les effets/ l'essence de la musique

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Alex Blackwell
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les effets/ l'essence de la musique

Message par Alex Blackwell »

Je voudrais proposer quelques pistes de réflexion nées de mes écoutes de ce week-end.
On trouve souvent à lire sur les forums de discussion des topics intitulés "les musiques qui vous font pleurer"ou au contraire "la musique de la joie". Une conception de la musique en tant qu'instrument soumis au diapason de l'état d'âme conjoncturel de l'auditeur en quelque sorte.

Pourtant la finalité de l'art musical peut-êlle être considérée de manière aussi étroite?
Les hasards des croisements issus de mes choix musicaux de ce dimanche sont cet égard éloquent:

-une messe de David Volker Kirchner, dont j'ai déjà parlé sur ce forum: c'est une musique de la béatitude, de l'apaisement de l'âme. Des passages tels que le crucifixus ou le dona nobis pacem délivrent des angoissent et des tourments qui constituent la pature habituele de l'esprit humain. On ne peut même pas parler de sublime dans l'acception traditionnelle de ce mot, qui renvoie à un mélange de joie et de douleur. Ces passages, pris séparément, de la musique de Kirchner sont quant à eux totalement délivré de ce dernier aliage.
Cette conception de la musique correspond à la formule si éculée que l'on en a oublié le sens: la musique adoucit les moeurs. En des termes plus recherchés, il est possible de faire un parallèle avec la conception schopenhauerienne de l'art, destiné à procurer une consolation à l'esprit pris par le tourmlent dictatorial du vouloir-vivre.

-l'antithèse, la quatrième symphonie de Dimitri Chostakovitch, qui ne voulait pas adoucir les moeurs mais exprimer de manière beaucoup plus directe la douleur d'un homme. A cet égard, le fugato du premier mouvement, course à l'abîme hystérique fait de cordes transformées en lames de rasoir débouchant sur des tutti orchestraux évoquant des monstruosités sans nom.
Tels passages convient véritablement à la violence la plus extrême: on bascule dans une conception plus nietzchéenne de l'art, ne servant pas à exprimer de prétendus mondes idéaux et supérieurs au nôtre mais reflétant directement le chaos qui constitue l'essence du monde.

Où est la vérité s'agissant d'édicter des conceptions de l'art à prétention quelque peu philosophique?
On se rend compte que ces deux conceptions apparemment antinomiques prennnent leurs racines dans une même conception subjective de l'art: l'artiste crée des oeuvres qui reflètent ses exaltations, positives et négatives. Nous demeurons toujours dans le domaine de la sensation directe et de l'émotion et on revient au point de départ, à savoir un auditeur qui irait chercher dans la musique ce qu'il désire y trouver.Mais si l'on écoute de la musique, ce n'est pas pour s'y contempler mais bien pour "voir" autre chose.

Cet excès de subjectivité est quelque peu étranger à une oeuvre d'art idéalement conçue.
Aux deux philosophes précités, on oppose souvent un troisième nom, celui d'Emmanuel Kant, qui ne pensait pas du tout l'art en tant que vecteur d'émotion. Les règles établiées par ce penseur (l'art doit être sans concept, plaire universellement, répondrent à une finalité sans fin...et tout ce que chacun a appris en classe de terminale) débouchent sur un monde formel produit d'un jeu de l'esprit pur et entravé par aucune contrainte.
Système remarquable par sa conception d'une implacable rigueur logique mais aussi par cette capacité à s'extraire des modes communs de pensée pour trouver l'essence de la pensée la plus élevée.

Pourtant la musique se plie très difficilement à une telle analyse: l'oeuvre la plus ambitieuse de la musique occidentale, l'Offrande musicale, pourrait y correspondre par son absence de référence apparente et ses formes ne renvoyant qu'à elles-mêmes. Pourtant l'émotion est présente jusqu'à l'anévrisme en un espèce de mélande des deux conceptions, l'apaisement naissant de la violence et la violence de l'apaisement.

Cette richesse absolue ne permet donc pas de sortir des conceptions romantiques par lesquelles toute l'histoire de l'art est à présent décryptée.
L'émotion semble faire intrinsèquement patie du langage musical, alors que le domaine des arts de la représentation ont réussi à s'en délivrer. L'infini et terrifiant génie de Jean-Sébastien Bach aurait ainsi "échoué" là où Léonard de Vinci est parvenu, le premier étant prisonnier d'un art incapable d'exprimer l'essence du monde (qui n'a que faire d'émotion).

Voilà, mon souhait est de rassembler sur cette base les opinions de chacun sur les effets de la musique, ce qu'ils sont et ce qu'ils doivent être ainsi que sur ceux qu'ils ne peuvent être (heureusement ou malheureusement).
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Night of the hunter forever


Caramba, encore raté.
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Billy Budd
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Message par Billy Budd »

Je voudrais répondre mais je ne suis pas sûr de comprendre
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Message par Tuck pendleton »

Nikita a écrit :Je voudrais répondre mais je ne suis pas sûr de comprendre
moi aussi mais je répondrais que j'aborde la musique essentiellement de manière émotionnel, que je n'ai pas les connaissances et clés nécessaires pour apprècier toutes les richesses que cet art peut donner.
Toutefois la richesse et l'émergence d'idée dans une oeuvre musicale peut se ressentir, bien sûr.
Mais il est difficile pour moi de concevoir la musique (ou tout autre art) sans émotion.
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Billy Budd
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Message par Billy Budd »

Comparer Bach et De Vinci, le goût des carottes et du chocolat aussi ?

Contempler une toile de peintre, c'est voir exactement ce que l'artiste a représenté - je mets de côté l'altération des couleurs

Ecouter de la musique - je ne vise là que la "classique" - c'est déjà passer à travers de multiples prismes : une partition de Bach, ou d'autres, est je pense débarassée de l'émotion

Enfin, je n'ai personnellement aucun rapport d'analyse avec la musique et je me fous de savoir si ce qui me plaît dans tel passage est le ré mineur ou si une partition a été modifiée du là au sol pour faciliter le travail des chanteurs par exemple
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