Le polar français des années 50-60-70

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Rick Blaine
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Rick Blaine »

Kevin95 a écrit : • Un peu dur sur les comédies de Molinaro mais bon, ce n'est pas le sujet. J'ai de grosses lacunes vis à vis de ses premiers polars (et en général vis à vis des polars d'après-guerre), tous (ou presque) dorment paisiblement dans la pile (enfin pile...) de DVD à voir donc ça ne saurait tarder. A noter qu'il revient épisodiquement au genre dans les années 70 et plus précisément avec le très beau Les Aveux les plus doux, malheureusement peu aimé sur le forum.
Les Aveux les plus doux est tout de même beaucoup moins inspiré, en tout cas du point de vue de la forme, que ses trois premiers films. Ce n'est pas désagréable, mais c'est un peu mou et manque il me semble de personnalité.
Molinaro fera d'autres bonnes choses dans sa carrière (je cite souvent L'Amour en Douce que je trouve très touchant), mais du point de vue du polar, il me semble avoir tout donné ou presque avec ses trois premières œuvres, exploitant peut-être à ce moment là la chance qu'il avait de travailler sur de "petits" films. Dans la comédie pure je le trouve vraiment moins bon (à l'exception de l'emmerdeur peut-être), son cinéma comique me semble routinier et faible du point de vue du rythme.
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Kevin95
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Kevin95 »

Au jeu des comparaisons, j'avoue un manque puisque comme je l'ai dit je n'ai pas vu ses premiers films. Les Aveux les plus doux m'a touché, la construction en deux parties, en deux couples distincts (les amants post 68 et les deux flics ripoux) qui ne peuvent que s’entrechoquer est brillante. Pas encore vu Le Gang des otages qui, parait-il, est très proche de ce film.

Pour les comédies vous y allez fort, les De Funès tiennent rudement bien le coup, L'Amour en douce est sympa comme tout, La Cage aux folles (le premier hein !) est de la folie douce tandis que Mon oncle Benjamin, Le Téléphone rose ou Cause toujours... tu m'intéresses ! continuent à passer en boucle sur mon lecteur DVD (pi, j'aime bien Pour cent briques, t'as plus rien..., souvenir Ciné dimanche oblige).

Même ses films "autres" (L'Ironie du sort, L'Homme pressé et Le Souper) sont des réussites. 8)
Dernière modification par Kevin95 le 9 févr. 16, 16:44, modifié 1 fois.
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Père Jules
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Père Jules »

Je découvre l'existence des Aveux les plus doux. Je me mets en quête.
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Rick Blaine »

Kevin95 a écrit :Pas encore vu Le Gang des otages qui, parait-il, est très proche de ce film.
Ah oui, je l'avais oublié celui-là. Pour le coup c'est très réussi, assez proche effectivement des Aveux... pour son originalité narrative, mais nettement meilleur à tous point de vues il me semble. Un casting très audacieux et une superbe photo de Coutard. Il faut le voir celui là, grand polar.
Kevin95 a écrit : Pour les comédies vous y allez fort, les De Funès tiennent rudement bien le coup, L'Amour en douce est sympa comme tout, La Cage aux folles (le premier hein !) est de la folie douce tandis que Mon oncle Benjamin, Le Téléphone rose ou Cause toujours... tu m'intéresses ! continuent à passer en boucle sur mon lecteur DVD (pi, j'aime bien Pour cent briques, t'as plus rien..., souvenir Ciné dimanche oblige).
Je trouve que De Funès est beaucoup mieux exploité chez d'autres cinéastes. Oscar et Hibernatus, je trouve ça très terne. :oops:
Le Téléphone rose et Cause toujours... tu m'intéresses ! sont des films plaisants - et portés par des castings de qualités - mais ce n'est pas du très grand cinéma. Quant à La Cage aux folles, ça me fait beaucoup rire mais c'est franchement laid, mal rythmé, mal filmé,... Ca m'amuse mais c'est dur à défendre. :mrgreen:
Mon oncle Benjamin c'est à part, ce n'est pas une pure comédie. Mais c'est effectivement un très bon film.
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Supfiction »

Avec L'Amour en Douce on est loin du polar mais c'est un film que j'aime beaucoup également. Avant Quelques jours avec moi, l'association Marielle-Auteuil faisait déjà des merveilles.

