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Shinji
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Message par Shinji »

Je me replonge dans cette grande saga SF, en espérant aller au bout cette fois.

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Ikebukuro
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Message par Ikebukuro »

Lu il y a 30 ans je crois; superbe space opera pour l'étudiant que j'étais; l'autre grand classique de la SF avec Dune.
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Phnom&Penh
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Message par Phnom&Penh »

Ikebukuro a écrit : 24 août 20, 12:20 "La guerre des femmes" de Dumas? Totalement inconnu au bataillon... En cherchant sur le net, je découvre que Dumas a écrit aussi un livre sur la Régence.. mais il était infatigable nom de diou!
Le voici:
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Mais effectivement, quand je disais "réédition récente", le temps passe vite, et ça date de 2003.
J'ai regardé sur Amazon, il n'existe plus. Il y a de vieilles éditions reliées mais en plusieurs tomes, une édition à 35 euros...Mais bon, tu es plus jeune que moi, tu sauras bien le dénicher :wink:
Ce que je peux te dire, c'est que c'est du niveau des Trois mousquetaires, et je n'exagère pas. Le baron de Canolles vaut d'Artagnan, et la fin te tirera des larmes 8)

La Régence, je dirai Le chevalier d'Harmental, et il est dispo ici:

Amazon, Le chevalier d'Harmental

La guerre des femmes, c’est la Fronde.
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Jack Griffin
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Message par Jack Griffin »

"La guerre des femmes" a été réédité en 2010

http://www.editionslibretto.fr/la-guerr ... 2752904997

Et trouvable à Lyon, Toulouse ou Paris...Il y a des chances qu'il ne soit pas épuisé

https://www.placedeslibraires.fr/listel ... mmes+dumas
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Supfiction
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Message par Supfiction »

La guerre des femmes, La Dame de Montsoreau .. sympa ces Dumas. Le problème c’est que même avec le confinement je n’ai pas terminé Le vicomte de Bragelonne (arrêté à la page 1000/1600 car trop lourd pour être mis dans une valise). Depuis, je suis passé à la saga Révolutionnaire de Robert Margerit (presque terminé le tome 1/4).

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Phnom&Penh
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Message par Phnom&Penh »

Jack Griffin a écrit : 25 août 20, 11:01 "La guerre des femmes" a été réédité en 2010

http://www.editionslibretto.fr/la-guerr ... 2752904997

Et trouvable à Lyon, Toulouse ou Paris...Il y a des chances qu'il ne soit pas épuisé

https://www.placedeslibraires.fr/listel ... mmes+dumas
Tant mieux. J'en profite pour copier l'excellente présentation:

Vers la fin de ces années 1840 qui seront pour lui comme une allée royale balisée de chefs-d’œuvre, Alexandre Dumas imagine un roman qui serait l’équivalent féminin de ses chers Mousquetaires : La Guerre des Femmes – soit la Fronde évoquée côté alcôve.
Nous sommes en 1650 et deux amazones pleines de panache s’opposent, tant par leurs caractères que par leurs convictions. La brune Nanon de Lartigues, fourbe, ensorceleuse et fougueuse maîtresse du duc d’Épernon, fidèle à Anne d’Autriche et à Mazarin, affronte la blonde et délicate Claire de Cambes, qui sait déployer des trésors de courage pour soutenir les princes révoltés réunis autour de Condé. Ces mousquetaires en jupon ne renonceront à aucune manœuvre pour faire triompher leur cause.
Jeux de masque, passages dérobés, quiproquos, liaisons impossibles, loyauté jusque dans la mort : tous les ingrédients sont là, et comme soutenus par une ombre tenace de tristesse, car l’on pressent un funeste dénouement. Or Dumas n’est jamais si grand que dans ces fins de partie où tout s’avère perdu – fors l’honneur d’avoir bellement vécu.

8)

Enfin, le baron de Canolles est quand même le héros du livre et n'est pas un mousquetaire en jupons :) Mais la fin se règle effectivement très bellement entre femmes.

