Raymond Bernard (1891-1977)
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Raymond Bernard (1891-1977)
Un beau coffret vient de sortir chez Gaumont ; voici les chroniques des films
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Même si je ne les ai pas encore lues dans leur entièreté (ce sera fait ce soir^^), d'ores et déjà un grand merci à Ann et à Classik pour ces chroniques
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Dès qu'on évoque Raymond Bernard, je pense tout de suite à ces deux merveilleux films que sont 'Les Croix de bois et Les Misérables"
la baisse substantielle de ce coffret va me permettre de découvrir sa période muette.
Merci à Amazon, Classik et Ann.
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- Tommy Udo
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Deux très beaux films, en effetbogart a écrit :Dès qu'on évoque Raymond Bernard, je pense tout de suite à ces deux merveilleux films que sont 'Les Croix de bois et Les Misérables"
J'espère vraiment que Pathé ne tardera pas trop à nous les sortir^^
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Après la restauration sensationnelle que Pathé vient de faire sur Les Misérables, il y a fort à parier que le film soit édité prochainement.
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Donc acte.daniel gregg a écrit :Après la restauration sensationnelle que Pathé vient de faire sur Les Misérables, il y a fort à parier que le film soit édité prochainement.
On attend également la version de Le Chanois au bon format.
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Ca y est, j'ai dévoré tous les contenus du coffret Raymond Bernard. Plutôt satisfaisant techniquement, sans plus, c'est un ravissement dans la mesure ou il nous donne à voir tout le travail de sept années d'un metteur en scène important du muet, que ce metteur en scène, comme on s'en doutait à la vision du Joueur d'Echecs passé il y a quelques années sur Arte, avait résolu comme d'autres trop rares (Gance, Clair, Fescourt, Feyder et la bande de l'Albatros) de rivaliuser sérieusement avec le meilleur du cinéma Américain, et y parvenait parfois. Le joueur d'echecs reste mon favori, riche en frisson cinématographique pur; après, le parfois pesant mais souvent enthousiasmant Miracle des loups qui semble ouvrir une porte dans le cinéma Français commercial de l'époque; enfin, l'inégal mais ambitieux Tarakanova est une halte bienvenue. Et quant aux détails, les chroniques de DVDclassik signées de l'inévitable et inestimable spécialiste maison me semblent d'une justesse à toute épreuve.
http://allenjohn.over-blog.com/
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Cette adaptation du roman de Hugo est pour moi le chef-d'oeuvre de Raymond Bernard, cinéaste encore trop méconnu aujourd'hui, je trouve.daniel gregg a écrit :Après la restauration sensationnelle que Pathé vient de faire sur Les Misérables, il y a fort à parier que le film soit édité prochainement.
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Les Misérables de Raymond Bernard sont effectivement formidables. Mais, il faudrait quand même que Pathé permette aussi au plus grand nombre de découvrir Les Misérables (1925) d'Henri Fescourt, qui a produit une version en 4 parties (8h!) qui n'a rien à envier à Bernard du point de vue visuel et dramatique.
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Je rapatrie ces critiques éparses sur le topic dédié au metteur en scène.
Triplepatte (1922, Raymond Bernard) avec Henri Debain, Edith Jehanne et Pierre Palau
Robert de Houdan (H. Debain) -surnommé Triplepatte- a été promis en mariage, avant sa naissance, à la famille de Crèvecoeur. Sa promise n'est qu'une gamine ; mais, il doit toucher une forte somme d'argent le jour de ses noces. Il est poursuivi par son usurier, M. Boucherot (P. Palau) à qui il doit beaucoup d'argent...
