, iradiant l'écran à chacune de ses apparitions. Quant à David Manners (le jeune premier fringuant mais discret de
Dracula,
The mummy ou
The black cat) y trouve peut-être son meilleur rôle, à la fois convaincant et touchant. On ne saurait en dire plus, tant ce film nous touche au coeur. Magnifique.
A noter que Richard Brooks reprendra tout autrement cette histoire avec son redoutable
Elmer Gantry le charlatan en 1960. Il faut se rappeler de la prestation mémorable (mais est-ce utile de le préciser avec cet acteur ?) de Burt Lancaster.
The bitter tea of the general Yen (1933), c'est un mélodrame sur fond historique, en Chine. Je m'attendais à un banal mélo un poil raciste, et où le beau général si cruel tomberait fou amoureux de la belle missionnaire occidentale convaincue par ses idéaux naïfs. Il n'en n'est rien. Le film est très fin et offre un portrait de la Chine loin d'être inintéressant. Cela fait plaisir de voir un film aussi fort durant cette période hollywoodienne où le cliché raciste était plutôt la norme concernant l'Orient (rappelons-nous de
The mask of Fu Manchu). Les très rares films s'intéressant à la Chine à l'époque n'étaient pas terribles, excepté celui-ci, à la fois fort, beau, romantique et finalement très doux. Du pré-code sublime (il faut voir le regard perdu dans le vague de Barbara Stanwyck en voyant les officiers s'arracher les faveurs d'une cohortes de femmes venues les distraire... étonnant), doté une fois de plus d'une réalisation épatante (un noir et blanc éclairé avec beaucoup de goût et une luminosité particulière). En outre, c'est le général qui finit par convaincre la jeune femme éprise de liberté. Entre des personnages mouvants, avec notamment ce financier américain bedonnant qui finalement se transforme en Clappique de circonstance (
La condition humaine), voilà un très beau film, transcendé une nouvelle fois par sa redoutable et si fraîche actrice principale. Dommage toutefois que le rôle du général ait été confié à un acteur américain grimé (qui n'est pas mauvais, attention). Une fausse note dans un ensemble si fort.
Merci feb, ce furent de grands moments !