Claude Autant-Lara (1901-2000)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Jeremy Fox
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Jeremy Fox »

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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Supfiction »

Jeremy Fox a écrit : 17 mai 21, 08:52 Lettres d'amour par Justin Kwedi
Il n’y a pas de blu ray prévu ?
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par 35-70 »

Pourra-t-on un jour, mais quand ?, voir "Les régates de San-Francisco" coproduction franco-italienne avec Columbia..... Autant dire le peu d'espoir de voir un jour une édition pour ce titre !!!!!!
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Commissaire Juve
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Commissaire Juve »

Jeremy Fox a écrit : 17 mai 21, 08:52 Lettres d'amour par Justin Kwedi
UP ! (si l'on peut dire)

Je l'ai "enfin" découvert en DVD à la demande.
Vieux motard que jamais !
J'ai trouvé ça frais, très sympa.
C'était vraiment très intéressant. Ti-du-di Ti-du-di Tuuuu !
Demain, je me referai "Douce" (plus sombre).
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Commissaire Juve
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Commissaire Juve »

Commissaire Juve a écrit : 24 févr. 22, 17:46
Demain, je me referai "Douce" (plus sombre).
C'est fait... Grosse surprise dans la mesure où j'avais oublié la conclusion !!! :o (je gâtouille)
Je n'avais PAS oublié le :
Tu es payé pour donner les leçons ou en recevoir ?
... instit oblige. Mais la fin, euh... :o
Sauf la dernière réplique de Marguerite Moreno (qui m'est revenue in-extremis).
Commissaire Juve a écrit : 24 févr. 22, 17:46 (plus sombre).
Indeed.

Quoi qu'il en soit : joli personnage (jolie Odette surtout) qui -- par certains côtés -- n'est pas
sans rappeler la Claudine de Colette (dont je viens de lire "Claudine à Paris") ; mais en mode hétéro.

Cela dit, à un moment, je me suis dit que le film aurait pu s'intituler "Irène" (tant le personnage
de Madeleine Robinson occupe le devant de l'écran).
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Commissaire Juve »

Je me suis refait Le Mariage de Chiffon (en BLU).
Eh bien... surprise ! Je me suis relativement emm*** ! :o
Je connaissais, mais ce n'était pas mon jour.

Je préfère de loin Lettres d'amour et Douce
(que je pensais "antérieurs" au "Mariage" d'ailleurs ; faut croire que
la formule Autant-Lara / Odette Joyeux était encore en rôdage).
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Thaddeus
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Thaddeus »

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Douce
Paris, 1887. Illustrant la lutte des classes avec une férocité sarcastique, Autant-Lara confronte l’hypocrisie morale des possédants et l’appétit de vivre des serviteurs. Son venin est d’autant plus corrosif qu’il se distille de l’intérieur, dans un double mouvement de haine et de fascination qui fait songer au mot de Jules Renard : "L’horreur des bourgeois est bourgeoise." Et c’est bien cette ambigüité de point de vue, cette sourde connivence avec la société qu’il dénonce qui assurent la force et l’intérêt du film, lui évitant d’être figé dans un discours politique univoque : de Douce, prise au piège de son rêve idéaliste, à la vieille comtesse, gardienne arrogante des tables de la Loi, tous les personnages sont mus par une primauté de l’instinct qui réduit à néant les chimères romantiques ou les projets d’ascension sociale. 4/6
Top 10 Année 1943

Le diable au corps
Deux ans après la fin du conflit, alors que le cinéma exalte la résistance et la victoire, le film provoque un scandale : on y voit la jeune héroïne, mariée à un soldat qu’elle n’aime pas, se réjouir de la suppression des permissions de son époux, et le héros lancer "C’est trop facile, la guerre !" à ces bons Français hypocrites. Mais la dénonciation des conventions et du conformisme ne vire jamais à l’aigreur, aucun personnage n’est enjolivé ou caricaturé. Surtout, l’œuvre étreint par sa vérité des sentiments, sans chercher à justifier, condamner ou faire triompher une thèse. Il rappelle qu’au sein des drames collectifs il est des drames personnels aussi grands, et que le jour de la victoire il y a une place pour le désespoir. Toute de grâce, de fragilité, de sensibilité, Micheline Presle est particulièrement émouvante. 5/6
Top 10 Année 1947

