La franchouillardise en question

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Supfiction
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Re: La franchouillardise en question

Message par Supfiction »

Yaplusdsaumon a écrit : 4 sept. 20, 22:55 Et surtout rien de franchouillard ici
Désolé de remettre une pièce mais que veux tu dire exactement ?
C’est quoi la différence entre mauvaise comédie française et franchouillardise ?
Yaplusdsaumon a écrit : 4 sept. 20, 22:55
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Corps z'a corps, André Halimi, 1988.

L'histoire d'un rédacteur en chef d'un journal style Figaro économie qui se retrouve muté à la tête d'un gentil petit canard érotique ; c'est alors qu'il décide de larguer sa vie de bon père de famille...
Un chouette petit film plutôt bien mis en scène, mais oui mais oui ! La seule fiction, semble-t-il, réalisée par André Halimi, et c'est réussi sur pas mal de points : la caméra est sûre et l'ensemble se suit avec plaisir. Et surtout rien de franchouillard ici, ni de trace de navet ; en revanche, quelques ratés qui pèsent lourd sur la note finale : cela manque à la fois de chaleur et de mordant. On s'attarde sur le personnage central un peu à la façon de Flaubert, sans chercher à n'en faire plus qu'un médiocre - ce qui, venant de l'acteur principal constitue un certain gâchis, tout au moins une erreur de casting : en Italie, Alberto Sordi aurait interprété ce rôle en dormant, tandis que Philippe Khorsand, qui n'est jamais meilleur que dans le trait de méchanceté doucereuse, semble trouver insistante cette caméra qui le suit sans cesse, même s'il se démène comme un beau diable.
De fait, on attend tout du long quelque chose d'un peu cinématographique mais qui est constamment repoussé, jusqu'à une fin bâclée. La satire semble taper un coup sur les bourgeois coincés, un autre coup sur les hypocrites de l'amour libre, mais sans jamais oser tirer un réel parti des situations, ni jouer avec son spectateur comme en serait capable un Patrick Schulmann. On dirait un scénario écrit par un Wolinski en petite forme, et mis en scène par un réalisateur intelligent, mais encore timoré.
J’aimerai bien le voir tiens. J’adore le décalage entre la vulgarité du visuel et le nom de Stephane Audran en haut de l’affiche.

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Re: La franchouillardise en question

Message par Telmo »

Stéphane Audran c'est aussi les Prédateurs de la Nuit et Ma femme s'appelle Maurice (mais pas seulement bien sûr).

Sinon Nanarland parle de comédie pouet-pouet pour la comédie nanarde à la française :
Curés en goguette, bidasses en folie, pétomanes sans frontières... les nanars à base de comique lourdingue n'incitent franchement pas à la morosité... juste à la consternation ! Nourrissant des générations entières d'animateurs de mariages, de piliers de bars et de blagueurs de fin de banquet, ce genre est (cocorico !) le domaine de prédilection de notre belle France !
https://www.nanarland.com/categorie-24- ... pouet.html
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Jean-Pierre Festina
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Re: La franchouillardise en question

Message par Jean-Pierre Festina »

Supfiction a écrit : 5 sept. 20, 18:39
Yaplusdsaumon a écrit : 4 sept. 20, 22:55 Et surtout rien de franchouillard ici
Désolé de remettre une pièce mais que veux tu dire exactement ?
C’est quoi la différence entre mauvaise comédie française et franchouillardise ?
Je n'ai évoqué qu'un aspect du problème, cette espèce de réflexe conditionné qui consiste à trouver mauvais n'importe quel film comique français sans prétention au nom de ratages nombreux, notoires et affligeants ; un tri est nécessaire et c'est l'objet principal de ce topic que de rétablir quelques réputations.

Pour la définition des films "franchouillards", cinéphage analyse à peu près ainsi les choses : ce sont des comédies d'où le réalisateur paraît assez absent pour permettre aux comédiens de cabotiner comme ils le veulent, jusqu'au quasi-flagrant délit d'improvisation ; or il arrive que cette complaisance boulevardière dans la course à l'effet comique laisse voir les gros traits d'une idéologie d'un moment ou d'un milieu. Notre modérateur conclut par l'expression assez heureuse de "jachère", puisque cette tendance exclut presque naturellement toute construction et toute écriture.