Cela dit, il avait quand même une armée de n...je sais même pas comment on doit dire aujourd'hui, collaborateurs officieux? :mrgreen: Et par exemple, la trilogie Joseph Balsamo - Ange Pitou - Comtesse de Charny - Maison-Rouge...C'est déjà médiocre au début, mais de pire en pire en avençant :uhuh:

En revanche, Supfiction, Le vicomte de Bragelonne, il pèse lourd mais c'est du très bon. C'était le roman préféré de ma grand-mère paternelle et, quand j'étais jeune, j'avais commençé et m'étais dit "la mamie, elle a passé l'âge des Trois mousquetaires, elle aime quand ça dure longtemps". En fait, il ne faut pas le lire trop jeune, mais c'est presque meilleur que les deux premiers. Et la fin des quatre héros :mrgreen: :wink:
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Message par Supfiction »

Phnom&Penh a écrit : 25 août 20, 14:31 la trilogie Joseph Balsamo - Ange Pitou - Comtesse de Charny - Maison-Rouge...C'est déjà médiocre au début, mais de pire en pire en avençant :uhuh:

Ah La comtesse de Charny.., le feuilleton des années 80, c’était un peu mes universités. :D

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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

Dumas père, l'un des auteurs m'ayant donné avec Les trois mousquetaires le goût dévorant pour la lecture 'adulte' très tôt, aux alentours de 10 ans je pense.

La Guerre des femmes est effectivement excellent, tout comme Monte Cristo ou les deux trilogies Mousquetaires et Margot-Montsoreau-45. Comme dit ci dessus, Joseph Balsamo et consorts, ça commence à devenir médiocre mais c'est encore très bon comparé aux Mohicans de Paris, fatigant et 'chiantissime' à force de vouloir inclure un rebondissement par chapitre et totalement indigne de l'auteur. Ses romans sur la Maison de Savoie sont eux aussi plus que moyens à tel point que je me suis arrêté au premier tome.

Tiens vous m'avez donné envie de relire La Guerre des femmes que je viens de voir dans ma bibliothèque 8)
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Supfiction
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Message par Supfiction »

J’ai regardé pour l’occasion le premier épisode de Joseph Balsamo avec Jean Marais (en passant, bien moins bon que Jean-françois Garreaud dans La comtesse de Charny, tout comme le reste du casting). Je ne me rappelais plus de ce personnage de Dumas. Je trouve qu’il ressemble un peu/beaucoup au Vautrin de Balzac (hypnose, manipulations, etc). Il ne serait pas étonnant que Dumas ai été très inspiré par les romans de Balzac sortis quelques années avant les siens.

J’ai trouvé La Guerre des femmes sur un site d’occasion, je suis bien tenté (en dépit des livres à lire ou non finis qui s’accumulent chez moi).
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Phnom&Penh
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Message par Phnom&Penh »

Jeremy Fox a écrit : Comme dit ci dessus, Joseph Balsamo et consorts, ça commence à devenir médiocre mais c'est encore très bon comparé aux Mohicans de Paris, fatigant et 'chiantissime' à force de vouloir inclure un rebondissement par chapitre et totalement indigne de l'auteur. Ses romans sur la Maison de Savoie sont eux aussi plus que moyens à tel point que je me suis arrêté au premier tome.
Oui, Les mohicans, c'est pas grandiose, et le pire, c'est la suite: Salvator, de mémoire :uhuh:
Dans la série Balsamo, il faut noter qu'Ange-Pitou n'est pas si mal, mais il a été largement écrit (et c'est le seul de la série) par son collaborateur officiel, Auguste Macquet (cela c'est malheureusement mal terminé entre les deux avec procès et compagnie).
Supfiction a écrit :Ah La comtesse de Charny.., le feuilleton des années 80, c’était un peu mes universités.
En fait, les histoires en tant que "scénarios", sont toujours bonnes. C'est juste que certaines sont écrites à la truelle de feuilletoniste qui avait besoin de faire rentrer des sous.
Jeremy Fox a écrit : Tiens vous m'avez donné envie de relire La Guerre des femmes que je viens de voir dans ma bibliothèque 8)
Supfiction a écrit : J’ai trouvé La Guerre des femmes sur un site d’occasion, je suis bien tenté (en dépit des livres à lire ou non finis qui s’accumulent chez moi).
Celui-là, c'est du meilleur Dumas.
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Jack Burns
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Message par Jack Burns »

Supfiction a écrit : 25 août 20, 11:48 je suis passé à la saga Révolutionnaire de Robert Margerit (presque terminé le tome 1/4).

