Les vedettes féminines des films musicaux

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Music Man
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Zoe Laskari

Message par Music Man »

L’âge d’or du cinéma grec se situe au début des années 60 : à cette époque le succès international du film Jamais le dimanche et de son héroïne Melina Mercouri, les débuts de la chanteuse Nana Mouskouri, la vogue du sirtaki, danse typique popularisée par le film Zorba le grec avaient créé un véritable engouement pour ce beau pays. La blonde Zoé Laskari a sans doute profité de cette vague, mais c’est certainement le coté sulfureux et osé de la plupart de ses films qui l’ont imposé dans de nombreux pays comme une bombe sexuelle.
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Née en 1943 dans une famille de militaires, la petite Zoé perd très tôt ses parents et est élévée par ses aïeuls. A l’âge de 15 ans, la jeune fille remporte un concours de beauté qui lui vaut de participer en Californie aux sélections de Miss Univers. Découvrant qu’elle est encore mineure, le jury élimine la jolie concurrente. Cette affaire a néanmoins attiré sur elle l’attention des médias et plus particulièrement du réalisateur Giannis Dalianidis qui l’engage pour son nouveau film O katiforos (1961) pour un rôle refusé par Aliki Vougiouklaki la BB grecque car « trop provoquant ». C’est justement le coté osé du film qui va faire son succès. Devenue très célèbre l’actrice signe un contrat d’exclusivité avec la firme Finos films (qui au passage réédite sous forme de coffrets une grande partie de son catalogue en DVD). Alors que sa rivale Aliki Vougiouklaki projette une image de séductrice mutine et sexy à la Brigitte Bardot, Zoé est plutôt la mauvaise fille un peu perverse. Les cinéphiles la compareront d’ailleurs à Tuesday Weld.
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Le succès est international et Miss Laskari triomphe notamment au Mexique où ses films osés font sensation (O katiforos est n°1 du box office de l’année 0 Mexixo !) . A cette époque, juste avant l’explosion des comédies érotiques scandinaves, les films de Zoé figurent probablement parmi les plus culottés de la production internationale : on y trouve plusieurs scènes de nudité et des situations parfois scabreuses, notamment dans le plus connu « Stephania, fille perdue »1966 dont l’affiche mentionne ce slogan racoleur « initiée par son beau-père ; double liaison avec deux amis ; en maison de redressement ; excite le désir du geôlier » ! Pour ajouter encore un peu de sel si nécessaire, une jeune délinquante de la maison de correction tombe amoureuse d’elle.
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Quel programme : tout pour attirer le chaland qui passe ! Ce film vaut néanmoins bien mieux que son accroche publicitaire : c'est l'effrayant et fascinant portait d'une maison de correction, fort bien mis en scène (scène très impressionnante de la révolte et de la tentative d'évasion). On comprend également le succès remporté par ce genre de films au Mexique tant l’intrigue rocambolesque et fatale rappelle celle des rumberas des années 50, à la différence que le personnage de Zoé n’est pas ici victime des hommes et de la société mais de son propre désir : elle est amoureuse de son beau père. La scène où la caméra balaie la chambre et où l'on aperçoit Zoé blottie contre le torse de son amant puis...un autre homme endormi contre ses jambes est très audacieuse.
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Parallèlement à ces films très noirs où sa sensualité est remarquable, Zoé s’est illustrée dans de nombreux films musicaux où personnellement je n’ai jamais été emballé par ses prestations. L'actrice compte davantage sur sa plastique que sur ses talents de chanteuse et de danseuse, des plus modestes. Curieusement, son personnage y est différent et beaucoup plus sage.
« Filles et baisers » n’est pas mal du tout dans son genre et louche du coté des musicals américains avec notamment une jolie scène où des bouzoukis jouent à tout rompre sans que l’on voit leur visage. La séquence a quelque chose de Busby Berkeley. Quand Zoé Laskari descend le grand escalier, avec les quelque plumes de la meneuse de revue et une sorte de string qu’on n’aurait pas vu dans un film américain, on est frappé par son manque de grâce et de talent pour la danse, surtout par rapport à sa partenaire Martha Karagianni qui semble nettement plus douée.
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« Les perles grecques »1967 passe pour le film le plus coûteux du cinéma grec jusque là. On sent que Giannis Dalianidis vise la marché international en insistant sur les clichés et images d’Epinal, ainsi que les airs folkloriques. Si l’histoire est navrante et basique, les numéros de sirtakis sont en revanche particulièrement réussis et bien mis en valeur, en tous les cas mieux que le numéro yéyé de Zoé qui incarne une chanteuse de rock dans une boite d’Athènes.
Le film sera présenté hors compétition au festival de Cannes où il remportera son petit succès. Les paparazzis couvriront aussi le passage de la star sulfureuse dont les amours avec le chanteur Tolis Voskopulos (une légende de la musique moderne grecque) ou l’industriel Petros Koutoumanos font couler de l’encre dans les journaux grecs.
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Mia kyria sta bouzoukia (1968) est un musical bien moyen où zoé incarne une jeune fille surprotégée par ses frères (comme souvent dans les films grecs !).
Marihuana stop (1971) avec Petros Koutoumanos semble s’inspirer d’Hair . Un musical hippy hélas filmé de façon vraiment statique comme au théâtre.
Avec le déclin du cinéma grec, Zoé Laskari va recentrer sa carrière sur le théâtre : on l’a vue dans les troyennes d’Euripide et Qui a peur de Virginia Woolf.
Toujours sexy malgré les années, Zoé a posé nue en 1985 pour l’édition grecque du magazine Playboy et continue sporadiquement à faire du théâtre et de la télévision.
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Dernière modification par Music Man le 15 déc. 08, 23:39, modifié 1 fois.
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la petite Marie-France

