Les Mystères de l'Ouest

Tout sur les séries à la TV, en DVD, en Blu-ray ou VOD.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

Supfiction a écrit :Tiens justement j'ai revu à l'heure de la sieste le WE dernier les deux premiers épisodes de la saison 2 et j'ai trouvé ça vraiment très mauvais
Ceci explique cela :lol:
Non, mais pour ces épisodes-là, qui, pour moi, fonctionnent bien, il convient de se mettre en mode pop, ou Sergeant Pepper (qui n'était pas sorti en 66), tu as raison. Ce kitsch-là est agréable à l'œil et le mariage des genres se fait dans la tonicité et la bonne humeur (donc, quelque part, l'inventivité, le jaillissement). La série est traversée de plusieurs humeurs qui se complètent. Celle qui préside à la saison 2 en est une. J'ai personnellement réévalué à la baisse la troisième saison, la plus westernienne, qui est séduisante esthétiquement mais qui a tendance à se "routiniser". Je suis sensible au côté BD de la saison 2 et je me suis vraiment amusé au Cobra d'Or mais on ne fonctionne pas tous pareil :mrgreen: (je ne suis pas toujours d'accord avec Le Monde des Avengers).
Pour la saison 2, je te conseille La Nuit de la Mariée, qui a du chien.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Avatar de l’utilisateur
Joshua Baskin
ambidextre godardien
Messages : 11651
Inscription : 13 avr. 03, 20:28
Localisation : A la recherche de Zoltar

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Joshua Baskin »

Merci pour tes notules qui respirent la passion. De la série je ne connais que le mauvais film de Barry Sonnenfeld et je ne me suis donc jamais intéressé à elle, mais tu sais vraiment donner envie. Je m'y pencherai certainement un jour.
Intersections Global Corp.
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

TOP 10 WWW : LA NUIT DES PRETENDANTS (et c'est reparti)
Image
Avant tout, merci à Joshua Baskin pour ses encouragements. J'espère que tu ne tomberas pas de trop haut :mrgreen:
La Nuit du Poison / The Night of the Poisonous Posey (saison 2, 1966)
scénario :Leigh Chapman, d'après une histoire de Donn Mullaly réalisation : Alan Crosland,Jr
Emblématique de la deuxième saison, cet épisode n'a que le défaut d'être irréprochable. Excellemment réalisé, rythmé d'un impeccable timing, La Nuit du Poison pourrait être la rencontre improbable entre Lucky Luke et David Lynch. Une fois de plus, la présence de Leigh Chapman au scénario (c'était ce qu'il m'avait semblé repérer mais j'en ai là une confirmation) est un gage de qualité. Western urbain s'implantant dans une minuscule bourgade ("Le monde est petit, Monsieur West" "Il est même microscopique" répond l'intéressé) nommée Justice, dont les habitants, ploucs farceurs, célèbrent la semaine de l'Ordre public (sic), et que la méchante Lucrèce Posey (excellente et sexy, dans le genre "cougar", Delphi Lawrence, inconnue, pour moi, au bataillon) choisit comme lieu de séminaire pour les plus vicieuses ordures de la planète (le pyromane est particulièrement gratiné), l'épisode, sous des dehors goguenards, décline brillamment le concept de la série en laissant sourdre le mal le plus vénéneux (la séquence de la tarentule le symbolise efficacement) dans le cadre rassurant de la bonne vieille bourgade westernienne. Kammerpiel ludique et venimeux, La Nuit du Poison (j'aime beaucoup le titre original) gratifie notre rétine d'images (le défilé funèbre des assassins en plein centre ville :mrgreen: ou ce décor de grange encombrée de pains de glace) qui s'impriment avec pérennité dans la mémoire des grands enfants que la série a su mettre sous son emprise.

La Nuit de la Terreur / The Night the Wizard Shook the Earth (saison 1, 1965)
scénario :John Kneubuhl réalisation : Bernard Kowalski
Première rencontre avec le Dr Loveless, La Nuit de la Terreur, quoique manquant un peu de rythme (on en est encore qu'aux débuts de la série), est assez bien réalisé et plutôt plaisant et soigné. Les configurations sont variées, sérialesques, bien alternées et surtout, pour son intronisation, Michael Dunn est déjà sensationnel d'invention, de troublantes oscillations entre enfantillages et précision séductrice. Comédien nain le plus remarquable de l'histoire audiovisuelle, Michael Dunn s'impose immédiatement en méchant dont on ne peut s'étonner qu'il ait pu être reconduit de la sorte. La première entrevue de Loveless avec James West, assis à côté de la charmante et candide Leslie Parrish, est un régal d'écriture : Loveless libère une mouche pataugeant dans son thé et entonne, avec sa comparse de l'époque, Antoinette, qu'interprète avec malice une Phoebe Dorin qui ressemble à Anjelica Huston, une comptine ravissante au doux refrain de "Bring a bit of water Suzie". On croise également Richard Kiel, en géant porteur de nain et quelque peu limité intellectuellement, qui sera réutilisé, bien avant d'apporter sa spectaculaire présence à L'Espion qui m'aimait, puis à Moonraker.

La Nuit de la Mort masquée / The Night of the Death Masks (saison 3, 1967)
scénario :Ken Pettus réalisation : Mike Moder
La saison 3 , qui subit un recentrage westernien, présente une patine graphique plus ensoleillée que les précédentes, plus cuite, plus burinée, comme cuivrée. On y sent plus le bois, la poussière. Son iconographie renvoie à un Ouest sauvage que les scénaristes vont parer de touches étranges à doses plus sobres que ce déploiement économe fera plus ressortir encore. De cette manière, le programme édicté par les vignettes animées du générique trouve à s'incarner visuellement. La Nuit de la Mort masquée en serait presque l'archétype. Episode le plus conceptuel de la série (une ville déserte, des masques à l'effigie du méchant Milton Selzner, un Jim West constamment semi-drogué), il est une réussite d'autant plus éclatante dans sa tenue plastique que la réalisation reste sobre de tout excès de psychédélisme. Comme dans un tableau de Dali, les objets et les accessoires se détachent avec une netteté surréelle qui constitue l'ADN atmosphérique de la série (Le Prisonnier et Chapeau melon et bottes de cuir voisinent) mais aussi sa singularité. La Nuit de la Mort masquée est un des épisodes les plus stimulants plastiquement, nous gratifiant de plans assez beaux et inventifs dans leur dépouillement : clones d'Emmet Stark (le méchant) aux masques cireux dont les costumes noir et blanc se détachent avec goût sur d'ocres arrière-plans ou ce plan subjectif qui déforme avec un certain bonheur le champ de vision de West, complètement drogué.