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Un avis m interesserait sur cet auteur car tres tenté par l ile des perroquets et le chateau des bois noirs .. :wink:
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Supfiction
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Message par Supfiction »

Je ne peux te parler que de celui-ci qui se lit très facilement mêlant habilement les personnages fictifs aux figures de la révolution, de Robespierre à Marie-Antoinette. L’un des personnages est un député fictif de l’Assemblée de 1790 ce qui fait que l’on vit la révolution aux premières loges. C’est passionnant et chacun en prend pour son grade plutôt objectivement je trouve.
Grand prix du roman de l'Académie française.
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Jack Burns
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Message par Jack Burns »

Merci pour ce retour positif , cette histoire de la révolution avec un coté romanesque me tente bien aussi ..

Je viens de terminer ce roman
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C est l histoire d un homme d affaires proche d Obama en plein succès au début du roman qui va voir cruellement le mécanisme de sa vie se dérégler ...
un portrait glaçant de l Amérique actuelle ( antisémitisme , racisme , réseaux sociaux , lynchage médiatique)meme s il y a beaucoup d humour .
Un pavé de 700 pages que j ai lu d une traite .
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poet77
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Message par poet77 »

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« J’aimerais être un homme bon, écrit Emmanuel Carrère à la fin de la première partie de Yoga, son nouvel ouvrage, j’aimerais être un homme tourné vers ses semblables, j’aimerais être un homme fiable. Je suis un homme narcissique, instable, encombré par l’obsession d’être un grand écrivain. » C’est, quoi qu’il en soit, avec un récit singulier, sans fard, que revient Carrère sur les étals des librairies, six ans après la parution du Royaume, livre dans lequel, on s’en souvient, il explorait avec bonheur les origines du christianisme. Je ne sais si l’on a affaire à un grand écrivain, comme il en a l’ambition (ou, en tout cas, « l’obsession », nous dit-il), je n’en suis pas du tout certain, mais ce qui, à mes yeux, est évident, c’est qu’on est en présence d’un homme désarmant. Je veux dire par là que la lecture d’un livre comme Yoga devrait être agaçante, irritante, tant l’auteur est encombré de lui-même, et pourtant, curieusement, elle ne l’est pas. Cela tient, je crois, à cette conviction toute simple, mais pas si facile à rendre effective, dont, au détour d’une phrase, nous fait part l’écrivain à propos de la littérature : elle est, écrit-il, « le lieu où on ne ment pas. » Eh bien, j’en suis convaincu, la force du livre de Carrère vient de là, de cette volonté de ne pas mentir. Ce qui ne signifie pas, d’ailleurs, que l’auteur n’introduise jamais aucun élément de fiction dans son récit : il le fait parfois et s’en explique lui-même à la fin du livre, mais cela n’y change rien. Le livre de Carrère donne le sentiment, d’un bout à l’autre, d’être vrai !
Être vrai, cela signifie, entre autres, assumer ses propres contradictions. Car si Carrère se décrit volontiers comme un homme imbu de lui-même, ce qu’il nous raconte de lui nous parle aussi, et je suis sûr qu’il en conscient, d’un autre Carrère, d’un Carrère qui n’est incapable ni de bonté ni d’altruisme ni de transformation de soi. Yoga, qui devait être, à l’origine, un petit livre souriant, sans prétention, sur cette méthode de méditation pratiquée par l’auteur, se présente, en fin de compte, comme un ouvrage bien plus ambitieux, comme le récit d’un parcours conduisant du repli sur soi à l’ouverture aux autres en passant par des épreuves que l’on ne souhaite à personne au monde.
