Amis depuis la plus tendre enfance, Vincent, François, Paul et Armand, tous la cinquantaine, se retrouvent chaque dimanche à la campagne. Au quotidien, chacun connaît quelques déboires sentimentaux. Mais lorsque Vincent est victime d'une crise cardiaque, ses amis prennent conscience de l'importance de leurs problèmes.
La chronique du site par Philippe Blaine.
Johnny Doe a écrit : ↑28 juil. 04, 23:14Une fois encore j'admire cette élégance et cette rigueur dans la réalisation. Le casting fabuleux sert à merveille cette tranche de vie entre nostalgie, durs moments et gloires éphémères. C'est toujours aussi finemment écrit et dialoguer (particulièrement les disputes implicants Reggiani et Piccoli qui m'ont marqués par leu piquant). Tout fonctionne à merveille et, une fois encore, respire une véritable sincerité. Une bande de copain qui se remet en question, ils mûrissent, voient les choses autrements, sont bousculés dans leur monotonie. Le point d'orgue du film qui m'a véritablement impressionné est le combat de boxe. J'en ai vu de la boxe dans les films, je suis un fan absolu de Raging Bull et bien je dois vous dire que j'ai rarement ressentit une telle intensité dans la violence brute de ce sport. Depardieu est grandiose et le travail posé de Sautet, cette mise en scène cru se livrant aux acteurs prend aux tripes, si bien qu'on frémis, rigole, s'effondre au fil des coups. Encore une fois, un merveilleux moments.
Guybrush Threepwood a écrit : ↑25 oct. 04, 17:47Un film qui m'a beaucoup touché, les acteurs jouent à merveille et je me suis vite senti proche de cette galerie de personnages.
Je retiens particulièrement la très belle voix off lors d'un passage du film. Sautet a l'air de particulièrement bien utilisé ce procédé (je n'ai vu que César et Rosalie de lui sinon)
Alligator a écrit :Les femmes sont au spectacle, aiment les hommes tels qu'il sont, du moins certaines essayent-elles. D'autres s'en lassent, avec tristesse, d'autres encore ne comprennent toujours pas. Peu agissent. Aucune ne parvient à briller autant que ces astres mâles, alors elles fuient.
Gérard Depardieu est un Jean plus effacé que ses compères, plus jeune il est vrai. Comme pour les femmes, son caractère a du mal à s'imposer, à s'extérioriser.
Les femmes parlons-en, elles sont plus spectatrices. Se faisant, difficile d'en détacher une plus qu'une autre. Stéphane Audran, toujours aussi belle et énigmatique est une femme statue qui regarde avec affection, tristesse et lassitude le canard de plus en plus boiteux Montand. Elle allie mystère et désolation dans son regard.
Antonella Lualdi est une actrice que je ne connais pas du tout. Ici elle est amoureuse de son Paul (Reggiani) et l'entoure d'une affection très maternelle, pas étonnant, elle est italienne!
Et puis bien sûr, Marie Dubois dans un rôle loin d'être évident, très dur, refroidi par la violence de François (Piccoli) racorni et qui ne s'illumine qu'avec difficulté.
Profondo Rosso a écrit : ↑22 juin 11, 04:28Sixième film de Claude Sautet, Vincent, François, Paul... et les autres est un de ses grands succès commerciaux et s'inclut dans cette période de créativité intense qui le voit enchaîner dans la foulée Les Choses de la Vie (LE film où il se réinvente), Max et les Ferrailleurs et Mado.
Vincent, François, Paul... et les autres est un film placé sous le signe du déclin, et plus précisément du déclin masculin. Déclin moral, physique, intellectuel ou professionnel à travers les différents personnages principaux, déclin que l'on vit douloureusement ou déclin qu'on appréhende avec Jean (Gérard Depardieu) figure plus juvénile que les cinquantenaires usés qu'il côtoie et également à la croisée des chemins de son existence avec sa petite amie enceinte et sa carrière de boxeur stagnant.