L'auberge rouge
On sait que le film fut en son temps condamné pour excès de richesse et valeurs non déclarées. C’est qu’en effet les suggestions et les intentions y abondent, tout comme les genres : parodie de mélodrame, farce fernandelesque, conte philosophique, naïve histoire d’amour et poème sulfureux assaisonné à l’humour macabre. S’il ose le contact sans transition de tonalités comiques bien différentes, c’est pour conduire la gamme du sourire à l’éclat rabelaisien, en passant par cette sorte de rire qui ne ressemble à rien d’autre qu’au désir de mordre. Truculent, joyeusement amoral et jovialement anticlérical, il témoigne des tempéraments d’affreux jojos de son réalisateur et de ses scénaristes, experts en situations cocasses et en répliques dérangeantes, ravis aussi de considérer l’assassinat comme l’un des beaux-arts. 4/6

La traversée de Paris
"Jambier, je veux deux mille francs, Jambier, 45 rue Poliveau !" Tout le monde connaît. Historiquement, cette comédie noire est l’un des premiers films à évoquer les petits côtés de la France occupée, à rebours de l’imagerie héroïque qui sera de mise les années suivantes. Les tribulations d’une valise pleine de cochon y activent le tableau sinistre d’un pays en proie aux démissions et aux compromissions, aux minables combines, à la trouille généralisée, qui opère une salubre remise en question du comportement de tous et dont chaque réplique sonne comme un caustique règlement de comptes. La saveur de l’anecdote, les recherches de stylisation du décor et la présence des acteurs, dont les rôles sont taillés dans l’étoffe d’une robuste humanité, achèvent de justifier sa réputation de classique du répertoire. 4/6

En cas de malheur
On dit souvent du (bon) cinéma de papa qu’il est d’abord affaire de scénario. De fait, Aurenche et Bost savent ici rester parfaitement fidèles à l’œuvre de Simenon, dégager ses lignes de force et leur donner une expression cinématographique. Pour raconter cette histoire d’amour entre un homme mûr, arrivé mais secrètement las de son existence, et une belle jeune femme ni méchante ni perverse, inconsciente plutôt, cherchant à tâtons comme un petit animal son bonheur et sa tranquillité, le cinéaste s’appuie sur une armature psychologique sans faille, une construction rigoureuse, un dialogue souvent heureux. De là l’impression de voir un film solidement exécuté mais auquel il manquerait l’étincelle du spontané, du chaleureux, du déraisonnable – cet élan créateur qui aurait pu transcender sa facture. 4/6


Mon top :

1. Le diable au corps (1947)
2. Douce (1943)
3. L'auberge rouge (1951)
4. La traversée de Paris (1956)
5. En cas de malheur (1958)

Personnalité assez sulfureuse que celle de Claude Autant-Lara, notamment du fait de ses accointances politiques : d’anarchiste de gauche, il semble qu’il ait viré à l’extrême-droite sur la fin de sa vie. On a dit de son œuvre qu'elle relevait de la "qualité française" (celle des Henri Jeanson, des Jean Delannoy, des Gilles Grangier) contre laquelle la Nouvelle Vague s’élèvera avec véhémence. Mais le peu que j'en connais est surtout traversé par une verve, une ironie, une acuité dans l’analyse sociale et psychologique qui infirment un tel jugement.
Dernière modification par Thaddeus le 21 janv. 24, 21:24, modifié 1 fois.
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Supfiction »

Commissaire Juve a écrit : 22 janv. 17, 23:07
Jeremy Fox a écrit :Le Blé en Herbe - 1954