Tout commence donc par un stage Vipanassa, stage de yoga, auquel s’est inscrit l’écrivain dans le but, précisément, de nourrir, si l’on peut dire, le petit livre dont il a le projet. Même si l’on n’est pas soi-même adepte de yoga ou autre technique de méditation, les pages écrites sur le stage en question ne manquent pas d’intérêt. Elles nous rappellent, entre autres, qu’aux yeux des maîtres spirituels, tel Patanjali (mais Carrère nomme aussi Platon, Bouddha, Maître Eckhart et Thérèse d’Avila), ce qui compte, c’est de trouver la sortie « de ce pétrin qu’est la vie terrestre ». On peut d’ailleurs se demander s’il est judicieux d’avoir intégré Thérèse d’Avila à cette liste de noms, le christianisme, même vécu par les mystiques, ne prônant pas, contrairement au Bouddhisme, l’évasion du monde terrestre, de la condition humaine, de ce que les Orientaux appellent samsara. Carrère, lui, fort heureusement, exprime des doutes à ce sujet. À Patanjali qui estime que « rien ne mérite d’être connu sinon ce qui permet d’échapper à la condition humaine », Carrère est tenté de répondre qu’au contraire « mille autres choses méritent d’être connues. »
Cela est vrai, même si le chemin vers la connaissance, qui ne se pratique pas seulement avec du yoga, doit passer par de terribles épreuves. En l’occurrence, c’est pendant qu’il fait son stage Vipanassa que Carrère est informé de l’attentat de Charlie Hebdo au cours duquel a été assassiné un de ses amis, l’économiste Bernard Maris. Or il est demandé à Emmanuel Carrère de s’exprimer lors des funérailles. Comment prétendre encore, se demande-t-il, que le yoga et la méditation sont bons : « la teneur en vérité, écrit-il, est plus élevée chez Dostoïevski que chez le Dalaï-lama ». Mais la période d’épreuves ne s’arrête pas là, elle passe par ce qu’il y a de pire pour un individu, une dépression telle qu’elle le conduit au bord de la folie, dans un puits de ténèbres, dont il ne sort pas sans passer par quatre mois d’hospitalisation à l’hôpital Sainte-Anne où il subit, entre autres, des électrochocs. Il est d’ailleurs étonnant de lire ces pages sur la dépression, tant elles proposent une analyse pertinente de ce mal qui, pour Carrère, ne contredit nullement le propos du livre, bien au contraire. L’essai sur le yoga et l’autobiographie psychiatrique, explique-t-il, c’est le même livre : « comme du yin naît le yang ou du yang le yin », les deux n’étant plus complémentaires, chez le malade mental, mais ennemis.
En fin de compte, quand Carrère est tiré de ce cauchemar, ce n’est pas pour être débarrassé des ombres qui guettent volontiers les humains, mais c’est néanmoins pour élargir sa vision en participant à une mission, en Méditerranée, sur l’île de Léros, auprès de quelques-uns des migrants qui y sont rassemblés, ironie de l’histoire, dans les bâtiments d’un ancien hôpital psychiatrique. Les ombres, Carrère les retrouve non seulement chez des migrants qui ont risqué leur vie pour arriver jusque là, mais chez Frederica (qu’il appelle Erica), la jeune femme avec qui il travaille et qui, depuis qu’elle a fait un AVC, perçoit constamment une ombre qui semble la poursuivre sur le côté gauche de sa tête. Néanmoins, c’est à l’occasion de ce séjour à Léros que l’on entrevoit l’autre Carrère, celui qui est capable d’attention aux autres et non seulement à lui-même, celui qui ne se préoccupe pas seulement de son ego surdimensionné, mais aussi des autres, en l’occurrence de quelques migrants. Et qu’importe que sa bonne volonté soit parfois encombrée de maladresse ! Si, comme il le raconte en parlant de son éditeur, il se montre capable, à son âge, d’apprendre à taper avec ses dix doigts sur un clavier d’ordinateur plutôt qu’avec un seul, c’est aussi du côté du cœur ou, tout simplement, de son humanité, qu’il se révèle apte à devenir meilleur. « J’ai fait ce que j’ai pu, écrit-il, avec mes moyens et mes entraves, je me suis battu pour le faire, c’est un bilan qui n’est pas nul. Mais l’essentiel, qui est l’amour, m’aura manqué. J’ai été aimé, oui, mais je n’ai pas su aimer – ou pas pu, c’est pareil. » Sur ce point-là, sur ce constat, non, malgré la volonté de l’auteur de ne pas mentir, on n’est pas obligé de le croire. 8,5/10
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Message par poet77 »