Quant à l'idéologie incriminée en question, eh bien Commissaire Juve a fait le tour de la question ; Jean-Claude Michéa parle lui aussi de "mépris de classe" dans cette manière de se moquer des habitudes du français dit "moyen" ; ceci posé, il faut bien reconnaître que les Philippe Clair de tout poil ne sont pas tout blancs dans l'affaire, et que suivre les errances de Francis Blanche dans La Grande Java met à rude épreuve le spectateur dit "millenial". A vrai dire j'ai moi-même déclaré forfait à plusieurs reprises.

Un flou subsiste puisque l'on ne voit pas bien si c'est le fond idéologique ou la complaisance dans la manière qui est visé ; en revanche, ce que le terme établit sans détour c'est que l'épaisseur dans le rire serait une singularité bien française. On a là une totale aberration pour deux raisons : d'une, nous sommes le pays de Molière, et ensuite il suffit de voir un film avec Alvaro Vitali dans les années 70 pour comprendre que la France n'a pas le monopole de la vulgarité.
Comme le dit Telmo juste au-dessus, parler de comédie pouet-pouet est plus juste.
Dernière modification par Jean-Pierre Festina le 6 sept. 20, 20:42, modifié 2 fois.
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Re: La franchouillardise en question

Message par Supfiction »

Yaplusdsaumon a écrit : 6 sept. 20, 17:39 l'épaisseur dans le rire est une singularité bien française. On a là une totale aberration pour deux raisons : d'une, nous sommes le pays de Molière

et de Rabelais.

En outre, Molière c’est aussi les fourberies de Scapin.

or il arrive que cette complaisance boulevardière dans la course à l'effet comique laisse voir les gros traits d'une idéologie d'un moment ou d'un milieu
Je ne suis pas sûr de comprendre.
Dernière modification par Supfiction le 6 sept. 20, 18:27, modifié 1 fois.
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Jean-Pierre Festina
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Re: La franchouillardise en question

Message par Jean-Pierre Festina »

Supfiction a écrit : 6 sept. 20, 18:20
Yaplusdsaumon a écrit : 6 sept. 20, 17:39 l'épaisseur dans le rire est une singularité bien française. On a là une totale aberration pour deux raisons : d'une, nous sommes le pays de Molière
et de Rabelais.

En outre, Molière c’est aussi les fourberies de Scapin.
J'ai dit Molière, parce qu'avant lui, on dirait qu'un même ressort unit le rire d'une comédie d'Aristophane et celui d'une farce moyenâgeuse : si par hasard le traducteur parvient à sauver les meubles sur deux ou trois pages, la suite c'est toujours du tord-boyaux. A partir de Molière, tout change, et les films des Inconnus montrent que nous rions encore des mêmes choses qu'un spectateur du XVIIe.
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Jean-Pierre Festina
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Re: La franchouillardise en question

Message par Jean-Pierre Festina »

Supfiction a écrit : 6 sept. 20, 18:20
or il arrive que cette complaisance boulevardière dans la course à l'effet comique laisse voir les gros traits d'une idéologie d'un moment ou d'un milieu
Je ne suis pas sûr de comprendre.
Mais si t'as compris :mrgreen:
L'idéologie d'un milieu, c'est quand Karl Zero et Olivier Lejeune (ou encore Wolinski et Lauzier) pratiquent exactement le même humour avec la même subtilité mais à l'adresse de deux publics différents. Il existe sans doute une tendance à absoudre le plus progressiste autodéclaré des deux si c'est cela que tu veux me faire dire,
Spoiler (cliquez pour afficher)
je te connais, petite salope !
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Re: La franchouillardise en question

Message par Joshua Baskin »

Yaplusdsaumon a écrit : 4 sept. 20, 22:55
kiemavel a écrit : 4 sept. 20, 21:49
Je prescris un bon nanar avec Paul Préboist et après une bonne tranche de gross rikolad, tu verras que cette violence que je sens en toi ce soir s'estompera
Rappelle-moi un jour d'aller faire l'intéressant sur le topic des "films noirs à petit budget", on verra la tête que tu feras.

