Exclu DVDclassik : Entretiens avec Kevin Brownlow

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allen john
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Re: Exclu DVDclassik : Entretien avec Kevin Brownlow

Message par allen john »

Moi, parmi les nombreuses choses réjouissantes de ce commentaire enjoué et hors-écoles (Voire anti-sadoulien) sur notre cinéma Français muet, je retiens en particulier le bonheur d'avoir découvert, hors les sempiternels grands noms, des oeuvres comme le Jeanne d'Arc de Marco de Gastyne, ou le Strogoff de Tourjanski(Ou -Ky), ou plus généralement les Mosjoukine. Je me souviens d'une séance au Cinématographe de Nantes à voir Le Brasier ardent de Mosjoukine et Volkoff, restauré par la Cinémathèque Française, en particulier par Renée Lichtig. Ces films sont réjouissants parce qu'à la faois commerciaux et libres, totalement inventifs et beaux, au sens classique: beau à regarder, ciselés, avec une âme. Et puis ayant été bouleversé par Visages d'Enfants, qui est poir moi le plus beau film muet Français, je ne peux qu'adhérer. Donc...
.... ENCORE!!! Mais je me répète.

Sinon, commentaire (d'un cinéphile que je connais bien :mrgreen: :fiou: ) sur le film de Marco de Gastyne: il ya fort à faire sur ce film, puisqu'il n'y a qu'un seul commentaire sur l'Imdb... Il vaut mieux que ça. Ce n'est pas le chef d'oeuvre du siècle, mais bon... Laissons-lui une chance: il est meilleur que le DeMille. :lol:

http://www.imdb.com/title/tt0020165/usercomments
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Ann Harding
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Re: Exclu DVDclassik : Entretien avec Kevin Brownlow

Message par Ann Harding »

Je ne connais pas aussi bien qu'Allen John les goûts des critiques français en ce qui concerne le muet français, mais, je savais bien que les goûts de Brownlow étaient fort différents. :wink: Je suis tout à fait d'accord avec lui en ce qui concerne Mosjoukine qui est largement ignoré alors qu'il avait une présence à l'écran fantastique. Le film qui m'a le plus impressionné avec lui est Les Ombres Qui Passent (1924, A. Volkoff) où il joue sur tous les modes. Il est Keatonien au début en jeune ingénu fraîchement débarqué à Paris avec son costume trop étroit avant de devenir rebelle au joug de son père particulièrement abusif. Le film a été tourné en Angleterre, à Paris et en Corse et à chaque fois exploite au mieux les extérieurs. Un autre film fascinant de Mosjoukine: Feu Matthias Pascal (1924, M. L'Herbier), une adaptation de Pirandello remarquable avec en prime Pauline Carton et un tout jeune Michel Simon. :)
Le Miracle des Loups (1924, R. Bernard) mérite une visite pour la performance de Dullin en Louis XI, Vanni-Marcoux (un grand chanteur d'opéra) en Charles le Téméraire et pour l'attaque finale des remparts de Carcassone (en lieu de Beauvais). :)
Music Man
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Re: Exclu DVDclassik : Entretien avec Kevin Brownlow

Message par Music Man »

