Christian-Jaque (1904-1994)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Cathy
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Cathy »

Major Dundee a écrit :
Cathy a écrit : Je pense qu'on nest pas stupide quand on arrive à mener une telle carrière, surtout en acceptant de se foutre d'un côté blonde stupide. Maintenant que Bardot ait mal évolué est une autre chose, mais elle a prouvé qu'elle avait su s'entourer des bons metteurs en scène pour la mettre en valeur, ce qui prouve à mon avis une certaine forme d'intelligence, même si je n'aime pas non plus Bardot, la femme, pas l'actrice dont j'aime bien les films :oops: !
Encore une fois tu as raison, bien sûr c'est tout à fait autre chose, mais malheureusement à son niveau j'ai du mal à faire la part des choses :oops: ce qui me gâche souvent le plaisir que je prends à certains de ses films. J'aime beaucoup "La vérité", j'aime bien "Et dieu créa la femme" et j'adore (le mot n'est pas trop fort) "En cas de malheur". 8)
Tiens il faudrait que je revois En cas de malheur, j'adore la Vérité, mais bon dans l'ensemble je suis une inconditionnelle de Clouzot !
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Commissaire Juve
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Commissaire Juve »

Légère continuation du "off"...

Je ne suis pas hyper fan, mais je peux voir ses films. Il y a quelques heures, j'ai découvert La lumière d'en face (G.Lacombe, 1956) où elle joue la jeune épouse de Raymond Pellegrin. Il y a un plan torride de transparence sur sa jupe (vision qui fout le feu à Raymond Pellegrin). Ce n'est rien, juste 2 secondes, mais j'ai compris ce qui avait pu exciter tant de bonshommes à l'époque. :lol:

Ensuite, on voit des bouts de nénés... ça m'a fait penser à Ulla Jacobsson dans Elle n'a dansé qu'un seul été (film qui avait également beaucoup "ému" les mâles de l'époque). Pendant un moment, je me suis demandé si les deux films n'avaient pas été tournés en même temps, mais... non. 1951 pour le film suédois.

Le Georges Lacombe est dispo chez R.Chateau, mais le transfert n'est pas emballant.


Sinon, pour revenir à Christian-Jaque : j'ai écrit à France Télévision Distribution pour savoir s'ils comptaient échanger les dvd "buggés" de François 1er et Un de la légion... Pas de réponse pour l'instant. :roll:
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Major Dundee
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Major Dundee »

Commissaire Juve a écrit :Légère continuation du "off"...

Je ne suis pas hyper fan, mais je peux voir ses films. Il y a quelques heures, j'ai découvert La lumière d'en face (G.Lacombe, 1956) où elle joue la jeune épouse de Raymond Pellegrin. Il y a un plan torride de transparence sur sa jupe (vision qui fout le feu à Raymond Pellegrin). Ce n'est rien, juste 2 secondes, mais j'ai compris ce qui avait pu exciter tant de bonshommes à l'époque. :lol:
Et tant de gamins aussi :oops:
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Cathy »

Fanfan la tulipe (1952)

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Les aventures d'un intrépide jeune homme au temps de Louis XV

On ne présente plus Fanfan la Tulipe, ce héros intrépide, qui virevolte, se bat, chevauche, manie l'humour comme l'épée. Bref un véritable héros de film de cape et d'épée. Christian Jaque réalise ici un sommet du genre, avec une réalisation impressionnante des scènes de combat dynamiques, vives, ou des grandes chevauchées, la grande poursuite du carrosse n'a rien à envier aux maîtres du genre américain. Et puis il y a les dialogues, avec ces bons mots signés Jeanson, ces dialogues qui sont parfois anachroniques et décalés mais si savoureux. La grande guerre finale est un délice, avec une fois encore la voix off de Jean Debucourt. Et puis naturellement, il y a le charme de Gerard Philipe qui incarne ce héros romanesque avec brio et naturel, même si on peut lui reprocher un petit côté "récitation théâtrale" dans son grand monologue "Merci Adeline" ! Mais bon cela est bien anodin, car on suit avec bonheur ses aventures. Gina Lollobridgida illumine l'écran par sa beauté. Et puis comme d'habitude, il y a tout ces grands seconds rôles sans qui le cinéma français n'existerait pas, notamment Noel Roquevert, savoureux et odieux militaire, Olivier Hussenot, compagnon d'infortune de Fanfan, Jean-Marc Tennberg qui prête sa préciosité à Lebel ou encore Jean Paredes qui est irresistible en Général en chef, sans oublier Marcel Herrand en Louis XV. Christian Jaque signe ici un chef d'oeuvre du film de cape et d'épée. Il ne faut pas oublier aussi de citer la musique de George Van Parys qui rythme toutes ces aventures endiablées et savoureuses.
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Rick Blaine
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Rick Blaine »