Kevin95 a écrit :Serge Leroy est effectivement un cinéaste plus qu'estimable, c'est même (à mon sens) le meilleur "petit maitre" des seventies.
Le mataf, par exemple, ne m'a pas emballé plus que ça à vrai dire. Hormis le plaisir de voir Michel Constantin et Georges Géret et quelques têtes qu'on retrouve de film en film, j'ai trouvé que le scénario manquait un peu de lisibilité et de rythme dans sa seconde partie. On est clairement entré dans une période où l'action et la mise en valeur d'une tête d'affiche prend peu à peu le pas sur les grands numéros d'acteur (premier et seconds rôles) qu'affectionnait le public avec grandes envolées et répliques cultes des Blier, Gabin & co. Les dialogues se font plus naturels et plus secs (Melville poussera cette tendance à son paroxysme), la musique jazz disparait, les tournages en extérieurs ont remplacé le travail en studio, de même que la couleur supplante le noir et blanc enterrant de fait l'esthétique hérité du film noir. Mélodie en sous‑sol (1963) constitue probablement l'un des marqueurs importants entre deux périodes.

Le mataf s'inscrit pourtant dans la tradition des films de gangsters à l'ancienne qu'affectionnait Gabin. On est en territoire connu : des professionnels non violents, qui se connaissent depuis longtemps et sont amis même s'ils se méfient un peu les uns des autres (surtout lorsqu'il y a une femme au milieu) et qui se retrouvent confrontés soit à un flic soit à une bande rivale sans scrupule comme ici.

Michel Constantin fait définitivement partie des stars du genre dans les années 70, avant Claude Brasseur mais après les Raymond Pellegrin, Paul Meurisse, Robert Hossein, Constantine, avec Blier, Paul Frankeur, Robert Dalban, Serge Reggiani en embuscade .. mais pour s'assurer une longévité sur les écrans de télévision, il valait mieux avoir accès au carré magique Gabin, Lino puis Belmondo et Delon qui ont finit par épuiser et détourner le genre à leur profit.
Dernière modification par Supfiction le 9 févr. 16, 17:53, modifié 2 fois.
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Père Jules »

Sauf erreur de ma part, l'extraordinaire Mise à sac d'Alain Cavalier n'a pas encore été cité.
Pas un polar à proprement parler (quoi qu'il y a Michel Constantin dedans :mrgreen: ) mais un film de casse d'une intelligence et d'une efficacité rares. Du "sans gras" garanti qui possède un beau pouvoir de fascination. Dommage que le film demeure invisible dans des conditions décentes, car c'est vraiment le haut du panier.
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Major Tom »

Kevin95 a écrit :Pour les comédies vous y allez fort, les De Funès tiennent rudement bien le coup
Ah mais je suis d'accord, je ne dénigre absolument pas ses comédies ! Il savait donner du rythme (Oscar est pour moi un modèle de montage et de mise en scène, même si ça énervait apparemment De Funès que le réalisateur ne se contente pas de le filmer bêtement) et j'aime beaucoup Pour cent briques t'as plus rien. Seulement je ne les mettrai pas sur un pied d'égalité avec ses trois premiers films, même Oscar, en tout cas je te les conseille, tu peux y aller les yeux fermés. ;)
Pour Le Téléphone rose par contre, je ne sais pas comment tu arrives à le revisionner car, en dehors de la musique de Cosma, ce film est un ennui total pour moi. :oops:
Pas de souvenir des Aveux les plus doux par contre. Il faudra que je le revois, et sinon pas vu Le Gang des otages...
Julien Léonard a écrit :Concernant Big guns, c'est un film tout à fait déroutant. Pour qui n'est pas du tout habitué du polar italien des années 1970 (le Neo Polar), ce doit être assez incompréhensible. Les italiens en produisaient des caisses entières chaque année, à cette époque (je suis également très client, comme pour le giallo). Delon voulait : 1) S'imposer durablement sur le marché italien (ses films marchaient très bien là-bas -également en Espagne d'ailleurs-, il voulait donc tout naturellement y faire aussi quelques films : Le professeur, Zorro...) / 2) Surfer sur la vague de succès rencontrée par le genre Neo Polar à ce moment-là. Nous sommes ici bien plus proches d'un film de mafia (Di Leo et consorts) que d'un vrai polar urbain déjanté et raccroché aux années de plomb vécues dans la rue (allez, en vrac : Roma a mano armata, La rançon de la peur, Napoli violenta, Quelli della calibro 38, Le clan des pourris...).

