L'histoire
A bord du sous-marin atomique Neptune, le capitaine Blanchard sur le point de partir à la retraite fête son successeur avec ses hommes d’équipage. Malheureusement cette même nuit son bâtiment coule, percuté par un cargo, et vient s’échouer à plus de 400 mètres de profondeur dans une cavité dorsale océanique. Si les dégâts humains sont moindres, les survivants n’ont néanmoins que très peu de temps pour être sauvés. En effet, les réserves d’oxygène sont basses, la pression sur la coque est tellement forte que cette dernière risque de céder d’un moment à l’autre et enfin des éboulements de rochers ont fréquemment lieu qui viennent recouvrir le navire. Une durée qui ne laisse pas beaucoup de temps au ministère de la Marine pour sauver l’équipage du Neptune. Néanmoins, sous la direction du Capitaine Bennett (Stacy Keach) et avec l’aide du concepteur et constructeur d’un petit bathyscaphe (David Carradine), tout va être mis en œuvre pour remonter les hommes à la surface...
Analyse et critique
Réalisateur de télévision depuis le début des années 1950, David Greene n’aura signé qu’une dizaine de longs métrages, aucun n’étant passé à la postérité, pas plus ce Sauvez le Neptune qui malgré ses indéniables qualités fit un flop monumental aussi bien aux États-Unis qu’en France. Il arrivait peut-être un peu tard, la vogue des films catastrophe s’essoufflait alors et s’éteignait même inéluctablement, le genre ayant prématurément vieilli face à l’arrivée sur les écrans d’un nouveau genre encore plus sensationnaliste, le space opera intergalactique dont Star Wars de George Lucas fut le premier fleuron. Le film de David Greene s’apparente autant au film catastrophe qu’au film de sous-marin à l’atmosphère claustrophobe, sorte de mélange entre d’une part L’Aventure du Poséidon de Ronald Neame - dont il reprend à peu près la construction et la structure (accident spectaculaire et dramatique, organisation du sauvetage à l’extérieur du bâtiment et tentative de survie à l’intérieur) mais néanmoins sans en passer au préalable par la laborieuse présentation des personnages -, de l’autre le superbe et tendu K-19, le piège des profondeurs de Kathryn Bigelow qui voyait lui aussi un sous marin nucléaire se retrouver coincé au fond de l’océan suite à une fuite de réfrigérant dans la zone confinée du réacteur.
Ici en arrière-plan, aucune situation politique conflictuelle, pas plus de conflits comme la guerre (Destination Tokyo de Delmer Daves) ou la guerre froide (A la poursuite d’Octobre Rouge de John McTiernan) comme c’est le cas dans la plupart des films avec sous-marins, mais une simple histoire d’accident et de mise en place du sauvetage alors que les soldats coincés au fond de la mer tentent tant bien que mal de survivre en attendant l’arrivée des secours. Un scénario assez simple mais relativement bien construit, efficace et non dénué de tension et de suspense, les marins devant être remontés à la surface dans un laps de temps très restreint auquel cas contraire ils mourront tous par asphyxie ou noyade. C’est ainsi que l’officier campé par Stacy Keach doit mener à bien les opérations de secourisme et s’associer pour l’occasion et malgré lui - les premières relations sont assez tendues, les deux hommes étant tout aussi têtus l’un que l’autre - avec le concepteur et constructeur d’une sorte de sous-marin de poche interprété par David Carradine, ce dernier ayant amené avec lui son associé joué par Ned Beatty.
Un casting de premier ordre, surtout si l’on ajoute aux acteurs cités ci-dessus en quasi-figuration le futur Superman, Christopher Reeve, mais surtout Ronny Cox en officier en second angoissé - c’était lui le troisième homme, déjà aux côtés de Ned Beatty, du groupe conduit par Burt Reynolds dans le chef-d’œuvre de John Boorman, Délivrance - et bien évidemment Charlton Heston dans un rôle bien plus fragile qu’à l’habitude. En effet, son capitaine de sous-marin n’est pas le surhomme auquel on pouvait s’attendre mais un chef humain, malchanceux, impuissant et dépassé par les évènements, constamment à l’écoute de ses hommes y compris de ceux qui craquent comme ce jeune radio qui pète un plomb devant ses appels au secours qui demeurent sans réponse, rassurant ce dernier en lui disant qu’il a exprimé la tension et la peur que tous les autres ressentent. Sans trop en faire, tous ces comédiens jouent le jeu avec conviction et réussissent à rendre crédibles leurs personnages tous très attachants, l’une des caractéristiques de ce film catastrophe étant de ne pas avoir intégré un seul trublion insupportable voire malveillant. L’humanité qui se dégage de Sauvez le Neptune est assez inhabituelle pour un film de ce genre, les notions de sacrifice et de bravoure étant des valeurs partagées par beaucoup des marins prisonniers ou des sauveteurs ; les moins courageux ne sont pas pour autant humiliés ou ostracisés, le capitaine s’avérant au contraire très compréhensif à leur égard par le fait de connaitre lui aussi cette peur de la mort qui se révèle imminente, s’enfermant même dans sa cabine pour verser quelques larmes.
Le fait de se dérouler à bord d’un sous-marin permet à l’intrigue de ne pas s’encombrer d'une quelconque romance inutile, de couples sur le point de divorcer, de religieux angéliques, de handicapés / malades de circonstance ou encore de gamins pénibles. Et, malgré un budget trop rabougri pour le sujet qui aboutit à quelques séquences avec des maquettes rendant le film parfois un peu cheap et moyennement convaincant en terme de véracité, l’ensemble demeure cependant presque constamment efficace et vraisemblable. Sans grandes surprises scénaristiques ni fulgurances techniques, Sauvez le Neptune se présente comme un film d’aventure juste, efficace et humain qui ne méritait pas de subir un tel bide. Il suffit de visionner la séquence pleine de sobriété au cours de laquelle l’épouse d’un soldat vient annoncer à celle du capitaine la "délicate" situation dans laquelle son mari vient de se mettre pour comprendre que les auteurs n’ont pas forcément cherché la facilité, ne souhaitant pas tomber dans le larmoyant ou le mélodrame sans pour autant oublier de mettre le doigt sur la fragilité psychologiques des militaires qui bien que formés aux contextes les plus dangereux peuvent eux aussi perdre leur sang froid.
Cette volonté de ne pas sombrer dans le spectaculaire à tout prix est tout à l’honneur de ce Gray Lady Down - Gray Lady étant l’un des surnoms donnés aux sous-marins dans le milieu maritime - qui se révèle certes loin d’être inoubliable faute à une trame qui n’échappe pas aux clichés du genre mais cependant tout à fait honorable, assez authentique et surtout pas déplaisant. A mon humble avis et contrairement à ce qui a souvent été dit, Sauvez le Neptune ne fait pas trop pâle figure face à ses illustres modèles et ne souffre pas trop de la comparaison. Réalisateur, scénariste et acteurs s’acquittent de leur travail avec professionnalisme et profitent de l'occasion pour nous faire découvrir les moyens matériels employés par la marine américaine pour le sauvetage des sous-marins, tels le bathyscaphe ou le DSRV (Deep Submergence Rescue Vehicle). Sans la recommander coûte que coûte, pourquoi ne pas profiter de la sortie du film en Blu-ray pour réévaluer cette sympathique course contre la montre visant à sauver l’équipage d’un sous-marin en péril ?