Un Revenant (1946)

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Sympathique drame, le film est essentiellement un véhicule pour l'immense talent de Louis Jouvet. Tout, dans le film de Christian-Jacque, semble avoir été construit pour lui. Un rôle fantastique, de superbes dialogues de Jeanson au mieux de sa forme, et même la mise en scène, globalement paresseuse s'illumine lorsqu'il est à l'écran. La photo est à l'unisson, Jouvet apparait souvent comme un spectre, comme la Statue du Commandeur qui vient secouer cette famille qui l'a rejeté 20 ans plus tôt. Les fans de l'acteur, dont je suis, seront ravis.
Dans le reste de la distribution, il faut souligner le court mais jubilatoire rôle de Marguerite Moreno, ainsi qu'un jeune François Périer, qui malgré tout est parfois un peu agaçant en amant éploré (c'est un peu le rôle qui veut ça).
Sur une problématique finalement assez classique de la place de l'artiste dans la société, le film est agréable à suivre, sans toutefois atteindre des sommets, mais souffre de quelques longueurs. Solide toutefois.
Dernière modification par Rick Blaine le 7 sept. 10, 16:23, modifié 1 fois.
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par joe-ernst »

Rick Blaine a écrit :Madeleine Moreno, ainsi qu'un jeune François Perrier
C'est Marguerite Moreno et François Périer... :fiou:
L'hyperréalisme à la Kechiche, ce n'est pas du tout mon truc. Alain Guiraudie
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Rick Blaine »

joe-ernst a écrit :
Rick Blaine a écrit :Madeleine Moreno, ainsi qu'un jeune François Perrier
C'est Marguerite Moreno et François Périer... :fiou:
Merci, c'est corrigé.

Je crois que je suis mal réveillé :mrgreen:
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Alligator »

Nathalie (Christian-Jaque, 1957) :

http://alligatographe.blogspot.com/2010 ... halie.html

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_______________

Beau générique, de la distribution jusqu'au réalisateur, en passant par les dialogues d'Henri Jeanson. J'aime beaucoup Christian-Jaque, l'ancêtre de Philippe de Broca ou Jean-Paul Rappeneau, un cinéaste du mouvement, divertissant et intelligent à la fois. Une fois de plus il crée un film très vif, au dynamisme un peu naïf, très proche de la bédé de l'époque, sauce Spirou & Fantasio ou Natacha en l'occurrence, l'école franco-belge, une comédie policière très simple, trop sans doute pour constituer un grand film, mais suffisamment de bonne facture pour divertir le public dans un bon état d'esprit.

Les dialogues de Jeanson sont parfois drôles et coulent toujours de source. Associés à un montage rapide, leur débit favorise un bon tempo, sans temps morts.

Les comédiens assurent l'essentiel. Louis Seigner et Philippe Clay me font une très bonne impression. Dans l'exaspération et la mauvaise foi, le vieux Seigner s'en tire mieux que bien.
Surtout, je suis très surpris par l'aisance naturelle et la liberté de jeu que s'octroie joliment Philippe Clay dont le physique très sec ne m'était pas totalement inconnu, mais plutôt sur les scènes de St Germain des Prés et non devant la caméra. Je ne lui connaissais pas ces dons d'acteur.
Le tout jeune Michel Piccoli assure la plupart du temps dans un rôle ingrat peu étoffé d'inspecteur pas très finaud.
Je suis plus réservé sur une Martine Carol qui me parait s'empâter et sur-jouer son personnage de fofolle, tête brûlée, blonde marilynienne, avec quelques excès dans les clignements d'œil, mordillements de lèvres, haussements de sourcils et le ton volontaire et altier qui va avec. Pourtant, elle fait partie de ces belles créatures du cinéma français qui s'est perdue en cours de route malheureusement. Quelques éclairs dans sa filmographie. Mais Nathalie n'en fait pas partie.

