Erich Von Stroheim (1885-1957)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Ann Harding
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Ann Harding »

Encore un autre documentaire de la série Cinéastes de Notre Temps. Décidément, la télé de l'époque produisait de bien beaux documentaires. 8)

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Erich Von Stroheim (1965, Robert Valey)

Lorsqu'il meurt en 1957, la vérité sur les origines de Stroheim est toujours inconnue. L'édition 1957 du Who's Who en fait toujours le fils d'un colonel de dragons et d'une dame d'honneur de l'Impératrice Elizabeth. Denis Marion commence alors à faire des recherches. Les états civils à Vienne, à la fin du XIXè siècle, sont séparés selon que l'on est catholique ou de confession israélite. Il retrouve donc l'état civil de Stroheim dans le registre du rabbin. Il est le fils de Benno Stroheim et de Johanna Bondy. On indique même le nom du circonciseur: Elias Weiss. Il est aussi mentionné qu'il a quitté la communauté en 1908. Il part effectivement pour les USA en 1909. Ses origines, selon Marion, expliquent cette relation de phobie et d'attirance pour cette société austro-hongroise dont il était exclu.
Le portrait est constitué d'interviews de personnes qui l'ont connu ou qui ont travaillé avec lui. Gloria Swanson revient sur le tournage agité de Queen Kelly. Elle trouvait que Stroheim dirigeait les acteurs comme le faisait DeMille, c-a-d en leur laissant toute liberté (contrairement aux acteurs chez Griffith qui le singent dit-elle). Elle a été effrayée en voyant qu'un tiers seulement du scénario avait été tourné et qu'ils avaient déjà 200 000 pieds (6100 m) de pellicule impressionnée au coût faramineux de 600 000 dollars. Elle appelle les banquiers de New York qui arrivent en un rien de temps et stoppent le tournage. Elle ne reverra Erich que lors du tournage de Sunset Boulevard.
Parmi les témoignages les plus intéressants, il y a celui de Edmond T. Gréville qui a dirigé Stroheim dans trois films. Il mentionne une anecdote qui en dit long. Lors du tournage de Under Secret Orders (1937), Stroheim tourne une scène où il sort d'un immeuble de 5 étages par la porte. Il demande ensuite à Gréville quand ils vont tourner la scène où il entre dans l'immeuble et une autre où il monte les 5 étages. Gréville lui dit que c'est inutile. On l'a vu tout en haut de l'immeuble et sortir, ça suffit. Stroheim proteste que tout l'intérêt humain du film sera absent. Conclusion de Gréville: il était incapable de penser un tournage en fonction du montage et de faire des raccourcis.
Erich von Stroheim croyait tellement au mythe qu'il s'était créé qu'il montrait souvent des photos en disant: "Ici, c'est moi serrant la main de l'empereur." Il s'agissait en fait de photos de plateaux de ses propres films... :lol: Il aurait apparemment envoyé une lettre à Daladier en 1939 pour demander un régiment et une nomination en tant que colonel ! :mrgreen:
Au-delà de cela, on le décrit généralement comme généreux, dépensant sans compter pour organiser des dîners fastueux pour 500 personnes avec langouste et champagne coulant à flots. Sa vie réelle était donc assez proche de son attitude en tant que metteur en scène. Comme le dit Swanson, il n'utilisait que le meilleur caviar possible pour Queen Kelly (une dépense inconsidérée selon elle pour une scène qui finirait probablement sur le sol de la salle de montage).
René Clair et Jean Renoir disent tous deux leur admiration pour le grand metteur en scène. Renoir parle d'un homme finalement assez naïf par certains côtés, qui avait conservé une certaine innocence. Clair et Gréville se souviennent d'une dernière visite dans sa maison de Maurepas peu de temps avant sa mort. Il avait organisé une sorte de répétition de ses funérailles avec un grand catafalque rouge au milieu de son salon, sans oublier le champagne qui coulait à flots. Une vraie scène tirée d'un de ses films! :mrgreen:
Le documentaire était ponctué par de larges extraits de Greed, Blind Husbands, Merry Widow, Foolish Wives & Queen Kelly. Seul manquait The Wedding March qui apparemment était bloqué par quelqu'un qui en avait refusé l'accès.
C'est vraiment rageant de penser qu'un tel documentaire restera invisible....
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Tommy Udo
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Tommy Udo »