allen john a écrit :Moi, parmi les nombreuses choses réjouissantes de ce commentaire enjoué et hors-écoles (Voire anti-sadoulien) sur notre cinéma Français muet, je retiens le Jeanne d'Arc de Marco de Gastyne, ...
Cette oeuvre , diffusée en son temps surciné classik, m'a aussi fortement impressionné!
La semaine dernière en replongeant dans une revue positif de la fin des années 60, je suis tombé sur un très long article consacré à André Antoine, fondateur du fameux théâtre parisien, et réalisateur et producteur au début des années 20 (l'Arlésienne). mais en parcourant les lignes, on avait la facheuse impression d'une synthèse de critiques des journaux d'autrefois et que le journaliste n'avait vu qu'un ou deux films du cinéaste. Il est vrai qu'il est très difficile de parler de ce qu'on n'a pas vu, et ce n'est pas évident avec les films muets français!
Apparemment Brownlow distingue quelques perles par rapport à une production courante et commerciale qui semble dépourvue d'intérêt et réalisée avec des moyens trop précaires;
Certains réalisateurs de la période muette (Henri Diamant-Berger) ont poursuivi leur carrière bien après le parlant, et la médiocrité de certaines de leurs réalisations parlantes ne donne pas spécialement envie de se pencher sur leurs oeuvres passées...mais peut être est-ce une erreur. Car si l'on se fie aux films parlants de Tourjansky (la valse royale avec Marianne Koch, la belle hongroise) ou de Marco de Gastyne (qui a lancé Dalida dans le masque de Toutankamon), on ne distingue pas grand chose de terrible laissant deviner leurs qualités à l'époque muette. A ce propos, j'ai vu sur le topic petites annonces que quelqu'un cherchait la châtelaine du Liban de Gastyne :| (Est-ce vraiment trouvable?)
Il y aurait donc beaucoup de choses à faire et à découvrir sur le sujet. Peut être déjà en réunissant sur un topic spécifique les interventions des classikiens sur le muet français, et en y laissant quelques lignes après le visionnage à la cinémathèque ou au musée d'Orsay de quelque rareté.
et si on allait interroger Marie Glory, star des années 20, qui coule des jours paisibles dans le midi?
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le ballet mécanique de Fernand Léger
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Phnom&Penh
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Re: Exclu DVDclassik : Entretien avec Kevin Brownlow

Message par Phnom&Penh »

allen john a écrit :Sinon, commentaire (d'un cinéphile que je connais bien ) sur le film de Marco de Gastyne: il ya fort à faire sur ce film, puisqu'il n'y a qu'un seul commentaire sur l'Imdb... Il vaut mieux que ça. Ce n'est pas le chef d'oeuvre du siècle, mais bon... Laissons-lui une chance: il est meilleur que le DeMille.
Pour la petite histoire, une personne au moins, a souvent cité ce film. Il s’agit de Chris Marker qui découvrit le film enfant lors de sa sortie en salle. Il avait été absolument fasciné par un gros plan sur le visage de Simone Genevois.
Il en parle dans Sans Soleil (1982) : "C’est cette image qui apprit à un enfant de sept ans comment un visage emplissant l’écran était d’un coup la chose la plus précieuse au monde" en commentaire sur un visage de femme au Cap-Vert.
Je crois qu’il raconte aussi comment il s’était retrouvé à quelques sièges de Simone Genevois lors d’une rétrospective quelques dizaines d’années plus tard et n’avait pas voulu / osé lui dire que son visage avait été l’image la plus marquante de ses rêves d’enfants. Lors du tournage de la Merveilleuse vie de Jeanne d’Arc (que je n’ai jamais pu voir), Simone Genevois était âgée de seize ans seulement et elle a mis fin assez vite à sa carrière en 1936.

Merci beaucoup pour cette passionnante interview, Ann :)
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Ann Harding
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Re: Exclu DVDclassik : Entretien avec Kevin Brownlow

Message par Ann Harding »

Merci Music Man pour ta passionnante contribution! Effectivement, les films parlants de bons nombres de ces réalisateurs sont décevants. Tourjansky est un bon exemple: sa Volga en Flammes (1934) est une version insipide de la fille du capitaine de Pouchkine. Mais, ses muets sont infiniment supérieurs. J'ai vu Le Chant de l'Amour Triomphant qui m'a bq impressionnée. De même, Marcel L'Herbier qui ne retrouve pas la verve qu'il avait dans l'Argent ou Feu Matthias Pascal ou même Abel Gance dont Brownlow m'a avoué avoir détesté pratiquement tous les parlants... :mrgreen:

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Marie Glory a été interviewé par K. Brownlow pour son documentaire Cinéma Europe pour l'épisode sur le cinéma muet français. :wink: On peut la voir à env. 90 ans, en grande forme.