Le scénario à vouloir imposer un rythme trépidant et des situations d'urgence ne nous épargne guère les incohérences qui en fin de compte empêchent le film de décoller. Pas si bien écrite, cette histoire a été bâtie sur Martine Carol sans doute. Ça se voit comme le nez au milieu de la figure. Mais le nez est trop gros. Ça déborde et crée une sorte de déséquilibre que la bonne volonté des acteurs et les bons mots de Jeanson ne parviennent pas à corriger.
Le film est agréable, joyeux, divertissant, certes mais demeure bancal. Dommage.
Nestor Almendros
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Nestor Almendros »

Arte diffusera jeudi après-midi à 14h45 SI TOUS LES GARS DU MONDE (1956).
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par riqueuniee »

Un film à la gloire des radio-amateurs.Avec un tout jeune Jean-louis Trintignant (c'est lui le jeune radio amateur,qui capte le message de détresse).
Le thème du film : l'équipage d'un bateau de pêche est victime d'une intoxication alimentaire .Ils lancent un message de détresse ,capté par un radio amateur.Une chaÎne de solidarité se mettra en place,à travers le monde,pour leur venir en aide,grâce aux échanges entre radio-amateurs.
A noter que,le film datant des années 50,lors de la séquence à Berlin,les personnages se déplacent assez facilement d'Ouest en Est,le mur n'ayant pas été encore construit. (la "chaîne de solidarité" impliquant un officier américain et un avion polonais,donc parqué à Berlin Est).
Je n'ai pas revu le film depuis longtemps,il est possible que je le trouve vieilli.
Dernière modification par riqueuniee le 20 nov. 10, 23:20, modifié 4 fois.
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Re: Notez les films naphtas - Janvier 2010

Message par riqueuniee »

hansolo a écrit :Les Disparus de Saint-Agil (Christian-Jaque, 1938)
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D'après le roman de Pierre Véry et avec des dialogues de Jacques Prévert, ce film réalisé à la veille de la guerre et très agréable a suivre et les acteurs sont dirigés à la perfection. Les plans sont fluides.
Michel Simon est excellent ainsi que Erich Von Stroheim, même si ce dernier cabotine dans certaines scènes!

Le DVD "Pathé Classique" rend justice à l'oeuvre et inclus 2 débats avec des écrivains, le fils de l'auteur du livre (Noel Very) et Pierre Tchernia.

Pour l'anecdote, une scène au début du film montre l'évolution du politiquement correct en 70 ans: nos 3 jeunes chiche-capons commencent leur "réunion secrète" en se mettant à fumer comme des pompiers, une scène qu'on ne verrait certainement pas aujourd'hui! : Quand on voit que la seule "audace" scénaristique du denier Cameron étant de faire fumer Sigourney Weaver, on mesure le chemin parcouru dans le politiquement correct!
A ce oropos (encore un hors-sujet...)Ozon n'hésite pas à montrer ses actrices en train de fumer avec les enfants à côté d'elles,ce qu'aucun film américain grand public n'oserait sans doute montrer maintenant,même dans une reconstitution des années 70).
Pour en revenir aux Disparus...,j'aime beaucoup le film.Il paraît que Charles Aznavour (14 ans à l'époque) fait de la figuration dans le film,mais je ne l'ai pas repéré...Le film contient cette belle réplique (dans un échange à propos du professeur interprété par Stroheim) Bon ou mauvais,c'est toujours avec les étrangers que nous aurons la guerre.En effet,même si le sujet du film n'a rien à voir avec les menaces de guerre (il s'agit d'une intrigue policière),il est marqué par l'ambiance de l'époque.Les menaces de guerre,mais aussi le personnage de Stroheim.Ce n'est jamais évoqué directement,mais il s'agit manifestement d'un réfugié,qui a dû laisser ses proches derrière lui,et est sans nouvelles (voir la photo sur son bureau,et le courrier qu'il attend et qui ne vient jamais) -c'est une interprétation toute personnelle...
Nestor Almendros
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Nestor Almendros »

SI TOUS LES GARS DU MONDE (1956)

