Clint Eastwood

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés à partir de 1980.

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Supfiction
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Re: Clint Eastwood

Message par Supfiction »

Coxwell a écrit : 17 févr. 21, 11:55
Supfiction a écrit : 17 févr. 21, 08:13 les thèmes de ses derniers films font fortement écho aux thèmes portés par Trump : critique des médias, image de l’homme seul contre le système (le fameux État profond)..
Attention à ne pas faire des amalgames. Cet élément en gras fait écho au populisme de façon général (de gauche comme de droite par ailleurs)
Encore une fois, je ne fais pas d’amalgame, je dis simplement que ces thèmes portés par Trump font fortement écho à ceux de ces films de EastWood.
Par contre, l’homme seul qui affronte le système, c’est plutôt du populisme de droite, la gauche se revendiquant plutôt du collectif (contre les forces de l’argent en gros) et de l’Etat protecteur.
odelay a écrit : 17 févr. 21, 12:04 J’ai été surpris se voir que Paul Walter Hauser (Richard Jewell donc) n’avait pratiquement pas été récompensé ni même nommé pour ce rôle. Kathy Bates (qui est très bien) a eu tous les honneurs. Je ne veux pas faire ma Binoche mais c’est quand même assez injuste.
Oui, probablement parce que beaucoup ont considéré qu’il ne jouait peut-être pas tant que ça. Le résultat aurait probablement été différent si l’acteur avait été connu avant le film. On aurait alors salué la transformation physique de l’acteur et son jeu impeccable.
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Coxwell
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Re: Clint Eastwood

Message par Coxwell »

Supfiction a écrit : 17 févr. 21, 12:16 Encore une fois, je ne fais pas d’amalgame, je dis simplement que ces thèmes portés par Trump font fortement écho à ceux de ces films de EastWood.
Par contre, l’homme seul qui affronte le système, c’est plutôt du populisme de droite, la gauche se revendiquant plutôt du collectif (contre les forces de l’argent en gros) et de l’Etat protecteur.
Je ne suis pas du tout convaincu par cette idée. Ce n'est pas parce qu'on entend Trump dire ça, que cela doit oblitérer le fait que les films d'Eastwood ne sont pas l'écho de Trump mais d'idées qui sont bien antérieures et différentes de ce qui est décrit. C'est très bancal comme réflexion.

Quant à la question du populisme, il ne faut pas confondre la gauche avec le populisme de gauche.
Il y a une énorme porosité entre les différents populismes (gauche et droite) ce qui est par ailleurs l'essence même des mouvements populistes - historiques (faut-il rappeler que le fascisme italien s'est construit sur le rassemblement de forces anarcho-syndicales, crypto-léninistes + réactionnaires de droite anti-capitalistes qui fustigeaient le "système" en place. Beaucoup de transfuges communistes ont migré dans le parti fasciste).

Le populisme est une notion très complexe à définir : elle a au moins deux aspects différents par rapport à la démagogie : la construction d'un discours anti-système et d'une proposition où il ne s'agit plus vraiment de faire corps avec toute la structure de la société pour proposer un "vivre ensemble" prenant en compte l'ampleur du spectre sociétal (entièreté), mais de définir et de grandir politiquement sur la construction d'une opposition barricadée entre le "eux" et le "nous". On définit ensuite le "nous" avec des critères plus moins différents en fonction du champ racial/social/économique, le tout reposant plus ou moins sur l'idée que si le "nous" ne fonctionne pas/souffre, c'est en raison de la conspiration multi-factorielle du "eux" précédemment défini par le courant populiste en question.

"L'homme seul ici affrontant le système" n'est en rien un populisme de droite. C'est plutôt une expression symptomatique dun petit libertarian américain avec les ressorts habituels transférés du XIXe au XXIe. Fondamentalement, c'était le petit éleveur-agriculteur cow boy du Wyoming affrontant avec difficulté "l'oppression" grandissante de l'Etat fédéral qui lui dit qu'il ne peut plus faire ce qu'il veut au nom du collectif encadré par un Etat supra-local, et qui entend donc régir ses terres dans le cadre de l'incorporation de l'Etat à celui des Etats-Unis - et du champ de Washington. Ce n'est pas du populisme, c'est une forme crypto-libertarienne, anarchiste de droite héritée de l'ADN américain du 19e et rafraîchie à la sauce d'aujourd'hui. C'est une expression classique de certains courants républicains qui n'ont rien de populiste à mes yeux.
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Re: Clint Eastwood

Message par Alexandre Angel »

La mise au point de Coxwell me semble pertinente et bienvenue.