... dans ce film des années 50 dont je comprends parfaitement qu'il ait pu faire scandale à l'époque...
Et même quand je l'ai découvert ! Je ne parlerai pas de "scandale", mais j'ai trouvé ça hautement déplaisant. Comme je l'ai déjà écrit ailleurs, la cougar de 47 balais (mais qui en fait 55) qui s'offre un vertige sensuel avec un puceau de 16 ans, euh ! Yiiik !
Comme quoi metoo inceste ou pas n’a rien à voir là dedans, les clivages sur la question étaient déjà là depuis longtemps.
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par 35-70 »

Et toujours inédit un autre film de Claude Autant-Lara qui a suscité le scandale et a été interdit dans de nombreuses villes.
Les régates de San-Francisco, avec Laurent Terzieff, Danièle Gaubert, Suzy Delair et Folco Lulli.
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Courleciel »

Rétrospective Claude Autant-Lara à la Thèque fin 2023 début 2024
"- Il y avait un noir a Orly, un grand noir avec un loden vert. J'ai préféré un grand blond avec une chaussure noire a un grand noir avec un loden vert
- Dites-moi, mon petit vieux, pour faire de la littérature, attendez la retraite. Bonne appétit."
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Courleciel »

Rétrospective Claude Autant-Lara à la Thèque 7 février au 4 mars 2024
https://www.cinematheque.fr/cycle/claud ... -1202.html
"- Il y avait un noir a Orly, un grand noir avec un loden vert. J'ai préféré un grand blond avec une chaussure noire a un grand noir avec un loden vert
- Dites-moi, mon petit vieux, pour faire de la littérature, attendez la retraite. Bonne appétit."
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Supfiction »



Je visionne en ce moment..
Le doute subsiste sur ces convictions relatives à son esprit de contradiction, j’ai l’impression.
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par bruce randylan »

Les régates de San Francisco (1960)

Quasi invisible depuis sa sortie, réputation exécrable (4.7 sur imdb !), un réalisateur qui fait retirer son nom du générique, l'auteur du roman très sévère, une censure horrifiée... et au final, ce film de Claude Autant-Lara est loin de la catastrophe annoncé. C'est même plutôt pas mal du tout, notamment la première moitié qui possède une fraîcheur et une liberté de ton tout à fait plaisante pour une interprétation globale assez naturelle de surcroit (y compris de Laurent Terzieff dont je suis assez peu client). Il y a des passages, des échanges et des situations qui ne manque pas de saveur comme Terzieff épié sous sa douche, Danièle Gaubert qui voudrait se faire plus adulte qu'elle ne l'est alors que son immaturité est souvent désarmante. Le tout est écrit certes avec une certaine crudité sans pour autant tomber dans la vulgarité ou le mauvais, y compris tout le "fameux" passage autour d'une culotte perdue puis retrouvée qui déchaîna la censure.
Le film possède beaucoup de thèmes et d'idées encore pertinents comme la candeur sentimentale des pré-adolescents, la condition des femmes étouffées par le puritanisme, l'envie de s'échapper d'un certain carcan sociétal traduit ici par le cadre assez étriqué d'un décor quasi unique (2 maisons voisines sur un port, séparées par un petit canal) ou la perte de l'innocence. Par moment, on peut même évoquer une réelle justesse tel le désarroi du plus jeune garçon, un peu perdu entre un père absent (car vivant aux USA à qui il imagine une carrière brillante), une mère volage et un amour pour une voisine plus âgée (mais guère plus mature donc) qui s'amuse à le ridiculiser voire humilier.
En revanche, le traitement et la narration manquent clairement de développement avec ses 75 petites minutes au compteur qui se ressentent surtout dans le dernier tiers franchement précipité, et aux ficelles trop visibles (la fameuse théorie du fusil de Tchekhov) pour une conclusion tragique mal amenée et peu satisfaisante.