Mon avis sur ce film n'est pas vraiment tranché. Je n'ai pas été démesurément enthousiaste à cette ambiance utopiste et ultra-positive revendiquée qui est le centre du film. Question de goût, uniquement, qui me fait relativiser la note. Pourtant, et c'est tout le paradoxe, je trouve la démarche fort louable et finalement assez efficacement amenée. D'un point de vue structurel, le scénario est plutôt malin: c'est une succession de mini-aventures, d'épisodes plus ou moins exotiques (on parcours l'Europe jusqu'au Maroc) où le suspense est à chaque fois renouvelé, où les obstacles éventuels surgissent et alimentent l'attente du spectateur. Ce n'est pas toujours passionnant, l'intérêt est parfois inégal (rarement), mais la démarche est plutôt convaincante, d'autant plus que Clouzot (le scénariste) ratisse assez large (et assez judicieusement) jusque dans les sphères politiques avec des relents de Guerre Froide. Le récit universel se teinte donc de notions très contemporaines qui ramènent l'histoire et le spectateur à réfléchir un peu sur la société qui l'entoure. Il y a même quelques allusions aux colonies françaises (notamment ce musulman héroïque: rare dans le cinéma français, surtout à l'époque il me semble).
Plus largement, le film m'a interpellé dans cette idée d'union des êtres. L'outil utilisé à l'époque était la radio à ondes courtes: impossible de ne pas penser à l'internet d'aujourd'hui qui réunit la terre entière (par des réseaux sociaux) et qui peut de temps en temps servir à ce genre d'utopie.
Toujours en extrapolant, j'ai trouvé le scénario reprenait presque certains codes et ingrédients des films catastrophes, quinze ans avant la vague. Certains détails m'ont même rappelé des films récents: dans un DIE HARD, le héros emprisonné se fait aider à l'extérieur à l'aide d'un téléphone.

Comme quoi, si le film se laisse suivre agréablement, est assez bien rythmé, mais ne m'a pas spécialement marqué, il est bien recommandable et plutôt intéressant.
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Major Dundee »

Nestor Almendros a écrit :SI TOUS LES GARS DU MONDE (1956)


Comme quoi, si le film se laisse suivre agréablement, est assez bien rythmé, mais ne m'a pas spécialement marqué, il est bien recommandable et plutôt intéressant.
J'étais encore à l'école primaire quand le film est sorti mais je me souviens encore de l'impact qu'il a eu. Tout le monde en parlait. Je ne suis pas très au courant des box offices mais je suppose qu'il a du vraiment bien marcher :)
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Federico »

Nestor Almendros a écrit :SI TOUS LES GARS DU MONDE (1956)
Mon avis sur ce film n'est pas vraiment tranché. Je n'ai pas été démesurément enthousiaste à cette ambiance utopiste et ultra-positive revendiquée qui est le centre du film. Question de goût, uniquement, qui me fait relativiser la note. Pourtant, et c'est tout le paradoxe, je trouve la démarche fort louable et finalement assez efficacement amenée. D'un point de vue structurel, le scénario est plutôt malin: c'est une succession de mini-aventures, d'épisodes plus ou moins exotiques (on parcours l'Europe jusqu'au Maroc) où le suspense est à chaque fois renouvelé, où les obstacles éventuels surgissent et alimentent l'attente du spectateur. Ce n'est pas toujours passionnant, l'intérêt est parfois inégal (rarement), mais la démarche est plutôt convaincante, d'autant plus que Clouzot (le scénariste) ratisse assez large (et assez judicieusement) jusque dans les sphères politiques avec des relents de Guerre Froide. Le récit universel se teinte donc de notions très contemporaines qui ramènent l'histoire et le spectateur à réfléchir un peu sur la société qui l'entoure. Il y a même quelques allusions aux colonies françaises (notamment ce musulman héroïque: rare dans le cinéma français, surtout à l'époque il me semble).
Bon, pour le réalisme, on repassera (des tas de petits détails sonnent faux*) et la réalisation commence en charentaises molletonnées, genre Tintin et les oranges bleues sauf que là ce serait plutôt "Haddock et le jambon avarié" :lol: . Davantage un téléfilm qu'un film de cinéma, avec sa voix-off du récitant (Fresnay) et sa troupe de seconds couteaux, de ceux dont on s'est dit vingt fois "ah oui, lui, je le connais mais ne me demandez pas son nom...".

Le début est donc gentillet, naïf et terriblement boy-scout (ou jeunesses communistes) avec en Castors Juniors (ou Pionniers) Roger Dumas et surtout Jean-Louis Trintignant, un an avant d'exploser auprès de B.B.. Seul le suspens avec le chaton et les passages avec le marin-pêcheur raciste qui a pris le mécano marocain comme tête de Turc laissent deviner la patte de Clouzot au scénario.

Ça devient plus intéressant dans sa seconde partie avec la course contre-la-montre entre les différents relayeurs. On retrouve même un petit parfum de film d'espionnage avec le radio-amateur allemand aveugle de guerre errant avec sa canne dans les rues nocturnes et désertes de Munich puis surtout avec le soldat américain qui doit traverser la porte de Brandebourg. On est loin de Berlin-Express ou de Verboten ! mais c'est pas trop mal (malgré, là encore le petit couplet angéliste sur la fraternité universelle avec l'Américain serrant la pogne du Soviétique et au passage une bien jolie hôtesse de l'air polonaise).