Avec cette comédie très enlevée, Raymond Bernard est un précurseur des comédies de René Clair telles que Un Chapeau de Paille d'Italie (1927) et Les Deux Timides (1928). Son héros, Robert de Houdan est un aristocrate molasson et attachant qui fuit le mariage. Cette cérémonie, si importante pour les grands bourgeois et les aristocrates, est au centre de l'intrigue. En adaptant, la pièce de son père Tristan Bernard, le réalisateur réussit un coup de maître. Dans le rôle principal, Henri Debain est parfait. Il est l'incarnation de ce Triplepatte, ainsi nommé car comme son cheval de course du même nom, il hésite toujours à franchir les obstacles. Bien qu'il soit constamment harcelé par Mme de Crèvecoeur et son infernale gamine et par la non moins envahissante Baronne Pépin, Robert de Houdan ne rêve que de liberté. Malheureusement son porte-feuille est vide. Il doit donc convoler en justes noces rapidement pour le remplir. On lui trouve une charmante fiancée, Yvonne Herbelier (interprétée par la très jolie Edith Jehanne). Mais, néanmoins, les chaînes conjugales lui font peur et on doit le traîner à la mairie en pyjama ! Le jeu de l'acteur principal, Henri Debain, n'a rien à envier aux meilleurs acteurs comiques. Indolent, l'air légèrement ahuri ou franchement hilare, il donne à son personnage tout le relief voulu. Face à lui, on reconnaît le formidable Pierre Palau. Cet acteur chauve, qui fit le bonheur des cinéphiles comme dans La Main du Diable (1942, M. Tourneur), est ici déjà le superbe comédien qu'on connaît en usurier prêt à tout pour recouvrer sa créance. Quant à Edith Jehanne, cette charmante actrice, qui fut une étoile filante dans le cinéma muet français, fait ici ses débuts à l'écran. Elle apparaitra encore dans deux autres films de Bernard, Le Joueur d'Echecs (1927) et Tarakanova (1930) et un de Pabst, Die Liebe der Jeanne Ney (1927). Son joli visage mutin offre une image parfaite de la jeune fille face à sa mère envahissante et vulgaire, attifée de plumes qui la font ressembler à une autruche. Le film montre aussi un Raymond Bernard qui expérimente avec la caméra lors d'un cauchemar de Triplepatte qui se voit au ralenti poursuivi par un couple équipé d'un filet à papillon. Les décors splendides sont signés Robert Mallet-Stevens. Voilà un film de Raymond Bernard qui mériterait une sortie en DVD!
(Henri Debain)
Le Costaud des Epinettes (1922, Raymond Bernard) avec Henri Debain, Pierre Vermoyal et Germaine Fontanes
Claude Brévin (H. Debain), un ancien joueur démuni, fréquente un bal musette de Montmartre où on le surnomme le 'costaud des Epinettes'. Il est embauché par le maître-chanteur Doizau (P. Vermoyal) pour récupérer des lettres compromettantes chez une théâtreuse Irma Lurette (G. Fontanes)...
Raymond Bernard adapte de nouveau une pièce de son père, Tristan Bernard pour cette comédie. Il avait auparavant déjà réalisé Le Petit Café (1919) et Triplepatte (1922) qui était également des adaptations de Tristan Bernard. Dans le rôle principal, on reconnait Henri Debain qui fût également Triplepatte. Cet acteur longiligne, légèrement lymphatique rappelle le jeune Alec Guinness avec son visage allongé et son air ahuri. Il a cette même innocence qui lui attire les ennuis dans le bal musette un peu louche où il dîne. Mais, le frêle jeune homme se révèle adepte des arts martiaux qui lui permettent de terrasser ses adversaires. Ses ennuis ne font que commencer lorsqu'il doit éliminer une femme et récupérer un paquet de lettres. Evidemment, il tombe amoureux de la belle Irma Lurette et ne réussit pas à la tuer. Ce charmant film de Raymond Bernard m'a semblé moins réussi que Triplepatte à cause d'une narration manquant de ressort qui avance à coup de carton d'intertitres. Néanmoins, il contient quelques très bonnes scènes comme lorsque Henri Debain explique à son logeur comment il s'est fait renvoyé de tous ses boulots par son inaptitude. Nous découvrons alors ses maladresses visuellement: il oublie les enfants qu'il doit accompagner plongé dans un livre ou il asperge le visage d'un client dans un établissement de bain. D'autres séquences comme celles où il doit assassiner Irma Lurette offre un très bel éclairage en clair-obscur suggérant la tension qui l'anime. Mais, le film reste assez prévisible. Il faut aussi remarquer les très beaux décors signés Robert Mallet-Stevens. Il est fort dommage que le film soit incomplet : les scènes finales ont disparues. Mais, on peut deviner aisément que Claude Brévin va rester avec Irma Lurette. La copie de la Cinémathèque était extrêmement belle: une copie teintée splendidement contrastée et d'une grande finesse de grain.