Sans réelle intrigue directrice, le film (adapté d'un roman de Claude Neron qui collabore au scénario) nous promène sur quelques semaines dans différentes tranches de vie de cette bande de copain, les différentes crises qu'ils traversent se dessinant en filigrane. Le drame se noue dans leur incapacité à y répondre pour différente raison et se fait le portrait de la faillite d'une certaine manière d'être masculine typique de l'époque. Vincent (Yves Montand) s'avère ainsi incapable d'expliquer ses difficultés financière à sa petite amie lors d'un violent échange qui scelle leur rupture puisque sa fierté l'empêche de la rattraper quand il en a encore l'occasion. La seule a qui il peut s'ouvrir, maladroitement certes (superbe dialogue emprunté de Montand lors des retrouvailles avec Stephane Audran) c'est son ex femme qui le connaissant décèle le malaise sous les airs bravaches. Vincent vit dans le souvenir de l'erreur qu'il commis en la laissant partir (poignant et furtifs flashback amenés tout en finesse par Sautet) et se ravisera bien trop tard. François (Michel Piccoli) est lui un être dont toute la chaleur s'est éteinte dans le renoncement à ses idéaux et le confort bourgeois, traversant son existence en fantôme et incapable de réagir (si ce n'est par la violence ultime aveux de dépit et d'impuissance) aux infidélités de sa femme délaissée. L'écrivain raté incarné par Serge Reggiani est moins développé dans ses errements créatifs mais l'acteur lui confère une telle humanité et une forme de détresse contenue qu'il n'y guère besoin de reproduire artificiellement le schéma narratif de ses partenaires.
Sautet surprend dans le dernier tiers en rompant la linéarité de son récit par l'intrusion d'une voix off omnisciente nous expliquant les sentiments de ses héros. La forme littéraire reprend momentanément ses droits comme pour appuyer tel une chape de plomb l'enfermement existentiel des personnages, bien plus fort par ce procédé prenant un recul résigné sur les évènements. Un superbe film choral magnifiquement interprété par un casting à l'alchimie palpable dont l'aspect daté offre au contraire une belle patine nostalgique. Malgré les épreuves traversées, les sacrifices et les abandons concédés, c'est bien l'image de ses copains soudés, complices et heureux d'être ensemble qui s'imprègnent en nous quand arrive le générique de fin. 5/6
Eusebio Cafarelli a écrit : ↑24 avr. 14, 10:40 Revu hier soir Vincent, François, Paul et les autres (1974)
C'est étonnant de constater qu'une partie du cinéma français actuel, que je n'aime pas, semble la postérité de cet excellent film. Je pense par exemple aux réalisations du duo Jaoui-Bacri, et plus globalement à ces histoires de couples classes moyennes, filmées à table ou dans des cuisines de grandes maisons ou d'appartements (je caricature), mais sans l'arrière-plan social dans lequel se situait Sautet. Ici c'est la crise des hommes quinquas (avec des femmes qui semblent plus effacées mais ce sont elles qui quittent, ce qui me parait assez moderne pour l'époque), mais aussi des classes moyennes (petit patron, médecin, écrivain) dans une sorte d'anticipation de la crise économique, et aussi dans une sorte d'effacement des rapports de classe (Montand-Depardieu, le patron et l'ouvrier) ou plutôt de dépalcement de ces rapports (abandon des idéaux sociaux pour Piccoli, conflit entre les petits patrons issus du monde ouvrier et le racheteur d'entreprises en Rolls).
Sautet reste quand même, à mon avis, le cinéaste passionnant des classes moyennes en plein essor à l'époque, tout comme Chabrol fut celui de la bourgeoisie.
Le film, à la mise en scène très pudique mais sans complaisance pour les personnages principaux formidablement interprétés (les petits rôles aussi d'ailleurs) nous parle encore sur de nombreux points (la thématique des difficultés des PME par exemple, l'émancipation féminine...), est daté sur d'autres (qu'est-ce qu'on fumait à l'époque ! ). Et bien sûr, toujours la patte Sautet : pluie, vitres, bouffes, bistrots...
Demi-Lune a écrit : ↑24 avr. 14, 10:45 Voilà donc comme je disais dans le topic à côté : c'est vraiment la quintessence du Sautet des 70's, chaleureux, pudique et sensible, sans un mot de trop.
J'ai beau connaître maintenant sa petite musique, l'authenticité de ses portraits n'en finit pas de m'émouvoir. Je ne sais pas comment il fait. On n'a pas l'impression de voir un truc "facile", qui tire la manche, même lorsque les drames frappent les personnages. En lisant le bouquin Sautet par Sautet, on réalise toute la primeur qu'il donnait à l'épaisseur du personnage, la définition de son background, de ses habitudes, de ses signes distinctifs, jusqu'aux regards et intonations qu'il demandait à ses scénaristes d'écrire en parallèle des dialogues. Je crois que c'est cette humanité qui affleure en permanence qui fait toute la force de ses films. Définir un regard, un geste, comme exprimant tout. Et ça, c'est juste bouleversant dans Vincent, François, Paul et les autres. Prenez la scène du petit matin où la femme de Reggiani le retrouve assoupi sur sa machine à écrire, leur complicité qui passe naturellement, ou la scène du bistrot où Montand se prend une déconvenue avec Stéphane Audran, les émotions qu'il retient violemment sur son visage... Si le casting est à l'unisson, Montand m'a particulièrement impressionné. Donner le change aux autres alors que tout l'accable. "Et si Catherine revenait..."