
La Lettre inachevée
BLU-RAY - Région B
Potemkine Films
Parution : 15 mars 2022
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Potemkine conclue les rééditions en Blu-ray des films de Mikhail Kalatozov proposés depuis 2014 dans un coffret DVD avec La lettre inachevée, qui était alors présenté à partir d'un master un peu fatigué et visiblement différent de celui édité par Criterion en 2012. Le film a depuis bénéficié d'un nouveau transfert en 4K, effectué en 2020 par le laboratoire Mosfilm Cinema Concern à partir d'un interpositif. Le résultat présente une très nette avancée par rapport au DVD de 2014, l'impressionnant comparatif ci-dessous se passe de commentaires. Les images du Blu-ray sont d'une grande précision, avec un niveau de détail réjouissant, autant sur les magnifiques paysages qu'avec les gros plans au trait plutôt aiguisé. Au pire remarquera-t-on quelques petits flous en périphérie de cadre créés par la faible profondeur de champs ou des aberrations optiques des filtres utilisés sur la caméra. Même les nombreux fondus enchaînés, mélangeant parfois bien plus que les deux plans habituels, des images truquées dont la fabrication occasionnait à cette époque une perte de génération, et donc de qualité, sont ici correctement restitués, sans baisse marquée de précision. L'étalonnage est bien plus convaincant qu'en DVD où les blancs étaient surexposés : la gamme de gris apparaît aujourd'hui très nuancée, les niveaux de noirs sont mieux calibrés, suffisamment équilibrés, toujours détaillés et dénués de pulsations. La copie est profondément nettoyée de toutes impuretés, ce qui n'était pas du tout le cas de la précédente édition DVD, avec désormais une jolie texture argentique, assez fine et homogène. Bref, il s'agit d'une restauration solide qui offre des conditions de visionnage bien plus satisfaisantes.
DVD Potemkine (2014) vs. Blu-ray Potemkine (2022) : 1 2 3 4 5 6 7 8
Son
La piste son a été minutieusement restaurée. Entièrement post-synchronisée, elle se montre très détaillée et totalement nettoyée des traces du temps : pas de souffle disgracieux et voix claires, sans sifflantes. L'ensemble est très équilibré, avec une restitution convenable des ambiances et de la musique.
Suppléments
La lettre inachevée est accompagné d'un livret de 60 pages supervisé par Eugénie Zvonkine, historienne et spécialiste du cinéma soviétique, russe et ukrainien. Il est abondamment illustré des images du film, et composé de trois documents ayant trait au tournage. On trouve d'abord des extraits d'un compte-rendu du futur réalisateur lituanien Gunars Piesis, alors en stage à MosFilms. Il raconte beaucoup du travail de Mikhail Kalatozov lors des séances d'écriture avec son scénariste (pendant lesquelles il imagine déjà sa mise en scène), la prise de contact avec les acteurs, ou le "montage au tournage" de longs plans-séquence complexes et limités à une ou deux prises maximum (!), tout cela rendu possible par la souplesse et le génie du directeur de la photographie Sergey Urusevskiy. Le livret comprend également des extraits d'un journal du tournage, non signé, qui raconte les difficultés posées par les décors naturels, le matériel étant limité et porté par l'équipe, sur le dos, et apporte quelques précisions sur la fabrication de la scène de l'incendie, sur "100 mètres de panoramique" (!). Le récit évoque un tournage au rythme des saisons, "le froid "intenable" en hiver, entre -40° et -50°, et le travail "par pur enthousiasme" d'une équipe dévouée et parfois mise en danger, où "chaque plan s'obtient de haute lutte" sans pouvoir juger immédiatement du résultat (le visionnage des rushes était rare). Enfin, on pourra lire des extraits des souvenirs du directeur artistique David Vinitski, publiés en 1980, qui raconte la recherche des paysages réels en fonction d'esquisses imaginées, et la fabrication des différents décors, comme la taïga élaborée à partir de mélèzes rongés par les parasites et "fragiles comme le verre". La base (intéressante) du supplément du Blu-ray.
Le film Blu-ray ne comprend qu'un seul supplément. Curieusement, on ne trouve plus la présentation de 7 minutes de Françoise Navailh, présente sur le coffret DVD.
La lettre inachevée, un diamant noir (25 min - HD)
Eugénie Zvonkine, que l'on avait notamment pu croiser sur le Blu-ray de L'aiguille, s'appuie sur les documents inclus dans le livret pour évoquer La lettre inachevée, film maudit et méconnu, "chaînon manquant" entre deux chefs d'oeuvre. Elle analyse certains aspects du film, notamment la place de la Nature comme l'un des acteurs de l'histoire, et les différents rapports que les personnages entretiennent avec elle : l'aspect soviétique de la conquête d'un territoire, l'expression des états d'âme. Elle pointe le travail du réalisateur qui joue sur le contrepoint ou l'aspect sensoriel, montre la violence du désir masculin ou la douceur du désir amoureux, qu'il traduit par de longues surimpressions. Eugénie Zvonkine évoque un récit transcendé "de façon quasi expérimentale" par l'invention visuelle, Kalatozov et son équipe ayant mis "leur imagination avant le réel", quitte à tenter des choses infaisables, comme recréer des bouts de forêt en déplaçant des troncs d'arbre. Elle s'appuie sur les documents du livret pour raconter un tournage éprouvant, un peu fait avec les moyens du bord, au milieu de nulle part et dans des conditions parfois dangereuses (l'opérateur qui filme au milieu des flammes, dans une combinaison ignifugée). Elle revient aussi sur le casting et l'implication des acteurs qui, au fil des mois, se sont imprégnés de leurs rôles. Un supplément intéressant et agréable, grâce à une spécialiste enthousiaste et pédagogue.
En savoir plus
Taille du Disque : 33 113 304 138 bytes
Taille du Film : 28 100 991 168 bytes
Durée : 1:36:19.125
Total Bitrate: 38,90 Mbps
Video: MPEG-4 AVC Video / 1080p / 24 fps / 16:9 / High Profile 4.1
Audio: Russian / DTS-HD Master Audio / 2.0 / 48 kHz / 24-bit (DTS Core: 2.0 / 48 kHz / 1509 kbps / 24-bit)
Subtitle: French