En résulte un étrange compromis très riche, mais bouleversé par son scénario un peu trop cousu de fil blanc. C'est d'une linéarité confondante, sans la moindre surprise (ou presque). A l'inverse, cette linéarité joue beaucoup en faveur du ton du film et de sa sécheresse : la mélancolie y est magnifique (quelques plans sur le visage de Delon sont absolument stupéfiants, notamment autour de ses immortels yeux bleus sous lesquels une mer déchaînée s'agite) et l'action bien dosée. Les courses poursuites sont tournés dans la pure tradition italienne : mélange d'improvisation, de plans "uppercut", d'angles originaux et de prises de risques augmentant l'aspect "pris sur le vif" de la chose. C'est cruel, violent, rapide, sans compromis, et nanti de quelques nuances techniques démontrant bien que même le plus binaire des techniciens italiens possède toujours un savoir-faire audacieux et inventif.

On y croise ça-et-là quelques motifs du genre (femme maltraitée, voire torturée / tuerie hallucinante de violence dans une décharge de voitures / guns-fight en pleine rue avec victimes innocentes descendues à la volée...), mais aussi une distribution assez remarquable (quoique Roger Hanin y soit assez mauvais). Le film est bien davantage un polar italien à tendance mafieuse qu'un produit façon Delon. Et la preuve, parmi tant d'autres à l'époque, que Delon savait s'adapter à la nouveauté et à l’originalité de son sujet.

Ce n'est pas un chef-d'oeuvre, mais c'est un très bon film... peut-être un peu désincarné et en retrait si l'on songe à la production italienne du moment (plus dense, plus vive, plus sociale et plus dure, voire plus cohérente). En tout cas, un spectateur français qui découvrirait ce film, sans prévention quant au genre et à la manière, serait à coup sûr décontenancé, pour ne pas dire circonspect. Mais l'exercice demeure régulièrement brillant.
Kevin95 a écrit :Concernant Tony Arzenta - Big Guns, je fais partie du même gang d'amateurs du film (mais j'ai déjà dû l'écrire 1002 fois sur le forum). C'est Duccio Tessari à son meilleur, un peu mélancolique, un peu grisâtre. Le film peut se voir d'ailleurs en miroir de son Il ritorno di Ringo, même héro fatigué et même destin brisé.
:D

Merci Julien pour ton avis, et content de le rejoindre totalement.
Du point de vue de qualité des films, Delon a vraiment enchaîné des projets casses-gueules mais qui ont donné des films incroyables à cette période. Il tournait d'ailleurs à la même prédiode que Big Guns, l'année précédente plus exactement, son film qui restera peut-être comme le plus mélancolique, Le Professeur de Valerio Zurlini, où on retrouve Adalberto Maria Merli, le Minos de Peur sur la ville :mrgreen: et Delon et lui se retrouveront dans Le Gang de Deray que je n'ai pas vu pour le coup, sur le gang des Tractions Avant...
Père Jules a écrit :l'extraordinaire Mise à sac d'Alain Cavalier n'a pas encore été cité
Mmmh la liste des films à voir s'allonge. :P

Kevin95 a écrit :• Le distinguo entre Melville et Tarantino n'est pas très clair car le réalisateur français était aussi friand de citations directes : Crime Wave, The Asphalt Jungle ou City Streets.
Mon sentiment avec Melville a toujours été que, s'il recréait une galerie de personnages, de costumes et des environnements cinégéniques, les citations semblaient plus "indirectes" que Tarantino (un exemple comme ça, les dancings irréels du Samouraï et du Cercle rouge ressemblent à ceux de n'importe quel polar américain). Mais il y a certainement des citations directes qui m'ont échappé. Alors qu'avec Tarantino, c'est plus dur de ne pas penser à reconstituer tous ses films avec des extraits des films d'origine. :mrgreen: Reservoir Dogs, que j'aime beaucoup, a quand même des citations directes très évidentes. J'ai du mal à me retirer de la tête le Phil Karlson Kansas City Confidential (entre autres) quand je le vois. Cela aurait pu être pire si je connaissais comme Bruce Randylan les films asiatiques auxquels il reprend beaucoup...
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Rick Blaine
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Rick Blaine »

