Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Flol
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Message par Flol »

C'est surtout que Rosebud symbolise l'enfance de Kane, et l'innocence qu'il a perdu ensuite. Et qu'il regrette à la fin de sa vie...
Citizen Kane est finalement l'histoire d'un homme qui s'est perdu.
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Watkinssien
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Message par Watkinssien »

Ratatouille a écrit :C'est surtout que Rosebud symbolise l'enfance de Kane, et l'innocence qu'il a perdu ensuite. Et qu'il regrette à la fin de sa vie...
Citizen Kane est finalement l'histoire d'un homme qui s'est perdu.
Oui l'énigme de Rosebud n'est pas compliquée, elle est complexe mais pas objectivement introuvable !
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Jipi
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Citizen Kane (Orson Welles)

Message par Jipi »

Charles Foster Kane s’éteint en solitaire dans un Xanadu Gothique surdimensionné bâti à l’image d’un Kublaï Khan décentralisé dans le nouveau monde.

L’énigme Rosebud est en marche agrémentée d’une nécrologie faisant de ce magnat de la presse un détenteur de la totalité des combinaisons universelles de son temps. Fasciste, Démocrate, Communiste, Belliciste, Sympathisant nazi, volage, Philanthrope. Quantités d’opinions n’ayant qu’une seule image Charles Foster Kane clone de William Randoph Hearst le célèbre industriel multimillionnaire.

Différents flashbacks nous montrent que l’homme à aussi de l’esprit. « Je ne vous fait pas de promesses, car je n’ai pas le temps de les tenir » ou bien encore « A quoi aimeriez vous ressembler ? A tout ce que vous détestez ».

Le retrait brutal d’un cocon familial opère un branchement conditionnant une entame de vie nostalgique vengeresse d’ébats stoppés soudainement. La maison sous la neige ainsi que la luge d’un adolescent sont cruellement abandonnées en cours d’usages. Ce traumatisme d’adolescent élabore la construction d’un personnage déterminé, complexe rupté trop tôt d’un parcours séquentiel menant tranquillement par des jeux d’enfant de l’adolescence vers le monde des adultes.

La démesure engendrée effrite peu à peu un homme ambitieux écrasé par son propre gigantisme, la voix ne porte plus, il faut presque hurler dans des pièces gigantesques pour se faire entendre, Kane ne maîtrise plus son espace. Tout est haut de plafond, infini en profondeur. Pris de folie il saccage soudainement en fin de vie le contenu d’une pièce représentant symboliquement tout ce qui a été matériellement conçus depuis son déracinement d’enfance pour ne sauvegarder que ce dôme sous la neige porteur de son dernier mot.

Charles Foster Kane bâtit son empire sur un éclectisme psychologique faisant de lui un caméléon articulé par toutes les procédures politiques en vigueur. Récupérable au moins par un des composants de ses multiples facettes son parcours de départ élaboré de force fait de ce déraciné un goûteur universel anéanti par ses propres concepts.

« Citizen Kane » considéré comme le meilleur film de tous les temps est une rivière de diamants innovatrices pour son époque. L’œuvre croule sous la charge. L’aspect terrifiant de Xanadu, les hauteurs alpestres des pièces, les profondeurs de champs, les miroirs, les raies de lumières dans la pénombre, etc... tout est neuf ce qui fait de Citizen Kane (1941) un œuvre plus référencée sur ses conceptions nouvelles que sur son traitement nécessitant une attention particulière. L'oeuvre est plus téchnique qu'émotionnelle.
Goran
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Re: Citizen Kane (Orson Welles, 1941)

Message par Goran »

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Sybille
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Sybille »

J'ai enfin découvert le mythique Citizen Kane qui était dans ma liste de "films à voir" depuis plusieurs années (je n'étais pas pressée cependant, je savais que son tour finirait par venir...)

Le film a toute mon admiration pour sa maestria formelle (évidemment), pour l'interprétation puissante (même si assez retenue au fond) de Welles acteur, pour une poignée de scènes qui parviennent à conjuguer la beauté de l'image et la valeur de l'émotion - cette dernière malaisée, ambigüe, mais que j'ai bel et bien ressentie : dans certains passages avec Susan Alexander, lorsqu'elle et Kane se retrouvent seuls à Xanadu et qu'elle compose inlassablement ses puzzles, l'immensité de cette pièce, l'obscurité, le feu, j'y trouve quelque chose de fascinant, qui me reste assez impalpable, mais dont le ressenti n'en est pas moins vif.

Grâce à la profondeur de champ, il y a ainsi un autre passage qui m'a interpellée. Lorsque le personnage de Joseph Cotten s'avance pour retrouver Kane assis devant sa machine à écrire, alors occupé à terminer la critique assassine sur la prestation de chanteuse de son épouse. On aperçoit au fond, rapetissé, devenu une simple ombre, le personnage de l'autre journaliste. Rien de plus qu'un détail, anodin en apparence (d'où sa valeur), celui de constater qu'un tiers assiste à la confrontation des deux "amis". Cela apporte immédiatement à la scène un intérêt à ce qui serait autrement un duel certes significatif, important pour l'histoire racontée, mais malgré tout assez banal. J'aime cette position, cette présence du témoin, même et surtout lorsque maintenu au loin.