Pour le coup, j'ai beaucoup pensé durant la projection que ce scénario était davantage dans les clous de Julien Duvivier et j'ai parfois pensé au Paquebot Tenacity avec ses envies d'une nouvelles vies qui se termine dans l'amertume et la gravité. Et puis Duvivier (peut-être pas à ce stade de sa carrière celà dit) aurait dynamisé par sa mise en scène ce décor dont le potentiel n'est que très rarement mis en valeur. A ce titre, Autant-Lara ne fait pas grand chose de son cinémascope alors que ses 2 maisons pouvaient permettre beaucoup de variations de cadrages, de mouvement de caméra et de profondeur de champ. Précisons quand même que l'utilisation de la couleur et le tournage en extérieur évitent tout de même de sonner trop théâtral.
Enfin, dernier point négatif à signaler : l'acteur italien Folco Lulli qui fait un peu tâche au milieu, pas vraiment valorisé par sa voix française.

Ca fait certes un certains nombres d'aspects frustrants mais ce film ne mérite absolument pas ce purgatoire dans lequel il est tombé. Car si on peut en effet parler de frustrations, le terme de "ratage" n'est pas du tout justifié.


Autre rareté très peu vue depuis sa sortie, surtout sous sa forme d'origine : Tu ne tueras point (1961)
Pour celui-ci, sa situation devrait s'améliorer puisqu'il a été restauré cette année et en collaboration avec Tamasa donc vraisemblable qu'une ressortie et/ou une exploitation en vidéo suivent.

Pour le coup, le film jouit d'une bonne réputation (7.7 sur imdb pour ce que ça veut dire) mais le résultat est tout aussi frustrant ; mais pour d'autres raisons.
C'est déjà trop long (2h10) et des enjeux qui ne reposent pour ainsi dire que sur des dialogues, parfois redondant et sur-explicatif, avec des passages qui ne sont pas loin des tunnels avec les stabilo boss placé juste à côté des stylos lors de l'écriture.
Pas franchement convaincu non plus par Laurent Terzieff, trop rigide et monolithique dans son interprétation pour un niveau d'expression plus que réduits. Le reste du casting n'est pas foncièrement mieux au passage mais il faut dire que Claude Autant-Lara qui croyait beaucoup à ce scénario n'a réussi à le concrétiser qu'en le tournant en Yougoslavie avec un casting en grande partie locale pour une post-synchronisation qui ne sent beaucoup trop, accentuant la dimension démonstrative des thèmes.
C'est d'autant plus dommage qu'on sent une réelle sensibilité et un ton personnel, avec plusieurs idées intéressantes (les touches d'humour dans la présentation de l'armée, une volonté de nuancer la caractérisation des officiers, un refus du manichéisme). On peut pas nier que les thèmes sont également courageux et louables pour l'époque, ni que certaines questions demeurent d'actualité avec le retour de conflits militaires majeurs : objecteur de confiance, rapport à la hiérarchie, morale face aux institutions...
J'aurais du bien voulu vibrer et assister à des réelles joutes verbales aussi denses que déstabilisantes ou tout simplement être émue par la conviction et les doutes des 2 personnages principaux mais la sauce ne prend qu'épisodiquement : le flash-back avec le prêtre soldat qui pour ne manque pas force, Laurent Terzieff se rendant compte qu'on veut le faire passer pour un déséquilibré mental pour que l'armée s'en débarrasse sans faire de vague, la rencontre avec la mère en prison ou quand des ecclésiastiques discutent sur l'ordre de passage lors du double procès qui cache toute une série de stratégies, pour ne pas dire de manipulation en orientant au préalable les débats.
Des moments intéressants, touchants ou troublants, mais noyé dans un enrobage "Dossier de l'écran".
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Courleciel »

bruce randylan a écrit : 8 mars 24, 12:09 Les régates de San Francisco (1960)