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Tout n’a-t-il pas été écrit sur Venise ? Des écrivains, et pas des moindres, ont déjà arpenté cette ville pour ensuite livrer leurs impressions dans des ouvrages. Parmi eux, on notera particulièrement, parmi bien d’autres, Paul Morand (Venises – 1971) et, plus curieusement, Jean-Paul Sartre dans un de ses manuscrits laissés inachevés (La Reine Albemarle). Ces noms apparaissent sous la plume de Jean-Paul Kauffmann, surtout celui de Sartre, car de Morand, jugé décidément trop impassible, il s’est éloigné. D’autres noms surviennent également au fil du récit : celui d’Hugo Pratt, le célèbre créateur de Corto Maltese, qui était un passionné de Venise ou encore celui de Jacques Lacan, insatiable visiteur des églises de la Sérénissime dont il goûtait avec gourmandise l’apparat typiquement catholique ainsi que les nombreuses peintures (ne cessant « de les retourner pour leur donner un contenu nouveau et subversif », écrit Kauffmann).
Mais, encore une fois, venant après tant de visiteurs, que peut apporter d’innovant le livre de ce dernier ? En vérité, une fois qu’on l’a ouvert et qu’on a commencé à le lire, on ne se pose plus la question, tant Kauffmann, tout imprégné de son sujet et passionné par lui, parvient sans peine à nous entraîner, en quelque sorte, à sa suite. Son projet s’apparente d’ailleurs à celui qui motivait Lacan : non pas qu’il veuille, lui aussi, proposer des interprétations subversives des peintures à sujets religieux, mais, tout simplement, parce que, comme le célèbre psychanalyste, il s’est mis dans la tête d’entrer dans les églises de la ville dont les portes sont closes.
Or, des églises fermées, à Venise, il y en a à foison. Et Kauffmann comprend rapidement que réussir à y entrer n’est pas une entreprise des plus aisées. Il faut s’armer de patience, frapper aux bonnes portes, parlementer longuement, persévérer, compter aussi sur la chance, etc. Les églises fermées le sont pour des raisons diverses : « beaucoup (…) sont fermées à jamais, faute de prêtres et de fidèles. Certaines, menaçant ruine, soutenues par des étais, sont interdites pour des raisons de sécurité. Quelques-unes ont changé d’affectation. Elles sont transformées en musées, bureaux, entrepôts, appartements ou encore salles de spectacle », écrit-il.
Qu’à cela ne tienne ! Kauffmann, qui connut, en tant qu’otage au Liban, trois années d’enfermement (dont il est question, à quelques reprises, au fil de ces pages), n’a de cesse d’ouvrir les portes. Déterminé à entrer dans ces églises, à voir et à sentir (les odeurs, manifestement, ayant une grande importance pour lui), aidé, guidé par des personnes bienveillantes et assez nombreuses, il parvient à approcher divers responsables et à s’entretenir avec eux. Il s’agit, en particulier, de responsables d’Eglise, de monsignore et autres, avec qui il faut user de beaucoup de diplomatie.
Rassurons-nous, l’acharnement, mais aussi la patience, dont fait preuve le journaliste, portent leurs fruits. Kauffmann raconte de manière impressionnante les visites de quelques églises où il réussit à entrer (San Lorenzo, Santa Anna), églises abandonnées, quasi en ruine. Un monsignore lui a expliqué auparavant qu’étant donné les tarifs extravagants des restaurations de monuments à Venise, c’est par un choix délibéré que certaines églises ont été fermées et laissées à l’abandon. Au terme de son récit, Kauffmann se contente d’énumérer les noms d’autres églises où il a pu, en fin de compte, pénétrer. Car, l’intérêt du livre, ce n’est pas tant de nous parler de la réussite éventuelle du projet initial que de l’histoire même de la quête entreprise par l’auteur. « Depuis toujours, écrit Kauffmann, j’ai préféré le combat à la victoire ». Et, faisant référence aux aventures de Lancelot du Lac, il ajoute : « (…) la quête est préférable à la conquête ».
Et c’est vrai que, si cet ouvrage de Kauffmann s’avère passionnant pour le lecteur, c’est parce que la recherche entreprise par l’auteur lui fournit l’occasion de réflexions, voire de digressions, sur l’art et sur le catholicisme, y compris sur les rapports de l’écrivain lui-même avec la foi catholique inculquée depuis l’enfance. Ces pages, très belles, très pertinentes, expriment à merveille la complexité d’une emprise à la fois pesante et inspiratrice.
Si Jean-Paul Kauffmann excelle dans la description de sa quête vénitienne, c’est bien parce qu’il fait sentir autre chose que le plaisir (qui pourrait paraître masochiste) de pénétrer dans des églises plus ou moins en ruines. « Ces églises fermées, explique-t-il, portent très haut ce qu’il y a de plus indispensable, de plus réussi, de plus occulte et sans doute de plus spirituel dans la transmission du temps. Quelque chose qui se cache tout en se manifestant. La présence d’une absence. » 8,5/10
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