Père Jules a écrit :Sauf erreur de ma part, l'extraordinaire Mise à sac d'Alain Cavalier n'a pas encore été cité.
Pas un polar à proprement parler (quoi qu'il y a Michel Constantin dedans :mrgreen: ) mais un film de casse d'une intelligence et d'une efficacité rares. Du "sans gras" garanti qui possède un beau pouvoir de fascination. Dommage que le film demeure invisible dans des conditions décentes, car c'est vraiment le haut du panier.
Pas cité parce qu'il est très difficile à voir j'imagine.
Il est précédé d'une réputation extrêmement flatteuse en tout cas, et assez haut placé dans la liste des films que j'ai envie de découvrir.
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par kiemavel »

Major Tom a écrit :
Kevin95 a écrit :• Le distinguo entre Melville et Tarantino n'est pas très clair car le réalisateur français était aussi friand de citations directes : Crime Wave, The Asphalt Jungle ou City Streets.
Mon sentiment avec Melville a toujours été que, s'il recréait une galerie de personnages, de costumes et des environnements cinégéniques, les citations semblaient plus "indirectes" que Tarantino (un exemple comme ça, les dancings irréels du Samouraï et du Cercle rouge ressemblent à ceux de n'importe quel polar américain). Mais il y a certainement des citations directes qui m'ont échappé. Alors qu'avec Tarantino, c'est plus dur de ne pas penser à reconstituer tous ses films avec des extraits des films d'origine. :mrgreen: Reservoir Dogs, que j'aime beaucoup, a quand même des citations directes très évidentes. J'ai du mal à me retirer de la tête le Phil Karlson Kansas City Confidential (entre autres) quand je le vois. Cela aurait pu être pire si je connaissais comme Bruce Randylan les films asiatiques auxquels il reprend beaucoup...
Peut-être pas de décalques aussi directs que chez Tarantino mais le personnage du samouraï vient surement directement du tueur taciturne interprété par Alan Ladd dans le Tueur à gages de Frank Tuttle. The Asphalt Jungle...Le cercle rouge ? Pour Crime Wave, je ne vois pas trop, peut-être pour la rudesse, l'allure, les manières du flic interprété par Hayden …et surtout pour son cynisme qu'on retrouve peut-être chez certains flics de Melville ; Blot ? Je trouve que l'influence, s'il y a, est lointaine.
Rick Blaine a écrit :
Père Jules a écrit :Sauf erreur de ma part, l'extraordinaire Mise à sac d'Alain Cavalier n'a pas encore été cité.
Pas un polar à proprement parler (quoi qu'il y a Michel Constantin dedans :mrgreen: ) mais un film de casse d'une intelligence et d'une efficacité rares. Du "sans gras" garanti qui possède un beau pouvoir de fascination. Dommage que le film demeure invisible dans des conditions décentes, car c'est vraiment le haut du panier.
Pas cité parce qu'il est très difficile à voir j'imagine.
Il est précédé d'une réputation extrêmement flatteuse en tout cas, et assez haut placé dans la liste des films que j'ai envie de découvrir.
Pas si compliqué à voir mais comme dit plus haut, c'est du rip de vhs et de qualité assez médiocre.
Dernière modification par kiemavel le 9 févr. 16, 18:21, modifié 1 fois.
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Jeremy Fox »

Rick Blaine a écrit :
Père Jules a écrit :Sauf erreur de ma part, l'extraordinaire Mise à sac d'Alain Cavalier n'a pas encore été cité.
Pas un polar à proprement parler (quoi qu'il y a Michel Constantin dedans :mrgreen: ) mais un film de casse d'une intelligence et d'une efficacité rares. Du "sans gras" garanti qui possède un beau pouvoir de fascination. Dommage que le film demeure invisible dans des conditions décentes, car c'est vraiment le haut du panier.
Pas cité parce qu'il est très difficile à voir j'imagine.
Il est précédé d'une réputation extrêmement flatteuse en tout cas, et assez haut placé dans la liste des films que j'ai envie de découvrir.