Je n'ai malheureusement pas vu le film de Marco de Gastyne qui semble de plus en plus alléchant au fir et à mesure des commentaires. :P

Je vous conseille de bien regarder le programme de la Cinémathèque durant les mois qui viennent car bon nombres de muets sont au programme, et souvent des films très rares. :wink:

:!: Si vous avez constaté des problèmes avec les extraits sonores sur la 2ème partie de l'interview (on entend les extraits de la partie 1), ils semblent affecter essentiellement les utilisateurs de Internet Explorer (comme moi!). Mais, ils fonctionnent avec Firefox. Le problème est en cours de résolution. :wink:
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Roy Neary
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Re: Exclu DVDclassik : Entretien avec Kevin Brownlow

Message par Roy Neary »

Ann Harding a écrit : :!: Si vous avez constaté des problèmes avec les extraits sonores sur la 2ème partie de l'interview (on entend les extraits de la partie 1), ils semblent affecter essentiellement les utilisateurs de Internet Explorer (comme moi!). Mais, ils fonctionnent avec Firefox. Le problème est en cours de résolution. :wink:
Le petit problème technique est réglé. Merci Ann. :wink:
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Major Dundee
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Re: Exclu DVDclassik : Entretien avec Kevin Brownlow

Message par Major Dundee »

Je viens seulement de découvrir ce passionnant entretien. Vivement la suite. 8)
Une grand bravo à Ann et surtout un grand MERCI :wink:
Charles Boyer (faisant la cour) à Michèle Morgan dans Maxime.

- Ah, si j'avais trente ans de moins !
- J'aurais cinq ans... Ce serait du joli !


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Ann Harding
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Re: Exclu DVDclassik : Entretien avec Kevin Brownlow

Message par Ann Harding »

La suite sera là lundi, Major Dundee! :wink:
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Roy Neary
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Re: Exclu DVDclassik : Entretien avec Kevin Brownlow

Message par Roy Neary »

Voici aujourd'hui la troisième partie de la série des cinq entretiens, celle-ci est consacrée au Napoléon d'Abel Gance. :D

:arrow: Interview de Kevin Brownlow - 3ème partie
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Message par Alphonse Tram »

Cet entretient sur Napoleon, qui mélange anecdoctes et techniques, est un enchantement :D
Merci !
Souhaits : Alphabétiques - Par éditeurs
- « Il y aura toujours de la souffrance humaine… mais pour moi, il est impossible de continuer avec cette richesse et cette pauvreté ». - Louis ‘Studs’ Terkel (1912-2008) -
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Re: Exclu DVDclassik : Entretiens avec Kevin Brownlow

Message par allen john »

Comme d'habitude, c'est passionnant. Kevin Brownlow ne perd semble-t-il jamais son enthousiasme, et on le sent bien: une restauration d'une oeuvre aussi monumentale ne peurt qu'être une histoire passionnante, masi elle l'est encore plus, parce que l'homme qui l'a menée à bien l'a commencée étant adolescent. Chaque découverte, chaque pièce du puzzle est pour lui l'occasion, presque, d'une joie enfantine. Ca fait chaud au coeur en ces temps cyniques, et de penser que ce soit pour du cinéma muet, en prime, c'est la fort jolie cerise sur un très chouette gateau! Merci pour le gateau, Ann! :wink:

Sinon, faut-il le lire entre les lignes, ou faut-il se contenter d'espérer un DVD? Un DVD de Napoléon, c'est le serpent de mer, mais il a raison: j'ai la version Studio Canal, c'est donc celle de Coppola, et le tryptique final est encodé n'importe comment. Il est évident qu'il faille le montrer en 16/9, mais comment le rattacher au reste du film? Rien de satisfaisant à attendre ici, mais qu'importe: on soit à Gance, et à Brownlow, et à toute l'équipe du film, de montrer le film tel qu'il a été restauré. Et en attendant, de lire et relire cette succulente interview.
Dernière modification par allen john le 8 déc. 08, 19:58, modifié 1 fois.
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Re: Exclu DVDclassik : Entretiens avec Kevin Brownlow

Message par Ann Harding »