Faubourg Montmartre (1931) de Raymond Bernard avec Gaby Morlay, Charles Vanel et Line Noro
Ginette (G. Morlay) et sa soeur Céline (L. Noro) vivent au Faubourg Montmartre, un quartier populaire. Alors que Ginette travaille dans un atelier de couture, Céline a de mauvaises fréquentations et se drogue...
Le Paris populaire des années 30 avec ses malfrats, ses petites femmes de mauvaise vie et ses beuglants ! Tout cela est formidablement bien capté par Raymond Bernard pour son 1er film parlant. Gaby Morlay vit avec sa soeur droguée à la cocaïne et celle-ci qui voudrait bien qu'elle vende ses charmes pour arrondir leurs fins de mois. Charles Vanel joue son rôle habituel de voyou avec délectation. Il y a vraiment une atmosphère délétère dans ce film, particulièrement les scènes où Line Noro complètement shootée à la cocaïne commence à perdre la raison et à mettre le feu au mobilier. Morlay est fraîche et charmante comme dans Les Nouveaux Messieurs de Feyder. En contrepoint, nous avons Pierre Bertin, jeune provincial juste arrivé à Paris, qui lui aussi succombe aux charmes de Florelle, la cousine volage et égoïste des deux soeurs. Il faut aussi mentionner Pauline Carton, toujours aussi amusante en parente revèche. Il faut la voir vendre des boîtes de chocolats décorées avec des chats!!! Un très bon film du début du parlant.
Cavalcade d'Amour (1939) de Raymond Bernard avec Michel Simon, Claude Dauphin, Simone Simon et Corinne Luchaire.
Dans le vieux château de Maupré, à plusieurs siècles de distance, nous découvrons trois histoires d'amour contrariées par le destin: au 17ème siècle, Julie de Maupré (Janine Darcey) essaye, en vain, d'échapper à un mariage arrangé par son père. Au XIXème siècle, Hubert (C. Dauphin) tombe amoureux d'une petite couturière (S. Simon) qui est venue coudre la robe sa future épouse. Et enfin, au XXème siècle, le riche M. Lacouret (M. Simon) voudrait marier sa fille (C. Luchaire) avec un fils de famille aristocratique...
Ce très joli film de Raymond Bernard offre à Michel Simon et à Claude Dauphin trois rôles différents sur trois époques différentes. Simon s'en donne à coeur joie dans la première partie en directeur de troupe ambulante, cabot en diable. Cela est suivi par un prélat très onctueux et pour finir un papa gateau avec sa fille Corinne Luchaire. C'est amusant de voir que la même année Luchaire et Simon étaient mari et femme dans Le Dernier Tournant! Claude Dauphin est d'abord un acteur assez imbu de sa personne, puis un amoureux contrarié et enfin, un jeune homme sans le sou que son père (Saturnin Fabre) harcèle pour de l'argent. Les dialogues de Jean Anouilh sont poétiques et la musique est signée par Darius Milhaud et Arthur Honegger! Un très joli film plein de charme.
Adieu Chérie (1946, Raymond Bernard) avec Danielle Darrieux, Louis Salou, Gabrielle Dorziat, Pierre Larquey et Jacques Berthier
Elizabeth Delors, dite Chérie (D. Darrieux) est entraîneuse dans les boîtes de nuit parisienne où elle traîne régulièrement des étrangers fortunés contre pourcentage. Un soir, elle est emmenée au commissariat suite à une rafle dans un tripot clandestin. Elle rencontre Bruno Brétillac (J. Berthier), un fils de grands bourgeois que sa famille veut marier à tout prix à une riche héritière...