Voilà, enfin visionné QUEEN KELLY qui trônait sur mes étagères depuis plusieurs mois.
J'ai trouvé la première partie un peu longue, mais c'est juste pour pinailler car elle est émaillée de moments tout-à-fait surprenants, incroyables.
La seconde partie (le bordel africain) est, elle, tout simplement extraordinaire. Pas une seconde de répit... Mais malheureusement, elle est incomplète, Von Stroheim n'ayant pu la terminer.
Au final, un énorme sentiment de frustration ! On imagine le chef-d'oeuvre que cela aurait pu être... :(
Bref, en l'état, quand même une très belle découverte^^

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Cathy
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Cathy »

Je te rejoins entièrement. Par contre je n'ai pas trouvé la première partie longuette, j'ai trouvé par contre que Gloria Swanson faisait trop âgée pour jouer la petite oie blanche, pas si blanche que cela, mais elle me semble bien plus à l'aise dans la scène du bordel africain qui est effectivement extraordinaire. En plus, alors que je ne suis pas spécialement cliente des films muets, j'ai trouvé l'accompagnement musical superbe, avec des envolées romantiques bienvenues. J'ai d'ailleurs fait de ce Queen Kelly mon film du mois d'octobre ! On se demande quel aurait été le film complet, vu que la première partie style conte de fées n'était qu'un prologue ! Bref une découverte magistrale en ce qui me concerne, même si effectivement on reste sur sa faim !
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Tommy Udo
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Tommy Udo »

Cathy a écrit :On se demande quel aurait été le film complet, vu que la première partie style conte de fées n'était qu'un prologue ! Bref une découverte magistrale en ce qui me concerne, même si effectivement on reste sur sa faim !
C'est incroyable car, en effet, en l'état c'est déjà superbe, mais on ressent vraiment, comme tu le dis, un manque à la fin du film. Une grande envie de crier à l'injustice quand on imagine ce que Stroheim aurait pu nous offrir s'il n'avait pas été écarté du tournage.
La mutilation des RAPACES laisse déjà un goût amer, mais là je trouve que c'est encore pire, encore plus flagrant :?
Mais bon, pouvait-il en être réellement autrement, alors que le parlant venait de faire son apparition ?
Cathy a écrit :J'ai d'ailleurs fait de ce Queen Kelly mon film du mois d'octobre !
C'est d'ailleurs ton avis dans le topic des films du mois, repris et commenté par feb (et Jeremy) dans le topic "commentaires", qui m'a poussé à le visionner :wink:
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par feb »

Tu me fais plaisir Tommy. Tu devrais jeter un oeil à Sunrise si tu ne le connais c'est aussi un petit bijou :fiou: :mrgreen:
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Tommy Udo
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Tommy Udo »

feb a écrit :Tu me fais plaisir Tommy. Tu devrais jeter un oeil à Sunrise si tu ne le connais c'est aussi un petit bijou :fiou: :mrgreen:
:lol:
:idea: Mais en voilà une bonne idée :mrgreen:
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Jeremy Fox
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Jeremy Fox »

feb a écrit :Tu me fais plaisir Tommy. Tu devrais jeter un oeil à Sunrise si tu ne le connais c'est aussi un petit bijou :fiou: :mrgreen:
Et tu as intérêt à aimer également :twisted: :mrgreen:
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Tommy Udo
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Tommy Udo »

Jeremy Fox a écrit :
feb a écrit :Tu me fais plaisir Tommy. Tu devrais jeter un oeil à Sunrise si tu ne le connais c'est aussi un petit bijou :fiou: :mrgreen:
Et tu as intérêt à aimer également :twisted: :mrgreen:
Je cède face à la pression classikienne :mrgreen:
Un nouveau visionnage est donc programmé ^^
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Cathy
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Cathy »

Je n'avais même pas vu que Jeremy et Feb avaient donné un avis sur mon choix :fiou: ! Je me demande si je ne vais pas aussi aller lorgner du côté de l'Aurore !
feb
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par feb »