Et Le Cas Richard Jewell n'est pas sans ambiguïtés mais elles vont dans le sens de l'enrichissement et non de l'appauvrissement du débat.
Ce qui est très intéressant dans le film et qui défie toute classification hâtive est le ton jamais hargneux du scénario.
Bien sûr, les cibles sont clairement désignées et de façon peu finaude (le mec du FBI con comme sa bite qui révèle les infos à une journaliste qui, elle, n'est pas piquée des hannetons dans le genre carriériste et dont le revirement est un peu trop soudain pour être crédible) mais c'est la tradition sans doute libertarienne (?) ,remontant à Frank Capra, qui veut cela.

Mais ce qui est plus fin dans Richard Jewell est un positionnement non asséné qui parle, évoque, une frange de la population américaine coupée des élites, de l'administration. C'est ce mépris paradoxal des "petits blancs" par les élites, qui existe, quoiqu'on en dise, aux USA, qui est le sujet secret du film (il faut un coupable et ce coupable ne peut être qu'un white trash qui collectionne les armes).

Et en effet, cela n'en fait pas un film trumpiste pour autant.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Message par Supfiction »

Coxwell a écrit : 17 févr. 21, 12:42 Je ne suis pas du tout convaincu par cette idée. Ce n'est pas parce qu'on entend Trump dire ça, que cela doit oblitérer le fait que les films d'Eastwood ne sont pas l'écho de Trump mais d'idées qui sont bien antérieures et différentes de ce qui est décrit. C'est très bancal comme réflexion.
Ce n’est pas parce que les idées sont antérieures qu’on ne peut pas les associer à Trump. Sinon, des que l’on parle de thèmes portés par la gauche, il faudrait remonter à Proudhon ou même Rousseau. Il se trouve que c’est Trump qui porte ces idées actuellement en Amérique et qu’après tout ce qui s’est passé, il garde encore le vote (à défaut d’une adhésion difficile à déterminer) de la majorité des républicains. Enfin il me semble, je ne me prétend pas expert sur le sujet de la politique américaine.

Néanmoins je n’aime pas les étiquettes non plus et je pense que le terme trumpiste ne veut pas dire grand chose sinon pour faire des amalgames. C’est d’ailleurs l’un des sujets du film puisque Richard Jewell a tout de la caricature de l’électeur de Trump.
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Message par batfunk »

Paul Walter Hauser méritait d'être nommé, plus qu'un Di Caprio selon moi. Mais il n'avait aucune chance de gagner face à Joachim"Joker" Phoenix. Adam Driver était aussi superbe dans Marriage Story :D

En tout cas, débat de Belle tenue, qui aurait vite dégénéré sur le même sujet en France.La distanciation(sociale?) a du bon :mrgreen:. En tout cas, on est d'accord sur le fait que c'est un grand film.
Faudra refaire un débat sur un autre grand film polémique, American Sniper, que je considérais comme son dernier grand film avant Richard Jewell :D
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Re: Clint Eastwood

Message par Coxwell »

Supfiction a écrit : 17 févr. 21, 14:25
Coxwell a écrit : 17 févr. 21, 12:42 Je ne suis pas du tout convaincu par cette idée. Ce n'est pas parce qu'on entend Trump dire ça, que cela doit oblitérer le fait que les films d'Eastwood ne sont pas l'écho de Trump mais d'idées qui sont bien antérieures et différentes de ce qui est décrit. C'est très bancal comme réflexion.
Ce n’est pas parce que les idées sont antérieures qu’on ne peut pas les associer à Trump. Sinon, des que l’on parle de thèmes portés par la gauche, il faudrait remonter à Proudhon ou même Rousseau. Il se trouve que c’est Trump qui porte ces idées actuellement en Amérique et qu’après tout ce qui s’est passé, il garde encore le vote (à défaut d’une adhésion difficile à déterminer) de la majorité des républicains. Enfin il me semble, je ne me prétend pas expert sur le sujet de la politique américaine.

