En l’occurrence, le titre français, qui fait plus penser à un mélodrame de bas étage ou une télénovela, est bien moins poétique et évocateur que le titre VO, "Här har du ditt liv", traduisible en "Ici est ta vie" (mais si un suédophone passe par là, il vérifiera, je me suis contenter de Google Traduction...)
On y suit pendant 2h50 le parcours d'Olof, jeune travailleur de 14 ans dans le nord de la Suède durant la Première Guerre mondiale, d'après le roman semi-autobiographique d'Eyvind Johnson. Récit initiatique typique, ces Feux de la vie se démarque par son espèce de déterminisme lyrique et bienveillant. On suit Olof à travers ses différents travaux (flotteur de bois, employé de scierie, ouvreur puis projectionniste dans un cinéma...) qui l'amènent à s’interroger sur le Monde et la société suédoise, embrassant peu à peu la pensée et l'action marxiste. Troell refuse ici toute narration simpliste basé sur des liens de causes à effets et préfère au contraire plonger par à-coup le spectateur dans la vie d'Olof, avec un art consommé de l'ellipse. C'est littéralement une "tranche de vie", assez ordinaire qui plus est, rendu passionnante par le regard humaniste et compatissant porté sur tous les personnages et par la générosité de la mise en scène.
La photographie, signée Troell lui même, est absolument superbe, avec son noir et blanc lumineux et ses choix de cadrages étonnants. Troell s'essaye à plusieurs reprises à des effets de mise en scène inattendus dans un tel film (séquences en couleur, arrêts sur image, surimpressions...) qui tombent parfois dans une certaine coquetterie gratuite, mais témoignent du talent purement cinématographique du réalisateur. Chaque plan semble détenir une idée ou une charge poétique qui capte le regard et renouvelle l'intérêt du spectateur.
Un superbe premier film, impressionnant de maitrise et de maturité. Bien hâte de découvrir le reste de sa filmo, à commencer par le diptyque Les Émigrants/Le Nouveau Monde ! Je crois que j'ai trouvé en Jan Troell mon compagnon cinématographique de confinement !
(Dispo uniquement chez Criterion US)
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