Et puis tiens, comme j'ai une patate d'acier ce soir, voici de quoi faire avancer le schmilblick !

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Corps z'a corps, André Halimi, 1988.

L'histoire d'un rédacteur en chef d'un journal style Figaro économie qui se retrouve muté à la tête d'un gentil petit canard érotique ; c'est alors qu'il décide de larguer sa vie de bon père de famille...
Un chouette petit film plutôt bien mis en scène, mais oui mais oui ! La seule fiction, semble-t-il, réalisée par André Halimi, et c'est réussi sur pas mal de points : la caméra est sûre et l'ensemble se suit avec plaisir. Et surtout rien de franchouillard ici, ni de trace de navet ; en revanche, quelques ratés qui pèsent lourd sur la note finale : cela manque à la fois de chaleur et de mordant. On s'attarde sur le personnage central un peu à la façon de Flaubert, sans chercher à n'en faire plus qu'un médiocre - ce qui, venant de l'acteur principal constitue un certain gâchis, tout au moins une erreur de casting : en Italie, Alberto Sordi aurait interprété ce rôle en dormant, tandis que Philippe Khorsand, qui n'est jamais meilleur que dans le trait de méchanceté doucereuse, semble trouver insistante cette caméra qui le suit sans cesse, même s'il se démène comme un beau diable.
De fait, on attend tout du long quelque chose d'un peu cinématographique mais qui est constamment repoussé, jusqu'à une fin bâclée. La satire semble taper un coup sur les bourgeois coincés, un autre coup sur les hypocrites de l'amour libre, mais sans jamais oser tirer un réel parti des situations, ni jouer avec son spectateur comme en serait capable un Patrick Schulmann. On dirait un scénario écrit par un Wolinski en petite forme, et mis en scène par un réalisateur intelligent, mais encore timoré.
Incroyable, je l'ai vu samedi soir également ! (Merci Movie store Rambuteau).
Je suis globalement assez d'accord avec toi. L'affiche pourrait faire croire à un navet mais le film se suit avec un réel plaisir.
Alors certes, Philippe Khorsand n'est pas Sordi mais je l'ai trouvé particulièrement bon dans ce rôle de bourgeois qui s'encanaille.

À noter que André Halimi est le créateur du festival de Deauville.
À noter bis une musique de Vladimir Cosma pas désagréable mais qui recycle sans vergogne le rap des sous doués en version instrumentale et le thème du père Noël est une ordure doté d'un soupçon de nous irons tous au paradis.
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Re: La franchouillardise en question

Message par Jean-Pierre Festina »

Joshua Baskin a écrit : 7 sept. 20, 19:25 Incroyable, je l'ai vu samedi soir également ! (Merci Movie store Rambuteau).
Je suis globalement assez d'accord avec toi. L'affiche pourrait faire croire à un navet mais le film se suit avec un réel plaisir.
Alors certes, Philippe Khorsand n'est pas Sordi mais je l'ai trouvé particulièrement bon dans ce rôle de bourgeois qui s'encanaille.
Sordi le débonnaire triste était sans doute plus endurant pour ce type de rôle, alors que je trouve Khorsand (dont je suis fan !) trop nerveux et vif, peut-être qu'il lui aurait fallu un personnage un peu plus écrit.

À noter bis une musique de Vladimir Cosma pas désagréable mais qui recycle sans vergogne le rap des sous doués en version instrumentale et le thème du père Noël est une ordure doté d'un soupçon de nous irons tous au paradis.
Mais oui c'est ça ! Et le début au sifflement c'est un petit bout de "Salut l'artiste", qui ne colle pas si mal d'ailleurs... Mais c'est vrai que ça fait un peu crapuleux de nous fourguer des vieux airs en loucedé comme ça, on dirait vraiment un cheveu dans une soupe.