La Nuit de la Constitution / The Night of the Bubbling Death (saison 3, 1967)
scénario : David Moessinger réalisation : Irving J. Moore
Ni remarquable par son scénario, ni excitant par ses seconds rôles (Harold Gould, bof, Madlyn Rhue, démodée), La Nuit de la Constitution, qu'on ne doit pas confondre avec La Nuit de la Conspiration, ni avec La Nuit de la Conjuration :mrgreen: doit ici sa place à sa respiration organique, son adéquation parfaite au "wild wild entertainment". Et ceci, grâce à Irving J. Moore, le Monsieur West de la réalisation, celui qui sait nous faire nous sentir en famille, dans la connivence immédiate, la reconnaissance du cœur. La Nuit de la Constitution inocule quelque chose du jeu vidéo dans un épisode de 1967, présente avec pédagogie la topographie de l'enclave investie (Artemus fait le boulot), parce qu'une fois de plus sécessionniste, de l'opus, fomente une dynamique d'enfilades de corridors, en imagine un ou deux traversés d'une mixture bouillonnante (la "bubbling death" du titre original) pour un bilan mouvementé et feuilletonesque jusque dans sa clôture. Sans folie véritable mais secrètement réjouissant, ce premier épisode de la saison 3 semble fait pour avoir imprimé des images comme celles, bien cadrées et agencées, nous montrant James West passer au dessus de la mort bouillonnante.
Par ailleurs, je disais "pas remarquable pour ses seconds rôles" : il y a quand même William Schallert, remplaçant occasionnel de Gordon, acteur estimable décédé récemment, qui tient le rôle du falot "n'a qu' un œil" Mr Grigsby, qui apporte sa pierre à l'édifice, ou plutôt, à la jolie cahute, de l'épisode.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

TOP 10 WWW : LA NUIT DES PRETENDANTS (et ça continue)
Image
La Nuit du Lit-qui-tue / The Night of the Deadly Bed (saison 1, 1965)
scénario :George Schenk et William Marks réalisation : William Witney
Episode à apprécier à l'aune de ce que lui apporte William Witney : un style fait d'une bonne gestion du rythme, des attaques de plans (Barbara Luna et son flamenco) ainsi que de la grammaire cinématographique (gros plans, léger travellings sur un visage annonçant Spielberg, brefs et expressifs mouvements d'appareil) la plus adaptée au matériau. Whitney sait y faire, filmant comme il faut la très photogénique Barbara Luna, suscitant des images à la Comte Zaroff comme celles nous montrant le vilain français Fleury (JD Cannon) avec ses bergers allemands, pourchassant une donzelle. Non content de la traquer tel un gibier, il l'invitera à sa table de fin gourmet français alors qu'elle est affamée en lui présentant un menu auquel elle n'aura pas droit mais dont se régaleront ses chiens. Elle se jettera bestialement et humiliée sur une pitance qui lui sera accordée in fine : séquence d'un remarquable sadisme de sérial, pourtant digne du Salo de Pasolini (j'exagère un peu, bien sûr :mrgreen: ). Le méchant , qui a des vues revanchardes (les Français se sont pris une déculottée par les Américains au Mexique, ne l'oublions pas car c'est une histoire qui reste méconnue) sur le territoire américain, se fabrique un super-train blindé destiné à foncer dans les locos US. Une séquence nous montre le monstre à l'œuvre accompagnée d'une musique banalement dramatique et on se dit que les maquettes visibles à l'écran attestent que le budget des Mystères de l'Ouest est on ne peut plus cheap. Or il s'agit de maquettes dont se sert le méchant pour la démonstration qu'il offre à James West.
Excellente idée, j'imagine et j'espère, de Witney.

La Nuit des Masques / The Night of the Big Blast (saison 2, 1966)
scénario :Ken Kolb réalisation : Ralph Sennensky
Evidemment, pas sûr que cet épisode réconcilie Supfiction avec la saison 2 :uhuh: . Il appartient à la veine scientifico-bouffone de la série et on pourrait croire que ces increvables histoires de sosies où l'on voit West ou Gordon se battre contre eux-mêmes sortent de l'imagination d'un garçonnet de 7 ans. Pourtant, le plaisir tempéré mais réel que me procure La Nuit des Masques n'est aucunement coupable. D'abord parce que ce n'est pas mal réalisé : les séquences de Mardi-Gras à la Nouvelle-Orléans (ça y est, j'ai une chanson de Fats Domino en tête :roll: ) sont agréablement bariolées, entérinent le titre français, ici meilleur que l'original car tout à fait dans le sujet, et délivrent une esthétique carnavalesque qui est également constitutive de la série. A deux ou trois reprises, d'heureux fondus enchaînés viennent fluidifier le script avec une certaine classe.
Ensuite, la distribution vaut le coup. C'est marrant d'avoir pensé à la grande (pas par la taille) Ida Lupino pour interpréter l'évanescente savante folle de l'épisode, flanquée de son Igor de service. Idée pour le moins inattendue (déjà, une savante folle, c'est rare). Puis, il y a Patsy Kelly, vedette de l'intrigue parallèle nous narrant les retrouvailles de Gordon avec une amie d'enfance, devenue actrice, avec laquelle il flirte. Patsy Kelly, inénarrable mégère braillarde (Polanski lui donne un rôle savoureux dans Rosemary's Baby), fait la maman râleuse et encombrante de l'actrice et apporte à l'épisode une présence comique tonifiante.

La Nuit du Détonateur humain / The Night of the Human Trigger (saison 1, 1965)
scénario :Norman Katlov réalisation : Justis Addiss
Une fois de plus, un mégalomane veut détruire toute une portion d'USA (ici, le Wyoming) pour asseoir son règne. C'est le versant destructeur de certains canevas interchangeables de WWW. A d'autres occasions, c'est le trip "sécessionniste" qui prévaut.. Là, un géologue fou viré de Harvard provoque des séismes pour faire table rase du Wyoming en faisant pèter des charges de nitroglycérine sous l'écorce terrestre. Rien de nouveau sous les tropiques de l'Ouest sauvage. Une ou deux séquences de tremblement de terre s'en sortent pas trop mal avec 3 balles (surtout durant le pré-générique) et quelques décors font mouche comme cette turbine de concassage de minerais. Mais surtout, j'ai eu envie d'inclure l'épisode dans ce florilège pour une seule et bonne raison : la performance extraordinaire de Burgess Meredith, dans le rôle du Professeur Cadwallader, qui électrise tout l'épisode d'une logorrhée aussi inventive que vitaminée.
La grande forme!

La Nuit du Jugement / The Night of the Doomsday Formula (saison 4, 1968)
scénario :Samuel Newman réalisation : Irving J.Moore
J'estime qu'il en va de l'appréciation d'un épisode WWW comme de certaines préparations culinaires : tout est question de dosage. Les Mystères perdent pied dès lors que l'épice de la bonne humeur manque à l'appel, et bien sûr, avec tout ce que cela entraîne de sentiment de cahier des charges dévitalisé, de disjonction entre chaque composante de l'équipe de réalisation. A quelques milligrammes près, cet épisode-ci pourrait être fin con, pâteux, indigeste. Or, il passe bien. Ross Martin fait l'âne, déguisé en homme d'affaire arabe se fendant régulièrement d'un effendi onctueux que n'aurait pas désavoué Hergé, une assistante de colonel plutôt séduisante lit un rapport à Gordon qui en profite pour humer son parfum nommé "Vent du Cachemire" et le méchant trafiquant d'armes de l'épisode n'est autre que ce cher Kevin McCarthy. Tout cela pour ne pas perdre de vue que WWW est aussi une série histrionique qui joue (comme on dirait d'un match de foot qu'il "joue"), accueillante pour les comédiens et comédiennes, et leurs idées de jeu. Rarement on a envie de se plaindre d'un quelconque cabotinage puisque l'on y joue à cabotiner. Dans La Nuit du Jugement comme chez Blake Edwards, les chatoyantes couleurs d'une joyeuse pyrotechnie viennent nous rappeler que Les Mystères de l'Ouest sont aussi une comédie.
Dernière modification par Alexandre Angel le 12 nov. 16, 21:41, modifié 1 fois.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