Ce film de Raymond Bernard marque le retour à l'écran de Danielle Darrieux après la guerre. Elle n'a en effet plus rien tourné depuis La fausse maîtresse (1942, A. Cayatte) produit par la Continentale. Raymond Bernard avait lui aussi disparu des écrans durant la seconde guerre mondiale, mais pour des raisons différentes. Le fils de Tristan Bernard est juif, et il vit caché dans le sud de la France, puis dans le maquis du Vercors durant toute l'occupation. Il ne reviendra au cinéma qu'en 1945. Adieu Chérie semble vouloir retrouver le style des comédies d'avant-guerre de Darrieux avec un scénario de Marc-Gilbert Sauvajon et Jacques Companeez. Mais, la légèreté des années 30 a bel et bien disparue, même si Danielle chante toujours de manière ravissante deux chansons dans le film. Et puis, Sauvajon est capable du meilleur comme du pire tel Au petit bonheur (1946, M. L'Herbier) qui est un épouvantable ratage de Darrieux tourné juste après Adieu Chérie. Ici, le scénario n'est pas impeccable. Mais, grace à ses interprètes de second plan en particulier, le film conserve un certain charme. Louis Salou joue un viel aristo désargenté qui trouve des clients à Chérie. Gabrielle Dorziat est elle une matriarche toute puissante sur sa famille qu'elle manie d'une main de fer. Quant à Pierre Larquey, il est le père de Bruno, bien dépassé par les événements. Dans le personnage central de Chérie, Darrieux a un rôle aux facettes multiples qui lui va comme un gant. Elle est d'abord une entraîneuse cynique qui négocie férocement son pourcentage. Puis, déguisée en jeune fille innocente, elle réussit à séduire la famille Brétillac en un tournemain. Même la grande Dorziat succombe à son charme. Il y a un jeu constant entre réalité et simulation qui devient si complexe que l'on se sait bientôt plus si elle simule son amour pour le fils de famille ou si elle est sincère. Elle-même, à vrai dire ne le sait plus. Mais, la fin du film nous fait redescendre sur terre. Chérie avoue son passé d'entraîneuse et doit quitter Bruno qu'elle vient tout juste d'épouser. Dans les années 30, le film aurait eu une fin heureuse. Mais, là, elle doit se plier aux conventions et repartir le coeur brisé. Sur le papier, le scénario est vraiment intéressant. Il est bien dommage que le film de Bernard ne soit totalement réussi à cause d'un rythme relaché et à quelques scènes inutiles. J'ai été néanmoins ravie d'avoir pu voir ce film rare de Raymond Bernard à la Cinémathèque.
Triplepatte (1922, Raymond Bernard) avec Henri Debain, Edith Jehanne et Pierre Palau
Robert de Houdan (H. Debain) -surnommé Triplepatte- a été promis en mariage, avant sa naissance, à la famille de Crèvecoeur. Sa promise n'est qu'une gamine ; mais, il doit toucher une forte somme d'argent le jour de ses noces. Il est poursuivi par son usurier, M. Boucherot (P. Palau) à qui il doit beaucoup d'argent...
Avec cette comédie très enlevée, Raymond Bernard est un précurseur des comédies de René Clair telles que Un Chapeau de Paille d'Italie (1927) et Les Deux Timides (1928). Son héros, Robert de Houdan est un aristocrate molasson et attachant qui fuit le mariage. Cette cérémonie, si importante pour les grands bourgeois et les aristocrates, est au centre de l'intrigue. En adaptant, la pièce de son père Tristan Bernard, le réalisateur réussit un coup de maître. Dans le rôle principal, Henri Debain est parfait. Il est l'incarnation de ce Triplepatte, ainsi nommé car comme son cheval de course du même nom, il hésite toujours à franchir les obstacles. Bien qu'il soit constamment harcelé par Mme de Crèvecoeur et son infernale gamine et par la non moins envahissante Baronne Pépin, Robert de Houdan ne rêve que de liberté. Malheureusement son porte-feuille est vide. Il doit donc convoler en justes noces rapidement pour le remplir. On lui trouve une charmante fiancée, Yvonne Herbelier (interprétée par la très jolie Edith Jehanne). Mais, néanmoins, les chaînes conjugales lui font peur et on doit le traîner à la mairie en pyjama ! Le jeu de l'acteur principal, Henri Debain, n'a rien à envier aux meilleurs acteurs comiques. Indolent, l'air légèrement ahuri ou franchement hilare, il donne à son personnage tout le relief voulu. Face à lui, on reconnaît le formidable Pierre Palau. Cet acteur chauve, qui fit le bonheur des cinéphiles comme dans La Main du Diable (1942, M. Tourneur), est ici déjà le superbe comédien qu'on connaît en usurier prêt à tout pour recouvrer sa créance. Quant à Edith Jehanne, cette charmante actrice, qui fut une étoile filante dans le cinéma muet français, fait ici ses débuts à l'écran. Elle apparaitra encore dans deux autres films de Bernard, Le Joueur d'Echecs (1927) et Tarakanova (1930) et un de Pabst, Die Liebe der Jeanne Ney (1927). Son joli visage mutin offre une image parfaite de la jeune fille face à sa mère envahissante et vulgaire, attifée de plumes qui la font ressembler à une autruche. Le film montre aussi un Raymond Bernard qui expérimente avec la caméra lors d'un cauchemar de Triplepatte qui se voit au ralenti poursuivi par un couple équipé d'un filet à papillon. Les décors splendides sont signés Robert Mallet-Stevens. Voilà un film de Raymond Bernard qui mériterait une sortie en DVD!