Néanmoins je n’aime pas les étiquettes non plus et je pense que le terme trumpiste ne veut pas dire grand chose sinon pour faire des amalgames. C’est d’ailleurs l’un des sujets du film puisque Richard Jewell a tout de la caricature de l’électeur de Trump.
Oui, je pense que tu manques de quelques connaissance dans les tendances actuelles - et historiques - qui constituent le socle idéologique du parti républicain. On ne peut pas "essentialiser" (même si c'est dans l'air du temps) sans faire des contresens et des anachronismes.
Quant au personnage de Richard Jewell, je ne considère pas non plus qu'il soit l'incarnation de l'électeur de Trump ; dans ce cas, le personnage joué par Eastwood dans Gran Torino le serait-il à tes yeux ? Le penser serait faire preuve d'une lecture dépourvue de toute notion historique du parti et de ses électeurs. Le Gran Torino de Eastwood est assez révélateur du républicain "eisenhowerien" et plus ou moins fidèle à ce que pourrait être le parcours de Eastwood lui-même. Ce n'est pas le type d'électeur qui se laisse amadouer par la politique clownesque et pompière, des constructions politiques qui n'ont pas vraiment de socle idéologique stable ; c'est un électeur qui est plutôt sensibles aux carrures un peu froides d'hommes d'Etat, conservatrices et peu libérales sur le plan des moeurs ; un électeur avec le goût de la libre entreprise mais dont l'absence d'Etat est loué hormis le "core" minimum du régalien hérité de l'Ancien Monde.
Les vieux républicains à la John McCain (et Eastwood d'une certaine manière) considèrent Trump - à juste titre - Trump comme une entité exogène au parti ayant accompli une OPA à un moment où le GOP traversait une crise profonde et ce, depuis quelques années. La radiographie des républicains est bien plus complexe que tu ne le penses, et ce n'est pas en tentant quelques simplifications hasardeuses que l'on puisse véritablement appréhender sereinement la réalité politique de ce pays et de son histoire.
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Re: Clint Eastwood

Message par Supfiction »

Et en quoi pour toi, Richard Jewell ne ressemble pas à l’image que l’on se fait de l’électeur de Trump ?
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Re: Clint Eastwood

Message par Coxwell »

Et en quoi il le serait ? On pourrait renverser la charge à mon sens. Je crois qu'il y a une lecture "téléologique" du personnage et du film : parce qu'aujourd'hui, Trump fustige les médias et le système qui en veut au "blanc déclassé", le personnage du film d'Eastwood, représentant l'Average Joe à la fin des années 90-début 2000 serait en soi l'électeur de Trump, alors même - qui plus est - où Trump n'est pas président et pas même l'ombre d'un politicien ? Quand je parlais d'anachronisme plus haut :idea:

Quant à la téléologie, on pourrait également reprocher ce principe de raisonnement en transposant la situation où des personnages incarnant des Allemands pauvres et déclassés de chez Murnau des années 1920 voire de chez Lang représenteraient les anciens/futurs/potentiels électeurs du parti NSDAP en Allemagne ? Mais quelle est la base de ce raisonnement fallacieux, si ce n'est de tenter d'expliquer une sorte de déterminisme causal à l'aune de SA connaissance de l'après, dont les individus ignorent tout ou presque au moment même d'exister. Je sais bien que cela a l'air séduisant sur le papier, et rassurant sans doute, mais c'est une erreur conceptuelle qui contraint à enfermer les uns et les autres dans des mécanismes où ils sont dépourvus de toute marge de manœuvre à partir de la connaissance d'un futur dont ils ignorent le déroulement. La base d'un raisonnement très bancal.
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Re: Clint Eastwood

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Tout cela n'empêche pas qu'Eastwood a voté Trump en 2016 alors que le personnage risible et dangereux était déjà bien rodé et dont la portée inquiétante sur la politique US a été entrevue à l'époque par certains (la tribune de Kirk Douglas au Huffington Post en septembre 2016). Et le vote anti-Hillary Clinton était non moins une adhésion pleine et entière au programme de Trump qu'un vote anti-système.

Je pense que dans le fond, Trump et Eastwood se rejoignent sur bien des points et c'est plutôt la forme fanfaronne et souvent débilitante de l'ex-président qui a causé la fracture. Et les dérapages des derniers mois ont enfoncé le clou.
Coxwell a écrit : 17 févr. 21, 16:05 Et en quoi il le serait ? On pourrait renverser la charge à mon sens. Je crois qu'il y a une lecture "téléologique" du personnage et du film : parce qu'aujourd'hui, Trump fustige les médias et le système qui en veut au "blanc déclassé", le personnage du film d'Eastwood, représentant l'Average Joe à la fin des années 90-début 2000 serait en soi l'électeur de Trump, alors même - qui plus est - où Trump n'est pas président et pas même l'ombre d'un politicien ? Quand je parlais d'anachronisme plus haut :idea:
Sauf que Richard Jewell est un film de 2019 et je pense qu'un film parle plus du temps dans lequel il a été tourné que du temps dans lequel il se situe...
Après dans le fond, tu as sûrement raison sur la situation complexe du parti républicain, de ses multiples composantes et du refus de l'amalgame (tu m'as l'air de bien mieux t'y connaître que la plupart d'entre nous), mais je pense que tes arguments ne sont pas incompatibles avec un certain "état d'esprit" commun entre Eastwood et Trump...
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Re: Clint Eastwood

Message par Supfiction »

Édit : O’Malley m’a doublé pendant que j’écrivais.