TOP 10 WWW : LA NUIT DES PRETENDANTS (en veux-tu?)
Image
La Nuit des Tireurs d'élite / The Night of the Surreal McCoy (saison 2, 1966)
scénario :John Kneubuhl réalisation : Alan Crosland Jr
Encore un épisode avec Loveless et comme dans tout bon épisode avec Loveless, il faut s'attendre à ce que ça élucubre sévère sur le plan scientifique. On est pas déçus puisque Loveless trouve le moyen ici de capter l'essence de vie qui se trouve à l'intérieur de tableaux de peinture pour mieux en matérialiser des éléments (de décors, de personnages) et les faire s'immiscer au sein du réel. Tout cela n'est pas bien sérieux et pourrait lasser assez vite si un réel soin apporté aux couleurs, aux décors (c'est bien le moins pour un épisode consacré à la peinture) et au tempo ne venait prouver que l'absolue absence du moindre soupçon de vraisemblance de certains épisodes était une manière de célébrer avec le téléspectateur ce second degré et cette connivence, pas idiots du tout, qui sont aussi la marque de la série.WWW est une série aux multiples facettes, toutes complémentaires, dont le versant fantastique relève surtout du fantasque et du pastiche (pas que, il y a aussi du fantastique sérieux comme nous le verrons peut-être plus tard). Un épisode comme celui-ci se livre à l'exercice de l'équilibriste sur la corde tendue au dessus de l'abîme de la connerie. Suffisamment d'épisodes s'en sortent bien et attestent de la qualité générale de la série. D'autres se cassent la gueule. Ce dernier, surréel comme le surreal du titre original, reste un funambule fièrement campé sur sa corde.

La Nuit d'un Monde nouveau / The Night of the Raven (saison 2, 1966)
scénario :Ed di Lorenzo réalisation : Irving J.Moore
Toujours avec le Dr Miguelito Loveless (Michael Dunn, en roue libre), La Nuit d'un monde nouveau illustre à l'extrême limite du point de rupture ce qui a été dit juste au dessus. Le basculement de ce que l'on aurait pu titrer La Nuit de l'Homme qui rétrécit dans l'infantilisme serait à deux doigts de s'effectuer si, là encore, le fantastique n'apparaissait pas comme l'invité qu'il est au sein du wild wild univers, comme le sont les guest stars qui viennent y faire visite. En forçant James West à rétrécir et à se battre contre un chat, comme dans le film de Jack Arnold, sous couvert de trucages pas terribles mais pas trop nuls non plus, l'épisode saupoudre son étrangeté habituelle d'une dose de fantastique sans doute trop chargée mais suffisamment corrélée aux extravagances du nain vedette pour que cela passe comme une bonne blague, une bouffée de délire dont personne n'est dupe. J'attirerais une fois de plus l'attention sur le fait que des épisodes comme celui-là restent tout de même soignés dans leur imagerie, truffés de petites idées amusantes, de micro-gags généreusement disséminés et de péripéties suffisamment rigolotes, pour qu'une certaine finesse préserve l'ensemble, à mon sens, du classement vertical.

La Nuit de l'Œil-mémoire / The Night of the Camera (saison 4, 1968)
scénario :Ken Pettus réalisation : Marvin Chomsky
Episode où y a pas Gordon puisqu'y a Jeremy Pike (Charles Aidman, non dénué de classe), La Nuit de l'Œil mémoire est pas mal. D'abord il correspond à cette veine brillante, au sein d'une quatrième saison qui pèse parfois aux entournures, d'épisodes instruits sous le signe d'une espèce de psychédélisme salonard, un peu comme si l'on croisait James Bond avec Les Gens de Mogador. En résulte une ambiance dix-neuvièmiste que les tablas onctueux de Richard Shores rendent plus sophistiquée encore pour peu que le scénario soit correctement mitonné. C'est le cas ici grâce à Ken Pettus, qui met dans les pattes de West et Pike un troisième agent secret, interprété par Pat Paulsen, qui campe un personnage savoureusement maladroit et timoré mais recelant plus d'une ressource dont celle qui consiste à photographier mentalement des pages entières d'un ouvrage susceptible de confondre un trafiquant d'opium. Barry Atwater est ce méchant trafiquant peu charismatique mais d'une classe que rend remarquable un understatement bien ajusté à son personnage de malfrat soignant sa respectabilité et sa discrétion. Ensuite, le script, à l'instar de celui de La Nuit du Kinétoscope, convoque astucieusement l'esprit d'une époque (Les Mystères de l'Ouest sont aussi une série historique) qui lorgne vers la photographie, l'image animée, qui courtise l'optique, la persistance rétinienne. Il y a de cela dans ces épisodes-là.

La Nuit des Assassins / The Night of the Skulls (saison 2, 1966)
scénario :Robert Dennis et Earl Barret réalisation : Alan Crosland, Jr
Tout à fait dans l'esprit futile et réjouissant de la saison 2, La Nuit des Assassins nous plonge avec drôlerie dans l'antre du Mal absolu où les assassins sont innocents et les innocents coupables. Idée de scénario toute simple autant que pléonastique par rapport au thème permanent de la série. Plus pulpy que jamais, nous gratifiant de visions aussi dantesques que cousines des imageries à la Hanna et Barbera (le look de la confrérie des Assassins est impayable!), l'épisode baigne dans un humour tranquillement jubilatoire, agrémenté d'une iconographie très "Fête des Morts" et d'un scénario narquois qui s'amuse (et nous avec) à inverser les valeurs positives. En effet, l'épisode, qui s'ouvre sur une chasse-à-courre dépaysante avant de nous montrer Jim West tuer Gordon lors d'une fausse-rixe (subterfuge destiné à provoquer le recrutement de Jim par la confrérie funeste évoquée plus haut), enchaîne avec la prestation de Gordon, déguisé en pasteur officiant à son propre enterrement qui en fait des caisses dans l'auto-éloge sous l'œil désapprobateur du Colonel Richmond (moment très drôle). Puis West, lors d'un procès (ou plutôt une commission) où sa culpabilité équivaut à son innocence aux yeux d'un jury gratiné (L'Etrangleur de Chicago, le Samouraï de Frisco :mrgreen: ), s'entend défendre par sa belle avocate masquée d'un "Sa culpabilité ne peut faire de doute lorsque l'on voit son beau visage dépravé" tout à fait délectable. Si l'on adjoint à tout ceci un bon rythme porté par de bonnes idées, comme cette façon originale qu'à Jim West de se libérer d 'une cellule, on a droit à un épisode d'authentique Gothic fun dont on sait qu'on le reverra toujours avec plaisir.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

TOP 10 WWW : LA NUIT DES PRETENDANTS (en voilà..)
Image
La Nuit où le Dragon cria / The Night the Dragon screamed (saison 1, 1965)
scénario :Kevin de Courcy réalisation : Irving J. Moore
Il en fallait un : c'est celui-ci. La chinoisitude parcourant l'échine des Mystères de l'Ouest s'est toujours manifestée ici où là, sporadiquement, au gré des escales à San Francisco (j'adorais quand un WWW s'ouvrait sur Frisco, c'était super exotique). Dans La Nuit où le Dragon cria, on y est jusqu'au cou, entourés de chinois, baignés dans un précipité de trip sérialesque (purée, les néologismes!) situé à égale distance entre Milton Caniff, le Limehouse Blues de Minnelli, Philippe de Broca et Indiana Jones. L'épisode reste une petite chose flottant au milieu de ces références écrasantes mais dont elle n' est pas moins la récipiendaire, et ce, dès ce pré-générique, très Terry et les Pirates, bien photographié par le directeur de la photo maison Ted Voigtlander, qui nous offre un travelling nocturne caressant latéralement des coolies apeurés et se terminant sur l'un d'eux, Gordon, très bien grimé en chinois d'opérette. L'excellent et modeste Irving J. Moore emballe tout cela avec un métier frappé du sceau d'une élégance discrète, presque étouffée mais néanmoins piquante et le scénariste, Kevin de Courcy, qui a un joli nom, accouche de dialogues fourrés à l'humilité kitsch (style "L'indigne vers de terre qui se présente à vous n'est pas digne d'être votre serviteur", bon j'invente, mais c'est ce genre-là) qui épice l'ensemble de saillies qui en consolident le charme.