(Et petit détail d'importance aussi : pour qui aime les femmes avec des bas noirs, ce film est un must, on en voit à la moitié des plans !)
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Re: La franchouillardise en question

Message par Joshua Baskin »

Yaplusdsaumon a écrit :
Mais oui c'est ça ! Et le début au sifflement c'est un petit bout de "Salut l'artiste", qui ne colle pas si mal d'ailleurs... Mais c'est vrai que ça fait un peu crapuleux de nous fourguer des vieux airs en loucedé comme ça, on dirait vraiment un cheveu dans une soupe.
Il est coutumier du fait.
Dans un Mocky fin de vie avec le fils de Coluche il reprend tel quel le thème de la moutarde me monte au nez ad nauseam.
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Re: La franchouillardise en question

Message par Jean-Pierre Festina »

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Debout les crabes, la mer monte ! Jacques Grand-Jouan, 1983

Un film à l'image de son titre : argotique et phraseur. Ce petit polar pour rire vise une sorte de virulence à la Audiard, mais au carré : préciosité à gogo des répliques, personnages aussi gouailleurs que plats comme des limandes (et qui claquent comme des mouches), univers de julots et de michetonneuses, situations à la limite de l'absurde, etc. Du comique français néo-rétro et "destroy", c'était un genre dans les années 80 (Sac de noeuds, les frères pétard), et aussi dans les années 90 (les démons de Jesus) mais qui réussissait mieux chez Metal Hurlant ; ici, le charme retombe vite et le film avance mollement malgré, ou plutôt à cause d'une avalanche de répliques sentencieuses. En résumé : franchouillard, non ; navet, pas totalement : c'est soigné et même excessivement littéraire... C'est aussi, et surtout, terriblement désuet.
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Re: La franchouillardise en question

Message par Major Tom »

Yaplusdsaumon a écrit : 30 août 20, 13:09 Pour l'anecdote, j'ai titré ainsi le sujet après avoir cherché des avis sur le film Les héros n'ont pas froid aux oreilles (par pure curiosité, je le connais par coeur et le tiens pour un chef-d'oeuvre)
Je l'aime beaucoup aussi et je viens de m'apercevoir, par le plus grand des hasards (en cherchant le nom du compositeur sur Imdb) en regardant dans les détails techniques, que la banque du film est au croisement de l'avenue Bosquet et de la rue du Champ de Mars, c'est un Crédit Agricole... et c'est ma banque. :o
J'y vais régulièrement (forcément) mais je ne l'avais pas reconnue, ça a évidemment changé depuis...

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Dans la scène avec Lanvin, on peut voir la pharmacie Bosquet et le bistrot Le Bosquet derrière lui, qui sont toujours là. :)

Voilà, c'était sans intérêt mais...
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Re: La franchouillardise en question

Message par manuderouen »

Personnellement, j’aime beaucoup ce film découvert en 1995 et la localisation des lieux de tournage que vous indiquez m’intéresse ! 😉
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Re: La franchouillardise en question

Message par Jean-Pierre Festina »

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Un homme à ma taille, Annette Carducci, 1983.
un spectateur sur Allociné a écrit :Les nostalgiques des 80's fans du splendid et autres,ne vous fiez pas à ce nanar,plus daubesque tu meurs.Jamais un film aussi débile n'ait été vu,où tous les clichés passent l'un après l'autre pour au final servir à quedalle si ce n'est que nous enerver.En plus de ca,le film ne cesse de rabacher la méme chose sur une soi disant phobie des allemands qui méme le plus resistant n'y croiraient méme pas.Au début on adhére pas du tout et à la fin,le scénariste a remarquer qu'il faisait du n'importe quoi.Du coup,on se retrouve avec une comédie romantique bidon sur le théme "ah c'est nul les garcons" encore plus cul cul qu'une bridget Jones.Méme Thierry Lhermitte n'a aucun mérite tellement son role est pourri,pourquoi l'avoir accepté??
RRRrrrrah les copains, regardez-moi cette affiche et cet avis d'Allociné comme ça fait envie ! La voilà bien, la France moisie dont parlait Sollers, je vais m'y vautrer comme un gros porc !