(Henri Debain)
Le Costaud des Epinettes (1922, Raymond Bernard) avec Henri Debain, Pierre Vermoyal et Germaine Fontanes
Claude Brévin (H. Debain), un ancien joueur démuni, fréquente un bal musette de Montmartre où on le surnomme le 'costaud des Epinettes'. Il est embauché par le maître-chanteur Doizau (P. Vermoyal) pour récupérer des lettres compromettantes chez une théâtreuse Irma Lurette (G. Fontanes)...
Raymond Bernard adapte de nouveau une pièce de son père, Tristan Bernard pour cette comédie. Il avait auparavant déjà réalisé Le Petit Café (1919) et Triplepatte (1922) qui était également des adaptations de Tristan Bernard. Dans le rôle principal, on reconnait Henri Debain qui fût également Triplepatte. Cet acteur longiligne, légèrement lymphatique rappelle le jeune Alec Guinness avec son visage allongé et son air ahuri. Il a cette même innocence qui lui attire les ennuis dans le bal musette un peu louche où il dîne. Mais, le frêle jeune homme se révèle adepte des arts martiaux qui lui permettent de terrasser ses adversaires. Ses ennuis ne font que commencer lorsqu'il doit éliminer une femme et récupérer un paquet de lettres. Evidemment, il tombe amoureux de la belle Irma Lurette et ne réussit pas à la tuer. Ce charmant film de Raymond Bernard m'a semblé moins réussi que Triplepatte à cause d'une narration manquant de ressort qui avance à coup de carton d'intertitres. Néanmoins, il contient quelques très bonnes scènes comme lorsque Henri Debain explique à son logeur comment il s'est fait renvoyé de tous ses boulots par son inaptitude. Nous découvrons alors ses maladresses visuellement: il oublie les enfants qu'il doit accompagner plongé dans un livre ou il asperge le visage d'un client dans un établissement de bain. D'autres séquences comme celles où il doit assassiner Irma Lurette offre un très bel éclairage en clair-obscur suggérant la tension qui l'anime. Mais, le film reste assez prévisible. Il faut aussi remarquer les très beaux décors signés Robert Mallet-Stevens. Il est fort dommage que le film soit incomplet : les scènes finales ont disparues. Mais, on peut deviner aisément que Claude Brévin va rester avec Irma Lurette. La copie de la Cinémathèque était extrêmement belle: une copie teintée splendidement contrastée et d'une grande finesse de grain.
Faubourg Montmartre (1931) de Raymond Bernard avec Gaby Morlay, Charles Vanel et Line Noro
Ginette (G. Morlay) et sa soeur Céline (L. Noro) vivent au Faubourg Montmartre, un quartier populaire. Alors que Ginette travaille dans un atelier de couture, Céline a de mauvaises fréquentations et se drogue...