La Nuit de la Terreur cachée / The Night the Underground Terror (saison 3, 1967)
scénario :Max Hodge réalisation : James B. Clark
Vraiment brillant cet épisode! Il pourrait constituer une éclatante Nuit d'Or si le traditionnel bouclage des péripéties, forcément soldé par une bagarre de gosse presque toujours épatante (du moins dès les saisons en couleurs), n'était ici un tantinet foutage de gueule : Gordon faisant le cake déguisé en chercheur d'or anglais qui entraîne à sa suite, tel le Joueur de flûte de Hamelin, une tripotée de malfrats rendus fin cons (un peu trop) par la fièvre de l'or. Fin à la fois rigolote mais pauvre que ne méritait pas une assez belle première moitié beaucoup plus adulte dans sa portée divertissante.
Faisant contraster les fastes de Mardi-Gras à la Nouvelle Orléans (Fats Domino, ça suffit!) avec des égouts où rampent presque littéralement des éclopés de la Guerre de Sécession, emmenés par un halluciné Major Hazard, que joue Nehemiah Persoff avec inspiration, qui cherchent à se venger d'un tortionnaire en charge du camp où ils étaient prisonniers (Jeff Corey), l'épisode commençait dans les ors d'une allure graphique aussi pertinente que racée. D'autant que ce thème des camps de concentration de la guerre civile américaine (traités presqu'au même moment par Sergio Leone dans Le Bon, la Brute et le Truand) contribuait à insuffler à la série sa teneur caractéristique en toxicité souterraine. La bagarre finale est accompagnée d'un très bon thème de Richard Shores, peu usité dans la série, mais pourtant captivant (on l'entend aussi dans La Nuit de Montezuma).

La Nuit du Diamant / The Night the Bleak Island (saison 4, 1968)
scénario :Robert E. Kent réalisation : Marvin Chomsky
C'est le Shutter Island des Mystères de l'Ouest, toute proportions gardées, évidemment. La Nuit du Diamant est surtout un de ces épisodes (comme La Nuit de la Bête, La Nuit de la Maison hantée, La Nuit du Loup ainsi que La Nuit de l'Eternelle jeunesse) où les Nuits sont vraiment des nuits, et la tradition dans laquelle ils s'inscrivent celle d'un American Gothic dont le porte étendard n'est autre qu' Edgar Allan Poe. L'épisode qui nous intéresse, appartenant à une saison biscornue, a non seulement la particularité de se passer d'Artemus Gordon mais aussi celle de ne pas le remplacer ou alors de façon astucieusement oblique, en la personne d'un détective anglais venant prêter main forte à West pour protéger un diamant fort convoité sur l'île du titre, battue par les vents. Sir Nigel Scott, donc, est interprété par John Williams (celui de chez Hitchcock) avec une distinction british qui contribue au charme d'une histoire ni très inventive, ni originale dont la formule habile distille pourtant une élégance convenue mais indéniable.
Un épisode de ceux dans lesquels on aimait se lover, jadis, lorsque le soir d'hiver tombait vite, et qu'une discrète lueur d'appoint chaleureuse venait nous réchauffer l'âme.

La Nuit du Conseil d'administration / The Night the Tycoons (saison 4, 1968)
scénario :Louis Vittes et Barney Slater réalisation : Mike Moder
Enchainons avec un épisode dénué de Gordon et de remplaçant. Dans l'exercice auquel je me livre sur ce topic, je me suis mis en mode intègre, impartial. Autrement dit, mon jugement est inébranlable quand bien même tel ou tel épisode serait relié à un souvenir d'enfance puissant (et les souvenirs liés à WWW le sont). Celui qui nous occupe , outre qu'il zappe Artie, ne m'évoquait pas grand chose quand je le visionnais dans le cadre du coffret. Depuis, il ne cesse de gagner ma considération. Son scénario est séduisant (un complot sur fond d'actions en bourse manipulées) et la méchante qu'interprète Jo Van Fleet (mère de James Dean dans A l'Est d'Eden), même que je spoile et que je n'en ai cure, possède la classe charismatique qui convient à un épisode de tenue. Si l'on ajoute à cela une construction solide, panachée, huilée avec un certain lustre ainsi qu'une adjonction de motifs insolites plaqués mais pertinents ici, tels qu'un singe, des otaries et des clowns, on a affaire à un épisode bariolé et spectaculaire. Comme l'atteste la séquence de la bagarre avec les clowns, filmée en plan large surélevé avec une mise en condition préalable tout à fait hitchcockienne.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

TOP 10 WWW : LA NUIT DES PRETENDANTS (quand y en a plus..)
Image
La Nuit des Bandits/ The Night the Bogus Bandits (saison 2, 1967)
scénario :Henry Sharp réalisation : Irving J. Moore
A mon goût, le meilleur Loveless. La Nuit des Bandits commence brillamment par ce braquage de banque qui est un simulacre avec intervention héroïque de James West qui se fait descendre. C'est un sosie (les mèches un peu blondes nous avaient alertés) et il est réellement mort. C'est "parce qu'il est rentré court plutôt que jardin" renseigne son assassin, lui-même négocié par Loveless, en guise de blâme. Car c'était une répétition.. les bandits étant coachés par un Miguelito Loveless perfectionniste, avide de faire d'une pierre deux coups : mener des attaques simultanées pour déstabiliser l'état fédéral et tuer une bonne fois pour toutes le pire ennemi James West qui s'entendra dire : "je suis las de votre corps d'athlète, de votre suffisance, de votre abnégation de fourmi aux ordres de ce monde médiocre et de cette façon que vous avez toujours d'arriver au mauvais moment". L'opus est bien construit, vif, mordant comme l'air roboratif du matin, écrit autour d'un "Petit Conservatoire du Crime" dont Loveless serait la Mireille, nous réservant de fantasques apparitions telles ce mini-bar génial aménagé...dans un corbillard. Il n'y a qu'Irving J. Moore pour emballer cela avec humour, rapidité et tonicité et articuler les séquences avec une certaine classe comme lorsque Gordon suggère à d'un vieux forgeron qu'il va lui emprunter sa tignasse et sa moustache pour s'en déguiser et qu'un délicat fondu enchaîne sur un plan sur lequel trône Loveless, sous un auvent bariolé aux côté de la télégénique Marianna Hill. Plaisirs de la forme..