Quasi invisible depuis sa sortie, réputation exécrable (4.7 sur imdb !), un réalisateur qui fait retirer son nom du générique, l'auteur du roman très sévère, une censure horrifiée... et au final, ce film de Claude Autant-Lara est loin de la catastrophe annoncé. C'est même plutôt pas mal du tout, notamment la première moitié qui possède une fraîcheur et une liberté de ton tout à fait plaisante pour une interprétation globale assez naturelle de surcroit (y compris de Laurent Terzieff dont je suis assez peu client). Il y a des passages, des échanges et des situations qui ne manque pas de saveur comme Terzieff épié sous sa douche, Danièle Gaubert qui voudrait se faire plus adulte qu'elle ne l'est alors que son immaturité est souvent désarmante. Le tout est écrit certes avec une certaine crudité sans pour autant tomber dans la vulgarité ou le mauvais, y compris tout le "fameux" passage autour d'une culotte perdue puis retrouvée qui déchaîna la censure.
Le film possède beaucoup de thèmes et d'idées encore pertinents comme la candeur sentimentale des pré-adolescents, la condition des femmes étouffées par le puritanisme, l'envie de s'échapper d'un certain carcan sociétal traduit ici par le cadre assez étriqué d'un décor quasi unique (2 maisons voisines sur un port, séparées par un petit canal) ou la perte de l'innocence. Par moment, on peut même évoquer une réelle justesse tel le désarroi du plus jeune garçon, un peu perdu entre un père absent (car vivant aux USA à qui il imagine une carrière brillante), une mère volage et un amour pour une voisine plus âgée (mais guère plus mature donc) qui s'amuse à le ridiculiser voire humilier.
En revanche, le traitement et la narration manquent clairement de développement avec ses 75 petites minutes au compteur qui se ressentent surtout dans le dernier tiers franchement précipité, et aux ficelles trop visibles (la fameuse théorie du fusil de Tchekhov) pour une conclusion tragique mal amenée et peu satisfaisante.

Pour le coup, j'ai beaucoup pensé durant la projection que ce scénario était davantage dans les clous de Julien Duvivier et j'ai parfois pensé au Paquebot Tenacity avec ses envies d'une nouvelles vies qui se termine dans l'amertume et la gravité. Et puis Duvivier (peut-être pas à ce stade de sa carrière celà dit) aurait dynamisé par sa mise en scène ce décor dont le potentiel n'est que très rarement mis en valeur. A ce titre, Autant-Lara ne fait pas grand chose de son cinémascope alors que ses 2 maisons pouvaient permettre beaucoup de variations de cadrages, de mouvement de caméra et de profondeur de champ. Précisons quand même que l'utilisation de la couleur et le tournage en extérieur évitent tout de même de sonner trop théâtral.
Enfin, dernier point négatif à signaler : l'acteur italien Folco Lulli qui fait un peu tâche au milieu, pas vraiment valorisé par sa voix française.

Ca fait certes un certains nombres d'aspects frustrants mais ce film ne mérite absolument pas ce purgatoire dans lequel il est tombé. Car si on peut en effet parler de frustrations, le terme de "ratage" n'est pas du tout justifié.
Je l'ai vu à la thèque. C'est quand même pas terrible mais si c'est moins pire que prévu.
"- Il y avait un noir a Orly, un grand noir avec un loden vert. J'ai préféré un grand blond avec une chaussure noire a un grand noir avec un loden vert
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Re: Claude Autant-Lara (1901-2000)

Message par Watkinssien »

bruce randylan a écrit : 8 mars 24, 12:09 Les régates de San Francisco (1960)

Quasi invisible depuis sa sortie, réputation exécrable (4.7 sur imdb !), un réalisateur qui fait retirer son nom du générique, l'auteur du roman très sévère, une censure horrifiée... et au final, ce film de Claude Autant-Lara est loin de la catastrophe annoncé. C'est même plutôt pas mal du tout, notamment la première moitié qui possède une fraîcheur et une liberté de ton tout à fait plaisante pour une interprétation globale assez naturelle de surcroit (y compris de Laurent Terzieff dont je suis assez peu client).
Tout à fait d'accord!
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