On ne peut pas totalement isoler un film de son époque et il se trouve que c’est Trump qui aujourd’hui capte le vote républicain. Et ce même si Eastwood a probablement les mêmes idées politiques depuis des décennies. A l’époque de Million Dollar Baby, je suppose que de nombreux cinéphiles faisaient le rapprochement entre la famille de l’héroïne et l’électorat de George W Bush et surtout de Sarah Palin (et on peut en dire autant des premiers films de Lang sans sur-interpréter ses films non plus). Le discours de Eastwood va sûrement au delà de la politique politicienne du moment mais je suis désolé, on ne peut pas accuser les gens de faire des amalgames dès que l’on souligne le rapprochement entre les discours d’un candidat et son illustration dans un film.
Les idées politiques sont incarnées par les hommes politiques du moment. Or, la critique des médias et du système (l’État profond) est aujourd’hui incarné par Trump. Je rappelle quand même qu’on a ce débat depuis deux pages juste pour cette constatation.
O'Malley a écrit : 17 févr. 21, 16:27 Je pense que dans le fond, Trump et Eastwood se rejoignent sur bien des points et c'est plutôt la forme fanfaronne et souvent débilitante de l'ex-président qui a causé la fracture. Et les dérapages des derniers mois ont enfoncé le clou.
Tout à fait. C’est probablement plus la forme, la personne et les manières de Trump qui le dérangent plus que le fond de sa politique. Comme de nombreux républicains d’ailleurs.
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Re: Clint Eastwood

Message par O'Malley »

Alexandre Angel a écrit : 17 févr. 21, 13:55 Mais ce qui est plus fin dans Richard Jewell est un positionnement non asséné qui parle, évoque, une frange de la population américaine coupée des élites, de l'administration. C'est ce mépris paradoxal des "petits blancs" par les élites, qui existe, quoiqu'on en dise, aux USA, qui est le sujet secret du film (il faut un coupable et ce coupable ne peut être qu'un white trash qui collectionne les armes).
qui est aussi le coeur un peu moins secret du programme électoral de Trump en 2016. Et comme tu le décrit bien, les représentants du système sont dans le film à la limite de la caricature tant dans leur psychologie que dans leurs actes alors que les personnages de blancs déclassés font l'objet d'une étude psychologique et d'une bienveillance plus poussée. Ce qui en fait les limites du film, qui ne peut prétendre à être un grand Eastwood (seulement un bon ,ce qui est déjà bien).
Dernière modification par O'Malley le 17 févr. 21, 16:59, modifié 1 fois.
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D’ailleurs quelqu’un serait-il capable de trouver un film français parlant de la même façon (à défaut d’aussi bien) des déclassés de la France périphérique ?
Peut-être chez les Dardenne (oui, ils sont wallons).
O'Malley a écrit : 17 févr. 21, 16:49 Et comme tu le décrit bien, les représentants du système sont dans le film à la limite de la caricature tant dans leur psychologie que dans leurs actes alors que les personnages de blancs déclassés font l'objet d'une étude psychologique et d'une bienveillance plus poussée. Ce qui en fait les limites du film, qui ne peut prétendre à être un grand Eastwood (seulement un bon ,ce qui est déjà bien).
On ne peut pas reprocher je trouve la bienveillance « poussée » d’Eastwood envers Richard Jewell. Un peu plus en revanche les personnages de la journaliste arriviste et du flic incompétent (bien que ça existe évidemment). On voit pleurer la journaliste, ce qui amenuise l’aspect caricatural du personnage.
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Re: Clint Eastwood

Message par O'Malley »