Eh bien, toujours pas. En voici quelques raisons.
Ce film a été tourné par une réalisatrice d'origine allemande, Annette Carducci comme son nom ne le dit pas tout-à-fait, et l'histoire est celle d'une jeune (et grande) Allemande née au lendemain de la guerre et qui a émigré en France, ce qui n'est pas toujours chose facile dans le cas présent ; à la recherche du grand amour, elle ne tombe que sur des hommes lâches, veules ou égoïstes, mais qui ont au moins le mérite de parfaire sa culture française et d'augmenter son vocabulaire, dans le domaine des jurons en particulier...
Proche dans son sujet de La fiancée qui venait du froid de Charles Némès, sorti la même année, ou de Nadja à Paris d'Eric Rohmer, l'histoire du film s'étale sur quelques années et tourne essentiellement autour du personnage de la jolie Allemande interprétée par Liselotte Christian, actrice rarissime et pourtant très talentueuse (sauf dans certaines gestuelles à vocation comique où son embarras est visible).
Parfaitement réalisé, mis en scène sans faiblesse d'aucune sorte et scénarisé avec un sens de la dédramatisation des événements et une connaissance ingénue de soi-même que je qualifierais de "féminins" (avant que vous ne me rappeliez à l'ordre avec raison), "Un homme à ma taille" commence comme une sorte de conte très intellectuel avant de bifurquer vers la chronique délicate et humoristique, ce qui en fait tout son prix et aussi sa limite : il est un écueil courant de la chronique, et en particulier dans le cas d'une première oeuvre, que de se laisser aller à une légère surabondance de choses vues et de petits détails qui semblent tirés de la vie de l'auteur. Ici, cela charme le spectateur d'autant que certaines scènes sont très drôles, comme par exemple les séquences où la jeune fille fraîchement mariée fait son apprentissage de la cuisine, ce qui est un sujet en soi, surtout dans le cas d'une étrangère qui découvre la cuisine française et ses thuriféraires.

Lorsque l'on veut en savoir davantage sur sa réalisatrice et que l'on n'apprend quasiment rien à son sujet (l'existence d'un seul autre film tourné presque vingt ans plus tard), on se dit avec mauvaise foi qu'il manquait sans doute une solide vision de metteur en scène chevronné qui aurait donné une vigueur supplémentaire à ces esquisses. Mais ces choses-là se travaillent, et l'on ne peut finalement s'empêcher de regretter que la réalisatrice en question n'ait pas persévéré dans cette voie car son film est, en l'état, très bon, et extrêmement prometteur.

Vu en DVD de chez LCJ acheté au MovieStore de Rambuteau (edit : coucou Joshua Baskin !)
Dernière modification par Jean-Pierre Festina le 23 oct. 20, 11:30, modifié 2 fois.
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Re: La franchouillardise en question

Message par odelay »

Jean-Pierre Festina a écrit : 15 sept. 20, 21:09 Image

Debout les crabes, la mer monte ! Jacques Grand-Jouan, 1983

Un film à l'image de son titre : argotique et phraseur. Ce petit polar pour rire vise une sorte de virulence à la Audiard, mais au carré : préciosité à gogo des répliques, personnages aussi gouailleurs que plats comme des limandes (et qui claquent comme des mouches), univers de julots et de michetonneuses, situations à la limite de l'absurde, etc. Du comique français néo-rétro et "destroy", c'était un genre dans les années 80 (Sac de noeuds, les frères pétard), et aussi dans les années 90 (les démons de Jesus) mais qui réussissait mieux chez Metal Hurlant ; ici, le charme retombe vite et le film avance mollement malgré, ou plutôt à cause d'une avalanche de répliques sentencieuses. En résumé : franchouillard, non ; navet, pas totalement : c'est soigné et même excessivement littéraire... C'est aussi, et surtout, terriblement désuet.

A noter que l'histoire à la base est de Bertrand Blier.
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Re: La franchouillardise en question

Message par Jean-Pierre Festina »

Oui, il y a des petits bouts de Blier dans le personnage joué par Virginie Thévenet qui accepte candidement les maîtresses de son mari... Mais comme c'est du mauvais Blier, on comprend qu'il en ait fait cadeau à un autre.
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