Si je me souviens bien, c'est le premier film qui avait été programmé lorsque FR3 avait débuté l'ouverture de son antenne l'après midi dans le début des années 80 avec des programmes différents pour chaque région. Je l'avais vu à ce moment là et avais trouvé le film excellent.
Passionnant n'est-ce pas ?
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par kiemavel »

Jeremy Fox a écrit :
Rick Blaine a écrit : Pas cité parce qu'il est très difficile à voir j'imagine.
Il est précédé d'une réputation extrêmement flatteuse en tout cas, et assez haut placé dans la liste des films que j'ai envie de découvrir.

Si je me souviens bien, c'est le premier film qui avait été programmé lorsque FR3 avait débuté l'ouverture de son antenne l'après midi dans le début des années 80 avec des programmes différents pour chaque région. Je l'avais vu à ce moment là et avais trouvé le film excellent.
Passionnant n'est-ce pas ?
Oui parce que ça nous apprend qu'il fut un temps ou un film de Cavalier pouvait être diffusé en début d'AM sur France 3, maintenant c'est des séries policières allemandes :o
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Kevin95 »

kiemavel a écrit :Je trouve que l'influence, s'il y a, est lointaine.
Le personnage de Paul Meurisse dans Le Deuxième Souffle est complétement claqué sur celui de Sterling Hayden dans le De Toth, tout deux sont obsessionnels et cyniques (Melville va jusqu'à reprendre la cigarette écrasée). On retrouve aussi le cure-dent mâchonné de Crime Wave dans Le Doulos.
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Major Tom »

Ou les trench coat gris et fedora foncé de Bob le Flambeur, accoutrement certes commun dans le film noir mais qui évoque directement le Rick Blaine/Bogart de Casablanca. Toutefois, en dehors de quelques références ou "clin d'œil" que tu cites, et comme on en trouverait somme toute dans pas mal de films, je reste sur mon idée que le cinéma de Melville est un cinéma qui emprunte davantage aux codes et règles élémentaires appliquées par le cinéma noir américain depuis les années 30, qu'à des scènes précises de films en particulier comme le fera plus tard Tarantino. ;) C'est comme le western spaghetti. On croit reconnaître le décor et le costume, on sait ce qu'est un plan américain, mais au fond le cadre est récréé dans un pays européen, le style est différent (et outrancier), et ce qui est montré ne se réfère pas directement à des films précis puisque tous ceux qui précédaient le faisaient... Bon, on pourra toujours trouver quelques références directes (réfléchies ou non), mais ce n'est pas le plus important en somme. ;)
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Re: Le polar français des années 50-60-70

Message par Kevin95 »

Là tu définis le style Melville et je suis complétement d'accord avec toi. Je tiltais juste (comme un enc... de mouches) sur cette comparaison entre un Tarantino réutilisant les idées des autres et un Meville sans attaches visibles. Or certes, le cinéma de JP est moins ostensiblement cinéphile mais comporte tout de même pas mal de fétiches issus d'autres films.
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Des femmes disparaissent (1959)

