Critique de film
Le film
Affiche du film

Maris en liberté

(Mariti in città)

L'histoire

À Rome, au mois d'août, les épouses partent en vacances pendant que leurs maris restent à la maison pour travailler. C'est une période bénie pour ces hommes en quête d'aventures sentimentales. Sans leurs femmes pour les surveiller, ils s'éveillent à la séduction. Mario, Alberto, Fernando et Giacinto, ses amis, vont tenter de trouver l'amour...

Analyse et critique

Maris en libertés est une plaisante variation italienne du Sept ans de réflexion de Billy Wilder auquel il ajoute une truculente touche latine et des possibilités décuplées puisque les maris soumis à la tentation adultère sont désormais au nombre de quatre. Le film s'inscrit dans le courant de la comédie populaire italienne des années 50 sans pour autant être associé au "néoréalisme rose" qui marqua une certaine transition vers la mue de la commedia all'italiana plus transgressive initiée avec Le Pigeon de Mario Monicelli (1958). Le néoréalisme rose était en effet un adoucissement par l’humour et la bienveillance du néoréalisme tout en maintenant un propos social acéré. Après s’être déjà essayé à la comédie avec notamment L’Imperatore Di Capri (1949), Luigi Comencini démontre réellement ses aptitudes dans le genre en posant un jalon majeur du néoréalisme rose et de la comédie italienne dans Pain, amour et fantaisie (1953) et sa suite Pain, amour et jalousie (1954). Maris en libertés ne navigue pas tout à fait dans les mêmes eaux, notamment par son choix de privilégier un environnement urbain à l’imagerie touristique exportable, et d’estomper les possibilités d’un propos engagé par le choix d’observer des protagonistes de la petite bourgeoisie.

Le plaisir est donc ailleurs, dans l’observation des petits travers masculins. Contrairement à la farce féroce que proposera Pietro Germi dans son Divorce à l’italienne (1961), l’institution du mariage n’est jamais remise en question et l’adultère est au mieux une parenthèse estivale envisagée presque malgré eux par les maris esseulés. La seule des quatre histoires relevant d’une réelle tension dramatique est celle entre le jeune marié Renato Salvatori et une charmante peintre étrangère incarnée par une attachante Giorgia Moll. Il y une dimension à la fois morale dans le fait qu’en recherchant maladroitement la bagatelle, Salvatori tombe vraiment amoureux face à la candeur de Giorgia Moll, mais aussi moralisatrice et religieuse en ne consommant pas l’adultère – y compris pour les autres maris. Nous sommes davantage dans la fable renforçant cette institution du mariage en y ramenant les époux en perdition, voire en les y amenant ttout court tel ce séducteur désinvolte finissant la « corde au cou » de sa compagne délaissée de longue date. C’est donc la saveur du vaudeville plutôt sage qui domine, les situations décalées et loufoques étant privilégiées à une vague subversion. On peut citer l'histoire du professeur hypnotisé par sa jeune voisine aux formes généreuses ou encore l'homme profitant de l'absence de son épouse pour adopter brièvement un chien, ce qu'elle lui a toujours refusé.

Les maris nous apparaissent dès lors comme des hommes-enfants perdus sans leurs épouses, mais encore trop timorés pour céder aux tentations. Comencini filme divinement bien le charme et la langueur de cette Rome estivale, et cette relative légèreté du traitement est finalement autant un défaut qu'un atout. Le mariage est à la fois un carcan castrateur et un environnement indispensable à ces éternels immatures rentrant vite dans le rang. La forfanterie masculine de groupe semble forcer le récit d’apprentissage adultère par le machisme des dialogues, mais tous retrouvent une vulnérabilité apeurée quand leurs actes ou la possible tromperie inverse (le brocanteur jaloux maladif) menace l’édifice de leur ménage. Même si inégal dans ses sous-intrigues, ce fil rouge moral en dit long sur la société italienne d’alors sous les mœurs timidement plus libérées. Un petit mais très plaisant Comencini.

En savoir plus

La fiche IMDb du film

maris en libertes
Combo Blu-Ray + DVD
Édition Limitée

sortie le 22 octobre 2024
éditions Tamasa

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Par Justin Kwedi - le 11 février 2025