Tommy Udo a écrit :Je cède face à la pression classikienne :mrgreen:
Un nouveau visionnage est donc programmé ^^
Et après tu passes à Der Blaue Engel pour faire plaisir à Jeremy Fox :mrgreen:
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Tommy Udo
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Tommy Udo »

feb a écrit :
Tommy Udo a écrit :Je cède face à la pression classikienne :mrgreen:
Un nouveau visionnage est donc programmé ^^
Et après tu passes à Der Blaue Engel pour faire plaisir à Jeremy Fox :mrgreen:
Il se murmure que ce sera son premier blu-ray... :mrgreen:
Il échangerait tous les Minnelli pour ce seul film :mrgreen:
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Music Man »

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MANDRAGORE, LA FILLE SANS AME (Alraune) de Arthur Maria RABENALT – ALLEMAGNE-1952
Avec Hildegard KNEF, Erich VON STROHEIM et Karlheinz BOEHM

Un antipathique vieillard pratique des expériences étranges dans les caves de son manoir. Son neveu tombe amoureux de sa fille Mandragore avant d’apprendre l'horrible vérité : Mandragore est en fait le fruit d'une insémination artificielle ayant été effectuée sur une prostituée avec la semence d'un criminel condamné à la pendaison ! Maléfique, elle est vouée à conduire les hommes à leur malheur...

La Mandragore est d’abord un roman de Hanns Heinz Ewers paru en 1911 (L’auteur s’est basé sur une vieille légende qui prétend que la semence des pendus pouvait féconder le sol, et que de celui-ci naissait alors une étrange racine, la mandragore, utilisée dans de nombreux rites magiques). Un romancier dont les récits souvent macabres et érotiques lui ont conféré une réputation d'écrivain scandaleux…mais inspiré beaucoup les cinéastes. Ainsi sa Mandragore fut maintes fois portée à l’écran, surtout à l’époque muette.
Cette version de 1952 est vraiment réussie. Non seulement cet étrange récit incroyablement futuriste (on y évoque les manipulations génétiques et fécondations artificielles !) étonne mais surtout une palpable atmosphère gothique vient nimber le film d’un fascinant voile d’épouvante.
Lentement mais sûrement, le film distille son parfum de mystère et de magie tout comme le personnage de la mandragore fascine, séduit et détruit ceux qui l’entourent (elle pousse une amie au suicide, va provoquer la mort de 3 prétendants, etc…). Arthur Maria Rabenalt dont le talent de cinéaste ne m’a jamais ébloui (il est notamment l’auteur d’un Tsarévitch bien moche avec Luis Mariano), révèle ici des capacités insoupçonnées avec un sens de l’image d’une grande élégance (je pense à un gros plan d’Hildegard Knef, dans un hamac, filmée par en dessous, où elle regarde à travers les mailles du filet, comme une araignée), une belle utilisation de la profondeur de champ des salles du château. Mais l’unité et toute la magie du film proviennent de la présence charismatique d’Erich Von Stroheim, en Svengali dominateur (dans Comme tu me veux, il tenait un rôle similaire , manipulant une Garbo amnésique ; ici, il ne veut pas que la créature qu’il a fabriqué lui échappe et n’hésitera pas à la tuer) et surtout d’une merveilleuse Hildegard Knef, d’abord froide et détachée puis gagnée par l’amour, et terriblement émouvante dans les superbes derniers moments du film (la dernière minute et le gros plan final de la star touchent au sublime : un très beau moment de cinéma fantastique). A voir.
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par B. »

Music Man a écrit : MANDRAGORE, LA FILLE SANS AME (Alraune) de Arthur Maria RABENALT – ALLEMAGNE-1952
Avec Hildegard KNEF, Erich VON STROHEIM et Karlheinz BOEHM
Ca m'a l'air vraiment très bien ça... Tu l'as vu où ? J'ai pas l'impression qu'il existe une édition dvd (ou alors j'ai mal cherché)...
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Tommy Udo
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Tommy Udo »

Je ne sais pas si c'est encore le cas (car je ne suis plus abonné), mais il y a quelques mois, ce film était diffusé quasiment en boucle sur ciné FX ou ciné polar^^
Music Man
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Re: Erich Von Stroheim (1885-1957)

Message par Music Man »

Tout à fait, et il avait été diffusé autrefois sur ciné cinéfil.
Le DVD est disponible en Allemagne (Alraune)en VO sans sous-titres et aux USA (sous le titre Unnatural) doublé en anglais.
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