La Nuit hors du Temps/ The Night of the Lord Of the Limbo (saison 2, 1966)
scénario :Henry Sharp réalisation : Jesse Hibbs
Nous sommes là sur le versant irrationnel des Mystères de l'Ouest. Là où, comme diraient les Classikiens, il devrait y avoir "suspension d'incrédulité". Après La Nuit de la Maison hantée, celle des Tireurs d'élite ainsi que celle du Monde nouveau, voici venir celle qui est hors du temps, celle qui fait de l'œil à Au cœur du temps, série contemporaine totalement fantastique. Là où les Tireurs d'élite et le Monde nouveau compensaient le côté plaqué de l'irrationnel par une bouffonnerie entendue et complice, des épisodes tels que la Maison hantée et La Nuit hors du temps la jouent premier degré comme si la production prétextait le fantastique pour avoir l'air moins enfantine. Naïveté autant spontanée que réfléchie, étudiée, qui fait la particularité de la série. Il incombe à Jesse Hibbs, artisan sans génie mais visité par le métier, de ficeler cette élucubration sudiste avec une efficacité qu'il a le bon goût de rendre charmante grâce à certains plans évoquant les bandes plaisantes de Rudolph Maté chez Universal (Le Gentilhomme de la Louisiane, essentiellement). Ross Martin nous y montre, en haut de forme, son élégance de bretteur et James West, aux aguets, se bat avec une célérité digne d'Audie Murphy. Un bon divertissement habité par un fantôme de la guerre de Sécession qui vient hanter quelques épisodes, dont celui-ci, des Mystères de l'Ouest.

La Nuit du Couteau à double tranchant/ The Night of the Double Edged Knife (saison 1, 1965)
scénario :Steve Kandel réalisation : Don Taylor
D'humeur folâtre, cette réalisation du compétent Don Taylor s'ouvre pourtant sur un pré-générique sombre, presqu'anxiogène, avec ces pendus hérissés de flèches se balançant au dessus d'une voie ferrée. Le reste de l'épisode se déroulera dans une ambiance autrement plus rigolarde avec son chef indien cultivé, son méchant roublard et tout de duplicité (Leslie Nielsen, déjà enclin à voir son nez s'agrandir) et ses séquences aussi mouvementées que dans un long-métrage calibré. Katherine Ross est de la partie, ainsi qu'Elisha Cook, dans son éprouvé numéro de corrompu promis à l'éra(t)dication. Une halte dans un camp d'indiens accusés de crimes terribles qu'ils n'ont pas commis (because complot) sera l'occasion pour James West de subir une séance de torture d'opérette ("Je m'appelle Petite Fleur Bleue" annonce son adorable tortionnaire dans la VF avant de faire semblant de le charcuter) qui est un moment marrant comme celui où Artemus Gordon, jouant le gandin, provoque un sbire dangereux en lui collant une baffe déclanchant l'incrédulité du baffé. Sous l'égide du simulacre, l'épisode, en un moment discrètement brillant, nous montre James West espionner, au travers de la béance d'une caverne, les méchants qui, se sachant espionnés par notre héros, racontent des cracks pour l'abuser alors qu'une fumée remonte par l'ouverture et aveugle West. Le héros est ici littéralement enfumé en une métaphore plaisamment feuilletonesque.

La Nuit des Mille Yeux/ The Night of a Thousand Eyes (saison 1, 1965)
scénario : Preston Wood réalisation : Richard C.Sarafian
Il eût été dommage de ne pas faire mention d'une réalisation de Richard C.Sarafian, bien connu des cinéphiles pour avoir aligné, entre 1971 et 1973, les remarquables Point Limite Zéro, Convoi sauvage et Fantôme de Cat Dancing. C'est ici sa seconde contribution aux Mystères de l'Ouest, la première étant LA toute première, l'épisode pilote. Pour narrer cette sombre histoire de pirates du Mississippi, Sarafian fait montre d'une certaine autorité déjà toute cinématographique, utilisant les ressources du noir et blanc pour mieux dramatiser le climat shakespearien qui nimbe la personnalité du méchant naufrageur et aveugle qu'interprète avec une certaine flamboyance l'impérial Jeff Corey. Certains décors témoignent d'une invention attachante tels cette salle d'eau pour hommes, squattée par une séduisante et sexy tueuse blonde que James West va faire craquer. Cette dernière est interprétée de façon piquante par Diane McBain que l'on retrouvera, plus discrètement, en classieuse "femme de main" d'Agnes Moorehead dans l'excellente Nuit de la Mariée. Lorsque la belle tueuse invite West à dîner et qu'il se trouve en vis-à-vis, à l'autre bout d'une longue table, nous la voyons progressivement se rapprocher de lui au rythme d'intermittents coups de tonnerre. Afféterie élégante dont Les Mystères de l'Ouest savaient assez souvent nous gratifier.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

TOP 10 WWW : LA NUIT DE LA DERNIERE SALVE DE PRETENDANTS
Image
La Nuit de l'Eternelle jeunesse/ The Night of the Sedgewick Curse (saison 4, 1968)
scénario : Paul Playdon réalisation : Marvin Chomsky
Le Monde des Avengers fait de cet épisode éventuellement le sommet de la série. Si je ne leur emboîte guère le pas au point de le placer en tête de liste du fait d'un certain défaut de fantaisie imputable à un parti-pris gothique vu dans d'autres séries (Le Sixième Sens, pour les vétérans de Samedi est à vous :fiou: ), force est de reconnaître que cette histoire fantastique frappée du sceau de Poe autant que de Roger Corman nous est narrée avec soin, et un sérieux (inhabituel au pays de l'Ouest sauvage, sauvage) saupoudré avec suffisamment de mesure pour que la complicité ne soit pas rompue.
Il faut dire que le scénario use d' un mode american gothic habilement importé et plutôt bien troussé dans sa résolution, en un mélange charmant de densité romanesque de poche et de solde roublarde des péripéties. Un beau décor de chambre pivotante, une mystérieuse et originale atmosphère d' hôtel thérapeutique et un climat romantique sombre régulièrement scandé par la foudre font leur effet et assurent l'entertainment d'autant qu'une photographie de Edward R.Plante, mettant notamment en valeur la plastique élégante de Sharon Acker de façon raffinée et sépulcrale, s'avère être, pour le coup, la plus classe de toute la série.

La Nuit du Musée maudit/ The Night of the Torture Chamber (saison 1, 1965)
scénario : Philip Saltzman et Jason Wingreen réalisation : Alan Crosland Jr.
La saison 1 en noir et blanc est celle qui est le plus grossièrement quadrillée sur le plan scénaristique. Régulièrement l'on retrouve des variations autour des mêmes canevas. Tantôt il faut infiltrer des putscho-sécessionnistes stationnés dans le même fortin, tantôt le mal est ourdi au cœur même des instances fédérales, auquel cas les ambiances s'en trouvent plus bourgeoises, plus mondaines. C'est le cas ici où un conservateur de musée et collectionneur fou remplace le gouverneur local par son sosie pour vider les caisses de l'état afin d'enrichir sa collection (le bougre veut se payer La Joconde comptant sur la crise qui frappe la France :mrgreen: qui, du coup, n'hésitera pas à brader son trésor national). Cet épisode n'a rien de follement original mais nous saluerons néanmoins sa distinction formelle confinant à la délicatesse ainsi que son méchant : le très élégant Alfred Ryder (bien connu des fans des Envahisseurs), doué pour l'introversion, presque souffreteuse, du fonctionnaire du Mal qu'il est souvent à l'écran. Henry Beckman, dans le rôle du vrai-faux gouverneur est pas mal non plus et Ross Martin se fait le plaisir d'apparaître en critique d'art français qui s'appelle Gaston Larousse (sic) et qui pourrait sortir d'une affiche de Toulouse-Lautrec. Et puis, il y a une bagarre dans une ruelle relativement violente avec apparition d'un poing américain.