La fin redescend sur la terre du confondant (le courage du mécano marocain qui entre-temps avait accepté la main tendue de son ennemi, l'accueil triomphale des héros à Concarneau devant une foule en tenue locale...)

Je ne sais pas si il existe en DVD mais un farceur pourrait l'offrir au Noël de Bernard-Henri Lévy qui, comme chacun sait est un farouche défenseur du botulisme... :lol:

Il y a eu pas mal de films universalistes et semi-documentaires de ce type dans les années 50-60. Comme Vingt mille lieues sur la terre, un film franco-soviétique avec Léon Zitrone se baladant en URSS.
Nestor Almendros a écrit : Plus largement, le film m'a interpellé dans cette idée d'union des êtres. L'outil utilisé à l'époque était la radio à ondes courtes: impossible de ne pas penser à l'internet d'aujourd'hui qui réunit la terre entière (par des réseaux sociaux) et qui peut de temps en temps servir à ce genre d'utopie.
Toujours en extrapolant, j'ai trouvé le scénario reprenait presque certains codes et ingrédients des films catastrophes, quinze ans avant la vague. Certains détails m'ont même rappelé des films récents: dans un DIE HARD, le héros emprisonné se fait aider à l'extérieur à l'aide d'un téléphone.
Oui, il y a de ça. On a trop bêtement lancé le terme mondialisation quand s'est développé Internet alors que le phénomène remonte (au moins) à plus d'un siècle avec l'invention de la TSF, puis du téléphone (des tas de films muets et des débuts du parlant firent de ces "nouvelles technologies" un accessoire essentiel voire leur principal sujet**). Par un amusant hasard, j'ai découvert le film de Christian-Jaque en même temps que l'adaptation manga du film d'animation Summer Wars où on voit qu'en plein bug des communications multimedia, une vieille dame ravive son ancien réseau de connaissances à l'aide d'un vieux téléphone en bakélite.

(*) Quand on prend un message d'urgence, on ne raconte pas sa vie et un radio n'écrit pas en toutes lettres "rien à signaler". Et puis c'est rare d'avoir un telle netteté d'écoute. En plus, ils se compliquent la vie. Le bâteau navigue très haut en pleine Mer du Nord (étonnamment d'huile durant tout le film), son contact est au Togo et le 3ème larron est à Paris... En 1955, il devait y avoir des milliers de radio-amateurs bien plus proches (sans compter d'autres navires). Détail plus criant : il existait depuis 1948 Saint Lys Radio, une station spécialement conçue pour les communications avec les navires en mer (je l'ai beaucoup écoutée jusqu'à son arrêt en 1998 et c'était souvent passionnant, j'ai pu suivre des opérations de sauvetage, les conversations des concurrents de la Transat et même d'envoyés d'ONG durant le conflit yougoslave et je peux vous dire que c'était très différents de ce que l'on entendait alors dans les media classiques).

(**) Allô Berlin, ici Paris, Les surprises de la T.S.F., les Mabuse, la mode des films italiens dits de "Téléphones blancs", certains Guitry et screwballs comedies...
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Re: Christian-Jaque (1904-1994)

Message par Federico »

Rick Blaine a écrit :Un Revenant (1946)

Sympathique drame, le film est essentiellement un véhicule pour l'immense talent de Louis Jouvet. Tout, dans le film de Christian-Jacque, semble avoir été construit pour lui. Un rôle fantastique, de superbes dialogues de Jeanson au mieux de sa forme, et même la mise en scène, globalement paresseuse s'illumine lorsqu'il est à l'écran. La photo est à l'unisson, Jouvet apparait souvent comme un spectre, comme la Statue du Commandeur qui vient secouer cette famille qui l'a rejeté 20 ans plus tôt. Les fans de l'acteur, dont je suis, seront ravis.
Je ne suis pas très fan de Christian-Jaque mais j'aime énormément ce film qui dégage une grande poésie dramatique (entre Prévert-Carné et le cinéma russe). Mais je suis d'accord, le mérite en revient sans doute en très grande partie à un Jouvet hors-concours qui trouva peut-être ici son rôle le plus bouleversant (avec l'inspecteur du Quai des orfèvres).
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