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Ancien journaliste et intellectuel collaborationniste pendant l'Occupation (et qui fera de la prison à la Libération), spécialiste du verbe et de l'argot vieux Paris qu'il compilera dans un glossaire argotique, Albert Simonin est déjà un célèbre romancier en 1959, adapté au cinéma (souvent par lui-même au scénario et aux dialogues) et qui compte dans le panthéon littéraire de Molinaro. Le succès de librairie de son premier roman le lave de son passé et deviendra un film culte devant la caméra de Jacques Becker en 1954. Touchez pas au grisbi est aussi le premier opus d'une trilogie sur "Max le menteur" qui sera ensuite adaptée par Gilles Grangier en 1961 pour Le Cave se rebiffe (où le personnage de Max disparaît), et Georges Lautner en 1963 pour Les Tontons flingueurs (où Max devient Fernand) d'après Grisbi or not grisbi... Molinaro de son côté, supporte une critique mitigée à la sortie du Dos au mur, trouvant en lui un cinéaste techniquement bon mais qui n'a rien à dire, et assiste à un succès commercial modeste, pour dire ça poliment. Il tente d'enchaîner sur une adaptation des Demi-vierges d'après le roman de Prévost, avec Brigitte Bardot en tête pour le rôle principal, mais le projet est abandonné après le refus de l'actrice. On lui propose alors d'adapter Des femmes disparaissent, sur un scénario écrit par Simonin avec Gilles Morris-Dumoulin (l'auteur du roman d'origine). Molinaro saute naturellement sur l'occasion. Malheureusement, ses attentes sont loin d'être comblées. N'allons pas jusqu'à dire que le script lui tombe des mains, toutefois cette histoire sur la traite des Blanches sur fond de polar ne l'emballe pas beaucoup (voire pas du tout). Il juge le scénario très faible et l'histoire superficielle. Mais le score médiocre du Dos au mur au box-office, qui l'oblige plus ou moins à accepter le premier projet venu, et sa rencontre avec Simonin et les acteurs du film (Robert Hossein, Philippe Clay, Estalla Blain ou Magali Noël), ainsi que l'espoir de combler les "faiblesses" du script par une certaine stylisation visuelle, le boostent suffisamment pour réaliser Des femmes disparaissent...
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À Marseille, alors qu'il retourne chez lui, dans l'immeuble où vit également sa fiancée Béatrice (Estella Blain), Pierre (Robert Hossein) la surprend partant en catimini pour se rendre à une mystérieuse soirée. Il remarque aussi l'étrange voiture qui la suit, avec à son bord Tom (Philippe Clay) et Nasol (Pierre Collet), hommes de mains de Victor Quaglio (Jacques Dacqmine), caïd et trafiquant de femmes qui prépare un nouvel enlèvement... Le film démarre par un texte introductif un peu naïf de l'avocat Henry Torrès, où néanmoins le ton du film est donné : la volonté de départ n'est pas de "farder la vérité" mais de proposer ainsi une vision réaliste, bien que romancée, du sordide trafic de Blanches. Et c'est bien ce qui frappera le plus à la vision du film. C'est sec, violent, et parfois assez osé pour l'époque. Véritable défilé de décolletés plongeant et même de scènes relativement crues, comme la souvent évoquée flagellation torse nu de Magali Noël, le film amène à parler d'un sujet intéressant concernant le film noir français et la place de la femme dans le genre. Les femmes du titre ne sont en fait qu'un prétexte à raconter, avant tout, une histoire d'hommes, chère à Albert Simonin. À l'opposé de la figure emblématique de la "femme fatale" américaine, le cinéma français exploite surtout un personnage féminin au caractère niais, toujours un peu garce et souvent cruche. Certes, Le Dos au mur présentait un personnage de femme adultère, mais elle demeurait un personnage consistant (aidé par l'interprétation de Jeanne Moreau) et le plus attachant du film. Nul doute que l'aspect plus ou moins misogyne (bien que sauvé par le personnage de Magali Noël dans sa quête de rédemption) a un peu joué dans l'hostilité de Molinaro à l'égard de Des femmes disparaissent.
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Revenons justement sur le cas assez particulier de Molinaro, qui ne correspond en rien aux critères qu'on imaginerait chez un réalisateur de cinéma. Plutôt timide et gauche dans la vie, il a un manque d'autorité, une nature aimable et répugne à dépasser un nombre trop élevé de prises ou à contraindre ses acteurs, avec lesquels il préfère la diplomatie. Beaucoup ne prennent pas ce débutant très au sérieux. Les comédiens qui ont un réel besoin, nécessaire, d'affronter ou d'accepter une autorité persuasive pour les diriger et les obliger ainsi à donner le meilleur d'eux-mêmes, n'hésiteront pas à le lui faire savoir à l'avenir (certaines colères de stars qu'il se prendra dans la gueule deviendront cultes, avec De Funès, Delon sur le tournage de L'Homme pressé, Tognazzi...). Pire encore, il se trouve amateur et juge ne pas mériter sa place de metteur en scène, ce qui l'effraie depuis Le Dos au mur. Bref, c'est un réalisateur à l'aise ni