A Ghost Story (David Lowery - 2017)

[Dunn]

Il est des films, parfois, qui donnent l'impression d'avoir été créés spécialement pour soi. Des films qui nous touchent au plus profond de notre être et de notre coeur, des films qui donnent l'impression qu'ils pourraient nous accompagner toute notre vie. C'est une sensation rare, mais elle arrive. La dernière fois, c'était il y a une quinzaine d'années, en redécouvrant Les Choses de la Vie. J'avais eu le sentiment que le film me parlait directement et évoquait des choses intimes enfouies au plus profond de moi.

Eh bien grâce à David Lowery, j'ai pu revivre cette sensation pour la 1ère fois depuis ma redécouverte du film de Sautet. En abordant des thèmes comme le deuil, le temps qui passe, l'héritage et ce que l'on va laisser de soi sur Terre quand on ne sera plus là, Lowery est parvenu à me chambouler comme rarement, tant il touche à des sujets qui me bouleversent déjà pas mal en temps normal. Alors quand c'est fait avec autant de douceur et de beauté, vous pouvez imaginer dans quel état m'a laissé le film.
C'est bien simple : au bout de 15mn, j'étais déjà en larmes face à la puissance évocatrice des images, mêlée à une BO somptueuse de délicatesse signée Daniel Hart.
Ce plan, cette séquence, mon dieu que c'est beau...



Le coup de génie de Lowery, c'est de prendre une image ultra connue du cinéma fantastique, qui à l'origine est là pour générer de l'effroi, et d'en faire une figure d'une tristesse infinie, subissant l'inéluctabilité du temps qui passe et la douleur de ne plus voir l'être aimé, et ce dans la solitude la plus absolue. Car c'est là l'autre coup de génie du film : traiter non seulement de la solitude de ceux qui restent, mais aussi et surtout de ceux qui partent (mais qui restent malgré tout).

En tout cas, ce qui risque de ne pas partir, c'est ce sentiment mêlé de plénitude et de chagrin que j'ai eu en sortant de la salle, cette impression d'avoir vu un chef-d'oeuvre total, existentiel et terrassant, qui m'aura touché droit au coeur et qui, sans mauvais jeu de mots, risque de me hanter très très longtemps.

"- J'attends quelqu'un
- Qui ?
- Je ne m'en souviens plus..."

C'est à peu de chose près ce que j'ai ressenti aussi en voyant ce chef d'oeuvre !!

[Jeremy Fox]

Ben ça fait sacrément envie !

[Flol]

Joyeux Noël !

Ok.

[Thaddeus]

Très bel avis, Flol. C'est toujours émouvant de voir un spectateur enthousiasmé et bouleversé à ce point par un film.

Pour ma part, et comme d'autres l'ont exprimé avant moi, ce n'est qu'au sortir demi-heure assez fastidieuse que j'ai commencé à adhérer vraiment au projet de Lowery. Le systématisme des plans longs et appuyés, leur lenteur calculée ont dans un premier temps constitué autant de paramètres d'une approche frisant la pose, qui a failli avoir raison de moi. Ce n'est qu'à compter de l'instant où le récit délaisse la thématique du deuil de la survivante pour se recentrer sur celle du rapport au temps (ou pour le dire autrement : le moment où Rooney Mara disparaît) que le film m'a agrippé. L'inventivité stimulante du montage fait alors éprouver assez brillamment les stases mélancoliques de la condition qui est celle du disparu, du fantôme, condamné à errer en ce lieu irréductible aux contingences d'une existence humaine. Je me serais bien passé de la scène superflue où le gars pérore devant ses amis sur l'infinité du temps et de l'espace et la finitude du genre humain, qui verbalise inutilement la métaphysique du film, mais A Ghost Story me laisse sur une impression globalement positive. Une oeuvre étrange, originale, audacieuse, frisant le ridicule mais l'évitant toujours avec une habileté de funambule, et que l'humilité préserve constamment de l'emphase.

[ed]

le gars

Will Oldham, alias Bonnie Prince Billy, tout de même

[Thaddeus]

C'est vrai, maintenant que tu le dis. Que l'on voyait dans Old Joy de Kelly Reichardt.

[Jack Carter]

où le gars pérore devant ses amis sur l'infinité du temps et de l'espace et la finitude du genre humain, qui verbalise inutilement la métaphysique du film,

le gars, c'est le chanteur Will Oldham
Globalement d'accord avec Thaddeus (et meme note d'ailleurs). En ce qui me concerne, typiquement le genre de film qui distille lentement son "venin" dans mon esprit et pourrait etre reevalué à la hausse dans quelques temps.

[Jack Carter]

C'est vrai, maintenant que tu le dis. Que l'on voyait dans Old Joy de Kelly Reichardt.

Et jeune dans l'excellent Matewan de John Sayles (voila le genre de titre que je reve de voir edité en video chez nous)

[Demi-Lune]

Je me serais bien passé de la scène superflue où le gars pérore devant ses amis sur l'infinité du temps et de l'espace et la finitude du genre humain, qui verbalise inutilement la métaphysique du film

Séquence irritante, en effet...

[Flol]

Non.

[Mosin-Nagant]

J'écoute l'ost en boucle depuis quelques jours.

[Flol]

[Boubakar]

Je n'ai pas vu le film, mais y a-t-il une raison particulière (je veux dire, au niveau de l'histoire par exemple) pour que l'image soit en 1:33 ?

[AtCloseRange]

Spoiler (cliquez pour afficher)

[Thaddeus]

Ah te revoilà toi.
Il me semblait bien ressentir comme une présence...