SEI DONNE PER L'ASSASSINO - Mario Bava (1964)
découverte
C'est inscrit dans la roche de l'Histoire du cinéma de genre,
Sei donne per l'assassino est le giallo primitif, le film qui lance la mode du thriller erotico-fétichiste qui, comme un effet boomerang, est on ne peut plus "in" aujourd'hui. Que Bava soit le papa du genre n'étonne pas, n'est-ce pas lui qui donna au gothique transalpin ses lettres les plus nobles et les plus esthétiques ? N'es-ce pas lui qui digéra l’influence d'Hitchcock (
La ragazza che sapeva troppo) ou qui annonça de quelques années le thriller à la Polanski dans son sketch
La goccia d'acqua dans
I tre volti della paura ? Ici le réalisateur récapitule ce qu'il vient de dénicher dans sa mise en scène, son jeu avec couleurs, son gout pour la violence graphique, pour les scènes de suspension, de fantasmes. Il reprend donc cette forme, la pousse dans sa veine la plus éclatante, la plus baroque pour la plaquer dans une histoire ridicule, quasiment parodique. Le scénario de
Sei donne per l'assassino est nul c'est entendu, mais il sert à merveille la réalisation de Bava. Argento en fera de même en réduisant au maximum les caractéristiques de ses scenarii, Hitchcock est lui-même connu pour avoir des scénarios bordéliques, presque infilmables. Dans les mains d'un autre,
Sei donne aurait été un naufrage pitoyable, mais dans celles de Bava ça en devient un chef d’œuvre, un film fascinant, envoutant comme un croisement entre
L'Année dernière à Marienbad et un polar de gare. La violence frappe par sa beauté plastique (ce qui n’atténue en rien son agressivité), une femme est défigurée tout en étant déshabillée, une autre se fait ardemment cogner contre un arbre dans une atmosphère de conte (brouillard, manteau rouge) etc. L'identité du tueur importe peu, il se déduit dès le générique début, seul compte son final tragique où à travers la mort, un couple se repose de ses obsessions. Un objet superbe.