Cependant, le film n'a pas non plus toutes mes faveurs, loin de là. Ce que je n'apprécie pas, et qui signe définitivement (du moins jusqu'à un éventuel prochain visionnage), mon inappréciation du film, c'est prosaïquement que cette histoire d'ascension me fatigue. Je n'admire pas le personnage de Charles Foster Kane, cette univers d'ambition et de surpuissance, avec ses hauts et ses bas, m'apparaît simplement "bête". Même en y incluant les critiques du système, l'ironie qui en découle, les déchirures internes du personnage principal, l'enfance arrachée clé possible des comportements futurs, je n'adhère pas vraiment à la trame de départ.
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Watkinssien
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Watkinssien »

Ah la question de ressenti ou d'adhésion est une vraie étape pour apprécier pleinement Citizen Kane.

Evidemment l'ascension que tu évoques ne va pas sans déchéance, tous deux évoquées génialement par le langage cinématographique.

Charles Foster Kane est loin d'être un personnage aimable. Mais il devient touchant pour ce que le spectateur sait de lui et que la thématique de l'enfance perdue est une des plus déchirantes qui soient.
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Supfiction
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Supfiction »

Je viens de voir ce téléfilm de 1999 très plaisant. Une façon agréable d'en apprendre un peu sur la construction du film et surtout sur la guerre que mena Hearst pour faire détruire le film, quitte à faire chanter tous les patrons juifs des grands studios. Le film ne fait pourtant pas d'apologie du cinéaste car Welles est montré dans toute sa mégalomanie et son égocentrisme.
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Supfiction
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Supfiction »

Un autre documentaire dispo (mais peut-être est-il dans les bonus du blu ray..) :

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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Hitchcock »

Un film que j'ai toujours trouvé surestimé. Certes, il est excellent, mais de là à l'élire meilleur film de tous les temps... D'autant plus que les seconds rôles sont assez moyens, je trouve, mis à part Joseph Cotten. Le scénario est tout à fait exemplaire : l'énigme de Rosebud fascine et accroche le spectateur jusqu'à la dernière seconde. Les prises de vues du palais de Xanadu sont magnifiques, en particulier la dernière scène qui révèle la solution. Celle-ci ne sort finalement pas de la bouche du journaliste comme on pouvait s'y atteindre. Le parti-pris de ne jamais montrer le journaliste de face est intéressant, et assez difficile à analyser. Le film comporte également quelques longueurs, et son rythme s'en trouve ralenti par rapport à d'autres films pouvant prétendre au titre, comme Vertigo ou Boulevard du Crépuscule.
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Watkinssien
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Watkinssien »

Hitchcock a écrit :Un film que j'ai toujours trouvé surestimé. Certes, il est excellent, mais de là à l'élire meilleur film de tous les temps...
Tout film élu "meilleur de tous les temps" trouvera des voix pour le qualifier de surestimé. Mais le film a tellement (et réellement) influencé un grand nombre de cinéastes, scénaristes, monteurs, chefs opérateurs, critiques qu'il s'est passé quelque chose de véritablement novateur.

Mais aujourd'hui, cette oeuvre décortiquée dans tous les sens apparaît toujours moderne dans son approche, dans ses inventions stylistiques, son montage, son émotion complexe et dans ses trucages encore invisibles pour la plupart...
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Arion
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Arion »

Citizen Kane a apporté toute une grammaire cinématographique nouvelle, avec des codes encore en vigueur de nos jours. Ce fut une révolution, en plus d'être un sacré bon film tout simplement.
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Jeremy Fox »

Watkinssien a écrit :
Tout film élu "meilleur de tous les temps" trouvera des voix pour le qualifier de surestimé. ...
Tu peux étendre à "tout film". Un adjectif qui ne veut à mon avis strictement rien dire.
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Federico »

Arion a écrit :Citizen Kane a apporté toute une grammaire cinématographique nouvelle, avec des codes encore en vigueur de nos jours. Ce fut une révolution, en plus d'être un sacré bon film tout simplement.
Un grand film et une date dans l'histoire du cinéma mais pourtant pas le Welles que je préfère.
Et je me demande si l'aspect le plus novateur du film ne fut pas l'exceptionnelle liberté accordée à un réalisateur débutant...
Car, pour le reste, Welles avait su reprendre à son compte les innovations des maîtres du cinéma allemand et soviétique (et même de D.W. Griffith) et je ne pense pas qu'il ait été le premier à utiliser la construction en flash-back non-chronologique, les confrontations de points de vue de différents protagonistes, la voix-off etc.
Disons qu'il eut le génie de synthétiser tout cela et de transposer aussi au cinéma un grand nombre de procédés... littéraires.
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Strum »

Federico a écrit :et je ne pense pas qu'il ait été le premier à utiliser la construction en flash-back non-chronologique, les confrontations de points de vue de différents protagonistes, la voix-off etc.
Disons qu'il eut le génie de synthétiser tout cela et de transposer aussi au cinéma un grand nombre de procédés... littéraires.
Non, bien sûr, Le Jour se Lève de Carné, qui utilisait ce genre de construction en 1939, l'a notamment inspiré. Et tout à fait d'accord avec toi pour évoquer l'origine littéraire de ces procédés. La littérature a presque toujours précédé le cinéma en matière de construction du récit.
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Père Jules
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Re: Citizen Kane (Orson Welles - 1941)

Message par Père Jules »

Il me semble que c'est dans le dictionnaire des films de Tulard (ou bien est-ce dans celui de Lourcelles ? - à vérifier) que Citizen Kane est d'abord considéré comme une date dans l'histoire de la critique cinématographique. Sans rien enlever au talent de Welles et à l'achèvement artistique remarquable que représente le film, je dois dire que je suis assez d'accord avec cette expression.
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