La Nuit de la Conspiration/ The Night of the Assassin (saison 3, 1967)
scénario :Robert Dennis et Earl Barret réalisation : Alan Crosland, Jr
L'iconographie wild westienne emprunte de temps à temps le sombrero mexicain (pléonasme?). Le Mexique se rappelle régulièrement à notre bon souvenir via des histoires de complots ourdis contre El Presidente Benito Juarez. Outre qu'on ne peut s'empêcher, à ces occasions, de penser à Zorro, ces configurations viennent enrichir la diversité graphique de la série de motifs latino qui renvoient au mexicain qui sort à reculons d'un saloon dans le superbe générique dont je suis en train de réaliser que j'aimerais bien connaître le nom du concepteur. Bref, tout cela pour dire que La Nuit de la Conspiration est un des plus agréables représentants de ce courant wild westien-là avec ses couleurs bizarres, sa déco hacienda super soignée, et ses flonflons mariachis. Agencement baroque auquel les déguisements de Gordon (notamment un old timer texan très réussi), une bagarre ravageant spectaculairement un atelier de poterie ainsi qu'un impeccable méchant interprété par Robert Loggia (le patron de Tony Montana dans Scarface) servent de mortier. La finesse et l'humour de la série trouvant à s'incarner via le personnage féminin, une mexicaine, de l'histoire, qui s'avère être le chef des Services Secrets mexicains répondant au doux nom du Colonel Lupita Belacqua (j'adore). D'ailleurs, à la toute fin, avant de quitter le train pour aller diner avec nos deux agents, elle leur présentera le Lieutenant Ramirez, une autre ravissante chiquita. C'est toujours sympa ces conneries-là :mrgreen: .

La Nuit du Cirque de la Mort/ The Night of the Circus of Death (saison 3, 1967)
scénario :Arthur Weingartenréalisation : Irving J.Moore
Décalque avec variation de La Nuit de la Mort subite (saison 1), cette nouvelle histoire de faux-monnayeurs est plus classique que l'originale, dont j'aimais bien le délire jungle et constitue un épisode très traditionnel. Mais il est pourtant l'un des tous meilleurs de la saison 3 grâce à la sûreté du geste d'Irving J.Moore, le menuisier numéro un de la série, qui pare ces 47 minutes d'un raffinement formel de tous les instants, jamais flashy ou ostentatoire mais donnant l'impression que des gravures d'époque s'animent d'une vie qu'alimente un scénario classique mais intelligent. Chaque séquence succède à la précédente selon l'évidence d'un sérial bien huilé et les scènes d'action sont aussi sobres qu'efficaces (le pré-générique est une réussite). Visuellement, l'épisode affiche un bon goût jamais pris en défaut, nous caressant la vue de couleurs chaudes et pastelles comme celles du magasin de lingeries fines de Denver qui sert de couverture aux faux-monnayeurs et qui sera le décor d'une excellente scène avec Artemus Gordon.

La Nuit des Cosaques/ The Night of the Tartar (saison 2, 1966)
scénario :Robert C.Dennis et Earl Barretréalisation : Charles Rondeau
Terminons ce florilège avec un épisode rigolo qui est le premier que j'ai vu en couleurs lorsque l'on pouvait enfin voir les programmes de la une en mettant la 3, qui n'avait pas de programmes l'après-midi, pour un "décrochage" couleur absolument délicieux. Bien plus haut j'avais évoqué Blake Edwards. Cet épisode comique nous y ramène en évoquant l'esprit des séquences "Zenda" de The Great Race, où brillait déjà Ross Martin mais l'on pense aussi aux dernières séquences du Monde lui appartient, de Raoul Walsh, avec ses Cosaques de pacotille, ses toques en fourrure et ses balalaïkas. Il ne faut jamais mépriser ces épisodes élégamment inconséquents, à l'esprit camp assumé, au kitsch totalement contrôlé, amusants, décontractés, parodiques. On y trouve des dialogues sympas comme cette réplique de West, qui s'est fait droguer comme un bleu et se réveille après une traversée maritime. Son ravisseur lui demande : "Did you enjoy the crossing ?", ce à quoi Jim répond "Yes, but not the double-crossing ". Ross Martin s'amuse comme un gosse, et, croyant tomber sur un moujik, se met à parler russe à un old timer des familles, qui lui répond "Faudrait p'têt songer à t'exprimer plus clairement, fils." :mrgreen:
Voilà, fin du florilège et place au classement.
Dernière modification par Alexandre Angel le 16 oct. 16, 23:29, modifié 8 fois.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Burnett
Sévèrement
Messages : 1035
Inscription : 11 mars 07, 12:46

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Burnett »

A chaque fois que je viens lire ce topic, je me sens projeté une quarantaine d'années en arrière, et ça me donne envie de repartir pour un énième visionnage de cette série de mon enfance. :D
Alexandre, tu résumes parfaitement pourquoi cette série reste pour moi un "must". Merci pour tes textes toujours justes. 8)
Avatar de l’utilisateur
Jeremy Fox
Shérif adjoint
Messages : 99608
Inscription : 12 avr. 03, 22:22
Localisation : Contrebandier à Moonfleet

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Jeremy Fox »

Alexandre Angel a écrit : (Le Sixième Sens, pour les vétérans de Samedi est à vous :fiou: ),

Count me in 8)

Sinon tes textes font effectivement bien envie.
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

Merci à vous Messieurs :)
Encore 2 ou 3 épisodes à "notuler", puis le classement, puis je désquatte le topic :mrgreen:
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