La sortie de Napoléon en DVD va certainement prendre encore qq années. Mais, il semble que les choses sont en train de 'se débloquer' après des années d'impasse. La version 'dite Coppola' cumule les défauts: 24 im/sec (au lieu de 18 im/sec pour Brienne et 20 im/sec pour le reste) ainsi que les coupures. La musique de Coppola père n'est pas catastrophique, mais, elle est loin derrière celle de Carl Davis. :mrgreen: Espèrons que bientôt nous pourrons tous écouter et voir la version complète de ce Napoléon. :)

Je suis ravie de voir que l'enthousiasme de Brownlow passe à travers ma traduction. :wink:
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Re: Exclu DVDclassik : Entretiens avec Kevin Brownlow

Message par Music Man »

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Eh bien , la cinémathèque française en prend un sacré coup !
Henri Langlois et son équipe ne supportaient-ils tout simplement pas que des étrangers se mèlent de la restauration d'un chef d'oeuvre français? c'est tout de même extrêmement dommage. :?
Ce serait très interessant d'avoir le point de vue de personnes ayant travaillé à la cinémathèque.
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Phnom&Penh
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Re: Exclu DVDclassik : Entretiens avec Kevin Brownlow

Message par Phnom&Penh »

Toujours aussi passionnant! :)

Je suis en train de lire la réédition de Sur un art ignoré de Michel Mourlet, et il y a un passage intéressant sur le Napoléon (1927) d'Abel Gance. Mourlet raconte que Gance lui confia lors d'une rencontre en 1971, un texte inédit qu'il avait rédigé à l'adresse de ses collaborateurs avant le tournage:
  • "Le discours à ses collaborateurs, techniciens, décorateurs, interprètes, n'est pas sans évoquer les proclamations de Bonaparte à ses soldats. C'est un document si saisissant que je vais prendre la liberté de vous le lire in extenso:

    Lecture: "Il faut, entendez bien le sens profond que je mets dans ces mots, il faut que ce film nous permette d'entrer définitivement dans le temple des arts par la gigantesque porte de l'Histoire. Une angoisse indicible m'étreint à la pensée que ma volonté et le don de ma vie même ne sont rien si vous ne m'apportez pas tous un dévouement de toutes les secondes. Nous allons, grâce à vous, revivre la Révolution et l'Empire. La tâche est inouïe. Il faut retrouver en vous la flamme, la folie, la puissance des soldats de l'An II. L'initiative personnelle va compter. Je veux sentir en vous contemplant une houle de force qui puisse emporter toutes les digues du sens critique, de façon que je ne distingue plus de loin entre vos coeurs et vos bonnets rouges. Rapides, fous, tumultueux, gigantesques, gouailleurs, homériques avec des pauses, des points d'orgue qui rendent les silences plus redoutables: ainsi vous veut la Révolution, cette cavale emballée. Et puis un homme qui la regarde en face, qui la comprend, qui veut s'en servir pour le bien de la France et qui brusquement saute sur elle, la saisit par les rênes et peu à peu l'apaise pour en faire le plus miraculeux instrument de gloire. La Révolution et son rire d'agonie, l'Empire et ses ombres géantes, la Grande Armée et ses soleils, c'est à vous qu'il incombe d'en recréer les immortelles figures. Mes amis, tous les écrans de l'univers vous attendent. A tous, collaborateurs de tous ordres, premiers rôles, seconds plans, opérateurs, peintres, électriciens, machinistes, à tous, surtout à vous, humbles figurants qui allez avoir le lourd fardeau de retrouver l'esprit de vos aïeux et de donner par votre unité de coeur le redoutable visage de la France de 1792 à 1815, je demande, mieux, j'exige l'oubli total des mesquines considérations personnelles et un dévouement absolu. Ainsi seulement vous servirez pieusement la cause déjà illustre du plus bel art de l'avenir à travers la plus merveilleuse des leçons de l'Histoire!""
Abel Gance cité par Michel Mourlet (Sur un art ignoré, Ramsay Poche)
Music Man a écrit :Henri Langlois et son équipe ne supportaient-ils tout simplement pas que des étrangers se mèlent de la restauration d'un chef d'oeuvre français? c'est tout de même extrêmement dommage.
Dans le chapitre "Malraux face à Langlois: la guerre des mythes", page 349 de son livre La cinéphilie (Poche Hachette Littératures), Antoine de Baecque revient sur "L'Affaire Langlois". Tout en reconnaissant toutes les qualités d'Henri Langlois et en rappelant la valeur inestimable de son travail, il donne un avis asez pondéré sur cette affaire. Certains traits du caractère d'Henri Langlois peuvent expliquer ce qui est relaté dans l'interview.
Je citerai juste ce passage:
"Pour Langlois, la lutte vise d'abord à protéger son indépendance, à faire comme si les collections réunies étaient les siennes, la salle de la Cinémathèque sa propriété, et sa programmation le fruit d'un travail solitaire, tout en s'assurant de la reconduction des subventions publiques, sans lesquelles son association s'écroulerait. Pour le maître de Chaillot, mieux vaut ainsi laisser périr à petit feu les trésors les plus méconnus de ses collections, quitte à exploiter toujours les mêmes films, que de laisser l'Etat y mettre bon ordre, appliquer ses critères de conservation et s'en remettre à ses "techniciens-fonctionnaires"".
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Ann Harding
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Re: Exclu DVDclassik : Entretiens avec Kevin Brownlow