dans son métier, ni avec le scénario qu'il s'apprête à tourner, qui se lance sur son second film. Il doit par ailleurs diriger Robert Hossein, un habitué du film noir en tant qu'acteur (Du rififi chez les hommes ou Série noire) comme en tant que réalisateur (Les salauds vont en enfer ou Pardonnez nos offenses), mais qui déteste les activités physiques "dangereuses", alors que son rôle exige qu'il se batte à plusieurs reprises et fasse quelques cascades... Vu comme ça, on aurait pu légitimement craindre le pire pour Des femmes disparaissent, heureusement la vision du film évapore n'importe quel doute, et la bénie "magie du cinéma" opérant évacue toute genèse mouvementée pour n'en garder que le résultat final : un film noir efficace à l'atmosphère sombre.
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Comme Becker ou Melville, Molinaro emprunte aussi des codes et motifs et affirmer une certaine proximité avec le film noir américain, dans l'apparence vestimentaire, la caractérisation ou les objets que possèdent les personnages. La bande de truands chargée d'enlever les jeunes femmes rapproche Des femmes disparaissent de la tradition communautaire du film de gangsters : une micro-société où les rapports sont régis par une hiérarchie que l'on craint, en l'occurrence Victor Quaglio, un leader jouissant d'un statut financier confortable et aux nombreux signes ostentatoires de richesse. Propriétaire d'une villa où il organise la soirée d'enlèvement, il n'hésitera pas à sacrifier ceux un peu trop maladroits (via son implacable et sarcastique tueur à gages Tom) et fera angoisser ceux qui osent arriver en retard à leur réunion. La fortune les sert pour mener à bien leur forfait, les caïds devant symboliser une réussite sociale respectable afin de séduire les jeunes femmes. On se retrouve donc entre gangsters impeccablement rasés, coiffés et sapés, en costard-cravate chic (à l'opposé du héros présenté d'emblée comme une sorte de jeune loubard, crasseux à force de mordre la poussière et de se prendre des roustes), et bien sûr on roule en bagnole américaine. "La première livrée en France" dira Coraline (épouse d'un des truands, mais d'abord associée de Victor comme il le rappellera, et qui est chargée d'amener les futures victimes dans le véhicule de son mari), autrement dit le haut de gamme dans la France des années cinquante.
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Jacques Dacqmine incarne correctement le rôle du dangereux caïd, mais c'est surtout intéressant de voir comment Molinaro lui donne toute sa force par le biais de sa mise en scène. Si son amateurisme critiqué par certains lui pose quelques problèmes, le cinéaste peut compter sur un allié important depuis Le Dos au mur pour lui donner de la crédibilité : le découpage technique détaillé, précis et sophistiqué qu'il se met en tête de suivre à la virgule. Devant Des femmes disparaissent, on peut voir de nouveau comment le jeune cinéaste a digéré la grande histoire du film noir qui le précède, ses influences des grands Maîtres, de Lang à Huston, en passant par Dassin et surtout Orson Welles. Le cinéaste choisit de positionner sa caméra au ras du sol, l'enterrant même, pour obtenir des plans avec des comédiens filmés sur fond de plafond, les plaçant en dominateurs et ainsi multiplier l'impression de puissance chez eux.
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Molinaro s'essaie même à des effets visuels comme le split-focus (cette technique optique qui sera chère à De Palma plus tard, visant à adapter une lentille coupée en deux à la caméra, et permettre d'obtenir une mise au point à la fois sur un plus près et sur un plan plus éloigné de la caméra), par deux fois avec le personnage de Victor :
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L'utilisation des travellings ou des zooms viennent compléter les arguments artistiques d'un film meilleur que n'en dira Molinaro, qui l'a toujours considéré comme un simple roman de gare travesti en thriller, et un film oubliable. Pourtant l'histoire de Morris-Dumoulin et Simonin propose tout de même de bons rebondissements, d'excellents dialogues signés Simonin, une splendide photographie nocturne de Robert Juillard, ou une pléiade de comédiens inspirés et parfois énergiques. Au rayon des bonnes surprises, il est évidemment impossible de ne pas citer l'interprétation savoureuse de Philippe Clay dans le rôle de Tom, le tueur faisant simplement son boulot comme il le dit, mâchouillant continuellement du chewing-gum. De plus, il se paie les meilleures répliques du film et vole logiquement la vedette à un Robert Hossein sobre et parfois un peu trop effacé, mais je chipote. Il faut aussi noter la bande-son jazzy signée par Art Blakey et les Jazz Messengers, qui ont improvisé sur les images du film (Molinaro en parle dans ce court interview).
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Dernière modification par Major Tom le 10 févr. 16, 23:32, modifié 1 fois.
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