Le Paris populaire des années 30 avec ses malfrats, ses petites femmes de mauvaise vie et ses beuglants ! Tout cela est formidablement bien capté par Raymond Bernard pour son 1er film parlant. Gaby Morlay vit avec sa soeur droguée à la cocaïne et celle-ci qui voudrait bien qu'elle vende ses charmes pour arrondir leurs fins de mois. Charles Vanel joue son rôle habituel de voyou avec délectation. Il y a vraiment une atmosphère délétère dans ce film, particulièrement les scènes où Line Noro complètement shootée à la cocaïne commence à perdre la raison et à mettre le feu au mobilier. Morlay est fraîche et charmante comme dans Les Nouveaux Messieurs de Feyder. En contrepoint, nous avons Pierre Bertin, jeune provincial juste arrivé à Paris, qui lui aussi succombe aux charmes de Florelle, la cousine volage et égoïste des deux soeurs. Il faut aussi mentionner Pauline Carton, toujours aussi amusante en parente revèche. Il faut la voir vendre des boîtes de chocolats décorées avec des chats!!! Un très bon film du début du parlant.
Cavalcade d'Amour (1939) de Raymond Bernard avec Michel Simon, Claude Dauphin, Simone Simon et Corinne Luchaire.
Dans le vieux château de Maupré, à plusieurs siècles de distance, nous découvrons trois histoires d'amour contrariées par le destin: au 17ème siècle, Julie de Maupré (Janine Darcey) essaye, en vain, d'échapper à un mariage arrangé par son père. Au XIXème siècle, Hubert (C. Dauphin) tombe amoureux d'une petite couturière (S. Simon) qui est venue coudre la robe sa future épouse. Et enfin, au XXème siècle, le riche M. Lacouret (M. Simon) voudrait marier sa fille (C. Luchaire) avec un fils de famille aristocratique...
Ce très joli film de Raymond Bernard offre à Michel Simon et à Claude Dauphin trois rôles différents sur trois époques différentes. Simon s'en donne à coeur joie dans la première partie en directeur de troupe ambulante, cabot en diable. Cela est suivi par un prélat très onctueux et pour finir un papa gateau avec sa fille Corinne Luchaire. C'est amusant de voir que la même année Luchaire et Simon étaient mari et femme dans Le Dernier Tournant! Claude Dauphin est d'abord un acteur assez imbu de sa personne, puis un amoureux contrarié et enfin, un jeune homme sans le sou que son père (Saturnin Fabre) harcèle pour de l'argent. Les dialogues de Jean Anouilh sont poétiques et la musique est signée par Darius Milhaud et Arthur Honegger! Un très joli film plein de charme.
Adieu Chérie (1946, Raymond Bernard) avec Danielle Darrieux, Louis Salou, Gabrielle Dorziat, Pierre Larquey et Jacques Berthier
Elizabeth Delors, dite Chérie (D. Darrieux) est entraîneuse dans les boîtes de nuit parisienne où elle traîne régulièrement des étrangers fortunés contre pourcentage. Un soir, elle est emmenée au commissariat suite à une rafle dans un tripot clandestin. Elle rencontre Bruno Brétillac (J. Berthier), un fils de grands bourgeois que sa famille veut marier à tout prix à une riche héritière...