Message par Ann Harding »

Merci, Phnom&Penh, d'avoir mentionné ce texte de Gance qui montre tout à fait le bonhomme tel qu'il était! Quant à sa recréation de l'Histoire avec un grand H, il faut quand même signaler qu'il la modifie quelque peu. Lors de la séquence de la Marseillaise, on voit Rouget de Lisle rencontrer un petit caporal avec un bicorne appelé Bonaparte. :mrgreen: Bien sûr, Napoléon n'était pas là ce jour-là et quand on le fit remarquer à Gance, il répondit: "Il y est maintenant!" :uhuh:

Je crois que tu as mis le doigt sur le noeud du problème: Langlois était un collectionneur. Voici ce que Brownlow écrit sur Langlois en le comparant à Ernest Lindgren, le directeur du BFI de l'époque : (je traduis)
Langlois n'avait pas d'argent pour tirer des copies et il projetait ses copies originales. Il aurait été mis sur la liste des personnes à fusiller immédiatement par Ernest Lindgren. Lindgren pensait que les films doivent être préservés intacts pour la postérité. Le problème, c'est que la postérité était toujours 20 ans devant nous. Pour Langlois, la postérité était maintenant. Il pensait que les films devaient vivre et respirer librement ; ils ne devaient pas être entérrés dans des caves, mais projetés régulièrement.
C'était une attitude exaltante et Langlois faisait partie de mes héros jusqu'à ce que je réalise que ses grandes réussites en tant que collectionneur étaient contrebalancées par des déficiences saisissantes en tant qu'archiviste.
Langlois a perdu, par décomposition, des incendies et une négligence générale, un nombre terrifiant de films irremplaçables. Parmi eux, il y avait la seconde partie de The Wedding March d'Erich von Stroheim, The Honeymoon. D'un autre côté, Lindgren, un archiviste chevronné qui l'aurait préservé, n'aurait jamais pris l'initiative de rechercher un tel trésor. Langlois réussissait à fournir suffisamment de films de sa collection pour la programmation de deux salles de projection. Ses projections étaient spartiates à l'extrême. Les films muets étaient montré à 16 im/sec, qu'ils aient été tournés à cette vitesse ou non (avec le résultat que certains films duraient 1h de plus que leur durée originale). Il n'y avait aucun accompagnement musical. Et il n'y avait pas d'intertitres. "Un film muet doit raconter son histoire sans aucun mot" disait-il. Et, bien sûr, les conséquences étaient souvent terribles: des films déchirés, des bobines dans le désordre et des séquences entières qui se volatilisaient.
Mais, malgré les défauts de cet homme extraordinaire, il a réussi à éléver le niveau de culture cinématographique à Paris comme nulle part ailleurs dans le monde.
(Extrait de Napoleon - Abel Gance's Classic Film de KB)
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