Supfiction a écrit : 17 févr. 21, 16:58 D’ailleurs quelqu’un serait-il capable de trouver un film français parlant de la même façon (à défaut d’aussi bien) des déclassés de la France périphérique ?
Peut-être chez les Dardenne (oui, ils sont wallons).
O'Malley a écrit : 17 févr. 21, 16:49 Et comme tu le décrit bien, les représentants du système sont dans le film à la limite de la caricature tant dans leur psychologie que dans leurs actes alors que les personnages de blancs déclassés font l'objet d'une étude psychologique et d'une bienveillance plus poussée. Ce qui en fait les limites du film, qui ne peut prétendre à être un grand Eastwood (seulement un bon ,ce qui est déjà bien).
On ne peut pas reprocher je trouve la bienveillance « poussée » d’Eastwood envers Richard Jewell. Un peu plus en revanche les personnages de la journaliste arriviste et du flic incompétent (bien que ça existe évidemment). On voit pleurer la journaliste, ce qui amenuise l’aspect caricatural du personnage.
C'est plutôt le fait que la journaliste et le flic soient des personnages aux ressorts grossiers (le fait qu'Olivia Wilde pleure comme ça sur un revirement esquissé en 1mn en est un justement) que je reproche à Eastwood, et qui montre les limites de sa démonstration qui est, au final, plus simpliste qu'elle aurait dû l'être...
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Re: Clint Eastwood

Message par Supfiction »

Maintient que tu le dis, c’est vrai que voir une journaliste pleurer comme ça pour un étranger, c’est moyennement crédible. Ou alors en cachette dans les toilettes. Et pourtant, la scène fonctionne je trouve.
Dernière modification par Supfiction le 17 févr. 21, 17:42, modifié 1 fois.
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Re: Clint Eastwood

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O'Malley a écrit : 17 févr. 21, 16:27 Tout cela n'empêche pas qu'Eastwood a voté Trump en 2016 alors que le personnage risible et dangereux était déjà bien rodé et dont la portée inquiétante sur la politique US a été entrevue à l'époque par certains (la tribune de Kirk Douglas au Huffington Post en septembre 2016). Et le vote anti-Hillary Clinton était non moins une adhésion pleine et entière au programme de Trump qu'un vote anti-système.

Je pense que dans le fond, Trump et Eastwood se rejoignent sur bien des points et c'est plutôt la forme fanfaronne et souvent débilitante de l'ex-président qui a causé la fracture. Et les dérapages des derniers mois ont enfoncé le clou.
Coxwell a écrit : 17 févr. 21, 16:05 Et en quoi il le serait ? On pourrait renverser la charge à mon sens. Je crois qu'il y a une lecture "téléologique" du personnage et du film : parce qu'aujourd'hui, Trump fustige les médias et le système qui en veut au "blanc déclassé", le personnage du film d'Eastwood, représentant l'Average Joe à la fin des années 90-début 2000 serait en soi l'électeur de Trump, alors même - qui plus est - où Trump n'est pas président et pas même l'ombre d'un politicien ? Quand je parlais d'anachronisme plus haut :idea:
Sauf que Richard Jewell est un film de 2019 et je pense qu'un film parle plus du temps dans lequel il a été tourné que du temps dans lequel il se situe...
Après dans le fond, tu as sûrement raison sur la situation complexe du parti républicain, de ses multiples composantes et du refus de l'amalgame (tu m'as l'air de bien mieux t'y connaître que la plupart d'entre nous), mais je pense que tes arguments ne sont pas incompatibles avec un certain "état d'esprit" commun entre Eastwood et Trump...
H. Clinton n'est pas appréciée depuis ses débuts et ce, par une grande partie des classes populaires (establishment, arrogance East coast qui ne passe pas, effet "dynastique et familial", etc.). Cela a contribué au vote de rejet de sa personne, et nourrir "l'anti-système" d'un personnage hors-sol qui souhaitait représenter l'Américain déclassé.

Il y a peu de références précises quant à l'évolution du soutien de Eastwood à Trump. On lit tout et son contraire, et beaucoup de choses qui laissent à penser (sans exagération) que cet antagonisme ne repose pas que sur l'aspect "shitshow" et la vacarme de la communication vulgaire de Trump. Idéologiquement, il y des ruptures plus profondes. McCain, comme je le citais, est beaucoup plus proche de ce que représente Eastwood hier et aujourd'hui.
Quant à la lecture du personnage du film comme un électeur typique de Trump, c'est à mon sens une simplification. Cela ne sert ni à la compréhension du personnage (donc dans le sens de la lecture du film) ni à l'inscription de celui-ci dans l'Amérique actuelle afin de mieux la comprendre. D'autant plus que ce schéma narratif et contre-iconique eastwoodien est bien antérieur à l'Amérique polarisée de Trump (Sully et autres oeuvres précédentes notamment).
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