Ce film de Raymond Bernard marque le retour à l'écran de Danielle Darrieux après la guerre. Elle n'a en effet plus rien tourné depuis La fausse maîtresse (1942, A. Cayatte) produit par la Continentale. Raymond Bernard avait lui aussi disparu des écrans durant la seconde guerre mondiale, mais pour des raisons différentes. Le fils de Tristan Bernard est juif, et il vit caché dans le sud de la France, puis dans le maquis du Vercors durant toute l'occupation. Il ne reviendra au cinéma qu'en 1945. Adieu Chérie semble vouloir retrouver le style des comédies d'avant-guerre de Darrieux avec un scénario de Marc-Gilbert Sauvajon et Jacques Companeez. Mais, la légèreté des années 30 a bel et bien disparue, même si Danielle chante toujours de manière ravissante deux chansons dans le film. Et puis, Sauvajon est capable du meilleur comme du pire tel Au petit bonheur (1946, M. L'Herbier) qui est un épouvantable ratage de Darrieux tourné juste après Adieu Chérie. Ici, le scénario n'est pas impeccable. Mais, grace à ses interprètes de second plan en particulier, le film conserve un certain charme. Louis Salou joue un viel aristo désargenté qui trouve des clients à Chérie. Gabrielle Dorziat est elle une matriarche toute puissante sur sa famille qu'elle manie d'une main de fer. Quant à Pierre Larquey, il est le père de Bruno, bien dépassé par les événements. Dans le personnage central de Chérie, Darrieux a un rôle aux facettes multiples qui lui va comme un gant. Elle est d'abord une entraîneuse cynique qui négocie férocement son pourcentage. Puis, déguisée en jeune fille innocente, elle réussit à séduire la famille Brétillac en un tournemain. Même la grande Dorziat succombe à son charme. Il y a un jeu constant entre réalité et simulation qui devient si complexe que l'on se sait bientôt plus si elle simule son amour pour le fils de famille ou si elle est sincère. Elle-même, à vrai dire ne le sait plus. Mais, la fin du film nous fait redescendre sur terre. Chérie avoue son passé d'entraîneuse et doit quitter Bruno qu'elle vient tout juste d'épouser. Dans les années 30, le film aurait eu une fin heureuse. Mais, là, elle doit se plier aux conventions et repartir le coeur brisé. Sur le papier, le scénario est vraiment intéressant. Il est bien dommage que le film de Bernard ne soit totalement réussi à cause d'un rythme relaché et à quelques scènes inutiles. J'ai été néanmoins ravie d'avoir pu voir ce film rare de Raymond Bernard à la Cinémathèque.
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Oui, effectivement, je n'ai jamais vu le film de 1925 et j'en suis curieux.Ann Harding a écrit :Les Misérables de Raymond Bernard sont effectivement formidables. Mais, il faudrait quand même que Pathé permette aussi au plus grand nombre de découvrir Les Misérables (1925) d'Henri Fescourt, qui a produit une version en 4 parties (8h!) qui n'a rien à envier à Bernard du point de vue visuel et dramatique.
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Déjà, la version de 1933, apparemment superbement restaurée, a du mal a être éditée en BR (mais sortira t'elle un jour ?). De même pour celle de Jean-Paul Le Chanois (qui sort aux USA).Ann Harding a écrit :Les Misérables de Raymond Bernard sont effectivement formidables. Mais, il faudrait quand même que Pathé permette aussi au plus grand nombre de découvrir Les Misérables (1925) d'Henri Fescourt, qui a produit une version en 4 parties (8h!) qui n'a rien à envier à Bernard du point de vue visuel et dramatique.
Alors, pour celle de Fescourt, je ne me fais (malheureusement) aucune illusion
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Le film de Fescourt est en cours de restauration au CNC. Il pourra peut-être un jour être édité en DVD...qui sait?
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Bah... Les (certains ?, tous ?) films de la société ALBATROS ont également été restaurés, il me semble ? Et on ne voit rien venir. Flicker Alley devait en sortir, mais là aussi, plus rien depuis plus d'un an...Ann Harding a écrit :Le film de Fescourt est en cours de restauration au CNC. Il pourra peut-être un jour être édité en DVD...qui sait?
Donc, je n'y croit pas trop
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Re: Raymond Bernard (1891-1977)
Je te comprends, depuis que j'attends le Wedding March promis par Criterion... mais d'une part, Flicker alley prend certes son temps, mais ils font les choses et les font bien: Gance, Chaplin, Méliès, Fairbanks, Vidor, Murnau, Lewis Milestone peuvent en témoigner à leur catalogue. D'autre part, la page de Flicker Alley sur un fameux réseau social a récemment posté une affiche de 'The late Mathias Pascal' (sic), présenté comme une sortie à venir... Donc...Tommy Udo a écrit :Bah... Les (certains ?, tous ?) films de la société ALBATROS ont également été restaurés, il me semble ? Et on ne voit rien venir. Flicker Alley devait en sortir, mais là aussi, plus rien depuis plus d'un an...Ann Harding a écrit :Le film de Fescourt est en cours de restauration au CNC. Il pourra peut-être un jour être édité en DVD...qui sait?
Donc, je n'y croit pas trop