LA NUIT DU TOP 10 DES MYSTERES DE L'OUEST
Image
LA NUIT D'OR
est décernée à
La Nuit de la Mort masquée / The Night of the Death Masks (saison 3, 1967)
scénario :Ken Pettus réalisation : Mike Moder
La saison 3 , qui subit un recentrage westernien, présente une patine graphique plus ensoleillée que les précédentes, plus cuite, plus burinée, comme cuivrée. On y sent plus le bois, la poussière. Son iconographie renvoie à un Ouest sauvage que les scénaristes vont parer de touches étranges à doses plus sobres que ce déploiement économe fera plus ressortir encore. De cette manière, le programme édicté par les vignettes animées du générique trouve à s'incarner visuellement. La Nuit de la Mort masquée en serait presque l'archétype. Episode le plus conceptuel de la série (une ville déserte, des masques à l'effigie du méchant Milton Selzner, un Jim West constamment semi-drogué), il est une réussite d'autant plus éclatante dans sa tenue plastique que la réalisation reste sobre de tout excès de psychédélisme. Comme dans un tableau de Dali, les objets et les accessoires se détachent avec une netteté surréelle qui constitue l'ADN atmosphérique de la série (Le Prisonnier et Chapeau melon et bottes de cuir voisinent) mais aussi sa singularité. La Nuit de la Mort masquée est un des épisodes les plus stimulants plastiquement, nous gratifiant de plans assez beaux et inventifs dans leur dépouillement : clones d'Emmet Stark (le méchant) aux masques cireux dont les costumes noir et blanc se détachent avec goût sur d'ocres arrière-plans ou ce plan subjectif qui déforme avec un certain bonheur le champ de vision de West, complètement drogué.
LA NUIT D'ARGENT
est décernée à
La Nuit de la Mariée / The Night of the Vicious Valentine(saison 2, 1967)
scénario : Leigh Chapman réalisation : Irving J. Moore
Il suffit de voir Agnes Moorehead apparaître pour comprendre immédiatement que La Nuit de la Mariée est un très sérieux prétendant au cercle des 10. Méchante à la présence digne d'un bon divertissement de cinéma, l'actrice apporte à l'épisode une distinction, un raffinement que sentent parfaitement les décorateurs de la série qui soignent tout particulièrement les détails et les couleurs des intérieurs du personnage. L'épisode en acquiert une texture exquise, marque des meilleurs épisodes de la saison 2. Le scénario se montre, du reste, affûté et contribue à cette éclatante réussite.
Même le pote cascadeur à Robert Conrad, pas Red West mais l'autre, le nabot dont j'ai oublié le nom (je le retrouverai), présent dans presque tous les épisodes, se fend ici d'une composition, en homme de main qui ricane comme une hyène tout en se bagarrant.
LA NUIT DE BRONZE
est décernée à
La Nuit du Poison / The Night of the Poisonous Posey (saison 2, 1966)
scénario :Leigh Chapman, d'après une histoire de Donn Mullaly réalisation : Alan Crosland,Jr
Emblématique de la deuxième saison, cet épisode n'a que le défaut d'être irréprochable. Excellemment réalisé, rythmé d'un impeccable timing, La Nuit du Poison pourrait être la rencontre improbable entre Lucky Luke et David Lynch. Une fois de plus, la présence de Leigh Chapman au scénario (c'était ce qu'il m'avait semblé repérer mais j'en ai là une confirmation) est un gage de qualité. Western urbain s'implantant dans une minuscule bourgade ("Le monde est petit, Monsieur West" "Il est même microscopique" répond l'intéressé) nommée Justice, dont les habitants, ploucs farceurs, célèbrent la semaine de l'Ordre public (sic), et que la méchante Lucrèce Posey (excellente et sexy, dans le genre "cougar", Delphi Lawrence, inconnue, pour moi, au bataillon) choisit comme lieu de séminaire pour les plus vicieuses ordures de la planète (le pyromane est particulièrement gratiné), l'épisode, sous des dehors goguenards, décline brillamment le concept de la série en laissant sourdre le mal le plus vénéneux (la séquence de la tarentule le symbolise efficacement) dans le cadre rassurant de la bonne vieille bourgade westernienne. Kammerpiel ludique et venimeux, La Nuit du Poison (j'aime beaucoup le titre original) gratifie notre rétine d'images (le défilé funèbre des assassins en plein centre ville :mrgreen: ou ce décor de grange encombrée de pains de glace) qui s'impriment avec pérennité dans la mémoire des grands enfants que la série a su mettre sous son emprise.

4ème
La Nuit des Assassins / The Night of the Skulls (saison 2, 1966)
scénario :Robert Dennis et Earl Barret réalisation : Alan Crosland, Jr
Tout à fait dans l'esprit futile et réjouissant de la saison 2, La Nuit des Assassins nous plonge avec drôlerie dans l'antre du Mal absolu où les assassins sont innocents et les innocents coupables. Idée de scénario toute simple autant que pléonastique par rapport au thème permanent de la série. Plus pulpy que jamais, nous gratifiant de visions aussi dantesques que cousines des imageries à la Hanna et Barbera (le look de la confrérie des Assassins est impayable!), l'épisode baigne dans un humour tranquillement jubilatoire, agrémenté d'une iconographie très "Fête des Morts" et d'un scénario narquois qui s'amuse (et nous avec) à inverser les valeurs positives. En effet, l'épisode, qui s'ouvre sur une chasse-à-courre dépaysante avant de nous montrer Jim West tuer Gordon lors d'une fausse-rixe (subterfuge destiné à provoquer le recrutement de Jim par la confrérie funeste évoquée plus haut), enchaîne avec la prestation de Gordon, déguisé en pasteur officiant à son propre enterrement qui en fait des caisses dans l'auto-éloge sous l'œil désapprobateur du Colonel Richmond (moment très drôle). Puis West, lors d'un procès (ou plutôt une commission) où sa culpabilité équivaut à son innocence aux yeux d'un jury gratiné (L'Etrangleur de Chicago, le Samouraï de Frisco :mrgreen: ), s'entend défendre par sa belle avocate masquée d'un "Sa culpabilité ne peut faire de doute lorsque l'on voit son beau visage dépravé" tout à fait délectable. Si l'on adjoint à tout ceci un bon rythme porté par de bonnes idées, comme cette façon originale qu'à Jim West de se libérer d 'une cellule, on a droit à un épisode d'authentique Gothic fun dont on sait qu'on le reverra toujours avec plaisir.

5ème
La Nuit des Bandits / The Night the Bogus Bandits (saison 2, 1967)
scénario :Henry Sharp réalisation : Irving J. Moore
A mon goût, le meilleur Loveless. La Nuit des Bandits commence brillamment par ce braquage de banque qui est un simulacre avec intervention héroïque de James West qui se fait descendre. C'est un sosie (les mèches un peu blondes nous avaient alertés) et il est réellement mort. C'est "parce qu'il est rentré court plutôt que jardin" renseigne son assassin, lui-même négocié par Loveless, en guise de blâme. Car c'était une répétition.. les bandits étant coachés par un Miguelito Loveless perfectionniste, avide de faire d'une pierre deux coups : mener des attaques simultanées pour déstabiliser l'état fédéral et tuer une bonne fois pour toutes le pire ennemi James West qui s'entendra dire : "je suis las de votre corps d'athlète, de votre suffisance, de votre abnégation de fourmi aux ordres de ce monde médiocre et de cette façon que vous avez toujours d'arriver au mauvais moment". L'opus est bien construit, vif, mordant comme l'air roboratif du matin, écrit autour d'un "Petit Conservatoire du Crime" dont Loveless serait la Mireille, nous réservant de fantasques apparitions telles ce mini-bar génial aménagé...dans un corbillard. Il n'y a qu'Irving J. Moore pour emballer cela avec humour, rapidité et tonicité et articuler les séquences avec une certaine classe comme lorsque Gordon suggère à d'un vieux forgeron qu'il va lui emprunter sa tignasse et sa moustache pour s'en déguiser et qu'un délicat fondu enchaîne sur un plan sur lequel trône Loveless, sous un auvent bariolé aux côté de la télégénique Marianna Hill. Plaisirs de la forme..

6ème
La Nuit de la Soucoupe volante / The Night of the Flying Pie Plate (sic) (saison 2, 1966)
scénario : Daniel Ullman réalisation: Robert Sparr
Cet épisode fait immédiatement retomber en enfance. Cela amusera Jérémy Fox de se dire que le scénario étant rédigé par Dan Ullman, on ne s'étonnera pas que le western soit ici urbain. Annonçant le Cow-boys contre envahisseurs de Jon Favreau mais se situant surtout dans la veine "supercherie" de La Marque du Vampire, de Tod Browning, La Nuit de la Soucoupe volante enfonce joyeusement le clou des apparences et des faux-semblants qui est un des charmes inaltérables de la série avec ses vénusiennes de pacotille (elles sont mignonnes malgré leur teint verdâtre et il y en a une qui tombe amoureuse de West) et ses charlatans haut en couleurs (vive Ford Rainey). Le décor de la soucoupe est fort plaisant avec son look "Nautilus" et les couleurs, délicieusement kitsch, accusent l'étrangeté du choc des cultures. La bagarre finale est tout à fait roborative et mise en musique de façon excitante.
Bonnes retrouvailles.
Ajoutons que le fantastique, dans Les Mystères de l'Ouest, s'invite parfois (surtout dans la saison 2) la gueule enfarinée, comme si il avait vu de la lumière mais toujours sous le signe de la supercherie, de l'hallucination ou par l'entremise d'un savant fou, se piquant de contrôler "rationnellement" l'irrationnel.

7ème
La Nuit du Cirque de la Mort / The Night of the Circus of Death (saison 3, 1967)
scénario :Arthur Weingarten réalisation : Irving J.Moore
Décalque avec variation de La Nuit de la Mort subite (saison 1), cette nouvelle histoire de faux-monnayeurs est plus classique que l'originale, dont j'aimais bien le délire jungle et constitue un épisode très traditionnel. Mais il est pourtant l'un des tous meilleurs de la saison 3 grâce à la sûreté du geste d'Irving J.Moore, le menuisier numéro un de la série, qui pare ces 47 minutes d'un raffinement formel de tous les instants, jamais flashy ou ostentatoire mais donnant l'impression que des gravures d'époque s'animent d'une vie qu'alimente un scénario classique mais intelligent. Chaque séquence succède à la précédente selon l'évidence d'un sérial bien huilé et les scènes d'action sont aussi sobres qu'efficaces (le pré-générique est une réussite). Visuellement, l'épisode affiche un bon goût jamais pris en défaut, nous caressant la vue de couleurs chaudes et pastelles comme celles du magasin de lingeries fines de Denver qui sert de couverture aux faux-monnayeurs et qui sera le décor d'une excellente scène avec Artemus Gordon.

8ème
La Nuit de Janus / The Night of the Janus (saison 4, 1968)
scénario : Leonard Katzman réalisation : Irving J. Moore
Bonne surprise que cette Nuit de Janus! Réalisé par LE pilier de toute la série, supplantant de son style discret mais reconnaissable des noms plus connus tels que Richard Donner, Paul Wendkos ou Jesse Hibbs, j'ai nommé Irving J. Moore, qui semble avoir une compréhension parfaitement organique de la ligne directrice de la série, cet épisode commence très bien, dès le début du pré-générique, avec cet échange cocasse entre Jim West et un croque-mort, qui n'est autre que l'inénarrable Vince Barnett, le secrétaire gaffeur de Paul Muni dans le Scarface de 1932. "Généralement quand j'arrive, ils n'ont plus grand chose à dire" se désole-t-il. Sinon, l'épisode est racé, félin, pastichant James Bond avec son académie d'agents secrets et son Q de service qui propose des gadgets (enfin, un gadget, y a pas trop de budget quand même). Des agents qui s'entrainent doivent se taper un parcours de combattant avec des balles à blanc, tout ça mais lorsque c'est Jim West qui doit se le farcir, les balles sont réelles , de même que les explosifs. La séquence est tout à fait réussie. Comme dans beaucoup d'épisodes de la saison 4, pas toujours pour le meilleur malheureusement, la musique de Richard Shores, avec ses tablas sous emprise, fait merveille. Jim West est ici secondé par Charles Aidman, qui remplace Ross Martin. Il ne démérite pas.

9ème
La Nuit de la Terreur cachée / The Night the Underground Terror (saison 3, 1967)
scénario :Max Hodge réalisation : James B. Clark
Vraiment brillant cet épisode! Il pourrait constituer une éclatante Nuit d'Or si le traditionnel bouclage des péripéties, forcément soldé par une bagarre de gosse presque toujours épatante (du moins dès les saisons en couleurs), n'était ici un tantinet foutage de gueule : Gordon faisant le cake déguisé en chercheur d'or anglais qui entraîne à sa suite, tel le Joueur de flûte de Hamelin, une tripotée de malfrats rendus fin cons (un peu trop) par la fièvre de l'or. Fin à la fois rigolote mais pauvre que ne méritait pas une assez belle première moitié beaucoup plus adulte dans sa portée divertissante.
Faisant contraster les fastes de Mardi-Gras à la Nouvelle Orléans (Fats Domino, ça suffit!) avec des égouts où rampent presque littéralement des éclopés de la Guerre de Sécession, emmenés par un halluciné Major Hazard, que joue Nehemiah Persoff avec inspiration, qui cherchent à se venger d'un tortionnaire en charge du camp où ils étaient prisonniers (Jeff Corey), l'épisode commençait dans les ors d'une allure graphique aussi pertinente que racée. D'autant que ce thème des camps de concentration de la guerre civile américaine (traités presqu'au même moment par Sergio Leone dans Le Bon, la Brute et le Truand) contribuait à insuffler à la série sa teneur caractéristique en toxicité souterraine. La bagarre finale est accompagnée d'un très bon thème de Richard Shores, peu usité dans la série, mais pourtant captivant (on l'entend aussi dans La Nuit de Montezuma).

10ème
La Nuit de l'Elixir de Diamant / The Night of the Burning Diamond (saison 1, 1966)
scénario : Ken Kolb réalisation : Irving J.Moore
Réalisé par le récurrent Irving J. Moore, nous avons droit ici à une jolie miniature télévisuelle. West et Gordon doivent confondre et déjouer un jeune savant -cambrioleur pas du tout gentleman qui vole des diamants pour en faire un élixir permettant l'invisibilité. Argument fantastique auquel le scénario de Ken Kolb confère une sorte de "crédibilité" explicative : la modification moléculaire et métabolique induite rend possible un déplacement hyperrapide dans l'espace qui empêche les ingurgiteurs d'être décelés, ces derniers ayant toute latitude pour commettre leur forfait dans un espace-temps arrêté (les gens tout autour sont figés). La façon qu'à l'épisode (et sa réalisation) de faire accepter ce délire au spectateur est aussi remarquable qu'amusante car aux précisions astucieuses ("il ne faut pas se déplacer trop vite sous peine de brûlures") sont adjointes les images correspondantes. On aura donc droit à une scène de braquage d'un musée avec dissipation des effets qui est une leçon de mise en scène toute simple, sans moyens terribles, tout à fait épatante.

LA NUIT DES REMERCIEMENTS
Image
Dernière modification par Alexandre Angel le 19 oct. 16, 10:11, modifié 1 fois.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Outerlimits
Assistant opérateur
Messages : 2907
Inscription : 26 avr. 08, 23:24

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Outerlimits »

Bonne sélection, excellentes critiques.

Moi mon top ce serait, à peu prés :
1 - La nuit de la revanche
2 - La nuit de l'élixir de diamant
3 - La nuit de la constitution
4 - La nuit des traquenards
5 - La nuit du loup
6 - La nuit du phare hurlant
7 - La nuit de la mort masquée
8 - La nuit du marionnettiste
9 - La nuit de l'attentat
10 - La nuit de Janus
11 - La nuit du kinétoscope
12 - La nuit orientale
13 - La nuit de la diva
14 - La nuit du musée maudit
15 - La nuit des barreaux de l'enfer
16 - La nuit des bandits
17 - La nuit du poison
18 - La nuit de la légion de la mort
19 - La nuit du pendu
20 - La nuit de la ville sans voix
Avatar de l’utilisateur
Alexandre Angel
Une couille cache l'autre
Messages : 14052
Inscription : 18 mars 14, 08:41

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Alexandre Angel »

Et merci, Outerlimits, de m'avoir ouvert l'esprit sur la première saison :wink:
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

m. Envoyé Spécial à Cannes pour l'Echo Républicain
Outerlimits
Assistant opérateur
Messages : 2907
Inscription : 26 avr. 08, 23:24

Re: Les Mystères de l'Ouest

Message par Outerlimits »

De rien Alexandre, tu les as tous vus ?
Répondre