Message par Music Man »

Comme le signalait Droudrou, autrefois on raffolait des enfants vedettes, et le public ressortait des salles obscures le cœur soulagé après avoir assisté aux mésaventures mélodramatiques de chers petits bambins attendrissant, qui finissaient toujours par un happy end. Quand les chères têtes blondes ou brunes étaient de surcroit pourvus de talents vocaux, on applaudissait les prodiges à tout rompre. Josélito l’enfant à la voix d’or et Marisol ont ainsi emballé l’Espagne, les pays latins et une bonne partie de l’Europe. L’Allemagne et la Hollande ont réservé un accueil triomphal au petit Heintje, tout comme l’Italie à Robertino : les deux gamins se collèrent à la reprise du Mama rendu célèbre par Benjamino Gigli.
En France aussi, nous avons eu le petit Mirsha, qui chanta petit homme c’est l’heure de faire dodo avant guerre et tourna 2 films en France et un en Hongrie (l’enfant connut un sort tragique : il mourut en camp de concentration) et la petite Marie-France, mini vedette de la chanson et du cinéma.
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Dans les années 30, la petite Shirley Temple avait remporté un succès sans précédent dans une série de sucreries destinées à faire oublier momentanément les affres de la dépression à un public en quête d’optimisme. En France, dans l’immédiat après guerre, alors que les denrées alimentaires étaient rationnées et la situation sociale des plus précaires, on avait toujours besoin de rêver. Avec ses yeux rieurs, ses joues rebondies, ses socquettes et ses souliers vernis, ses nœuds dans les cheveux frisés, ses courtes robes à froufrou, la petite Marie France Plumer (née en 1943) avait tous les atouts pour attendrir un public bienveillant. Après avoir gagné concours de chant à l’âge précoce de 4 ans dans à radio Luxembourg et fait la couverture du magazine Radio pour cet exploit, la fillette est engagée dans une série d’émissions de radio pour les enfants (les beaux jeudis de Jacques Pauliac) enregistrées en public
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Elle enregistre son premier disque en 1948 : « la fête de maman ». Le résultat est culcul à souhait, et tellement démago qu’il ne pourra qu’enchanter les amateurs d’humour au troisième degré (dont je suis). Marie France chantonne plutôt mal, en appuyant sur les notes et en détaillant avec application chaque ânerie pour finir par nous livrer un merveilleux dérapage les dernières secondes. Les paroles sont ridicules à souhait : « ce jour est le plus beau de l’annéeeeee, puisque de ta fête il est le joooour », « je promets de te ramener que des bons points.. ». J’imagine qu’à l’époque, on a du trouver son interprétation des plus touchantes. En écoutant ce joyeux massacre, on ne peut s’empêcher de penser à Bette Davis de Baby Jane tant la petite Marie-France semble ressembler au personnage du film d’Aldrich, et je ne parle même pas de sa chanson !

En tous les cas, la gamine continuera à enregistrer pendant près de 10 ans, dont notamment quand allons nous nous marier de Georges Ulmer, abadaba du film les heures tendres, et l’enfant de la balle d’Eddie Constantine, et pas mal de compositions de Charles Humel, compositeur aveugle connu pour « dans les plaines du far West » de Montand.
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Apeurée dans les bras de Jacques Jansen pour la ronde des heures

Un tel petit phénomène se devait de faire du théâtre et du cinéma. Sur les planches, elle donne la réplique à Pierre-Richard Wilm, le grand séducteur romantique des années 30 en fin de carrière. Présentée sur les affiches comme la petite Shirley française, Marie-France va également tourner dans pas mal de films. Jamais de chefs d’œuvre mais du cinéma populaire. Dans le remake de la ronde des heures, elle joue aux cotés de Jacques Jansen, baryton qui a fait les beaux jours du palais Garnier. Elle obtient un rôle plus important dans sous le ciel de Paris (1951), son meilleur film de loin. : Un bel hommage à la capitale, conçu de façon avant-gardiste avec la célèbre chanson éponyme interprétée par Jean Bretonnière.
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La même année, Marie-France est la vedette des deux gamines, un mélo pour faire pleurer Margot (plus poignant que la porteuse de pain, plus bouleversant que mensonge d’une mère, promet l’affiche) jadis tourné par Feuillade et un nanar des plus croustillants, très jouissif en fin de compte. Malgré son numéro de cabotinage (ou à cause de cela), Marie-France donne tout son sel à cet incroyable film qui mélange mélo, conte de fée et polar parigot. Et que dire de la prestation génialissime de Suzy Prim en marâtre qui s’acharne sur Marie-France et la punie en lui demandant de faire douze pages de bâtons. Quand la fillette lui demande pourquoi des bâtons, elle lui réplique que c’est juste à la hauteur de son intelligence. Si la crooneuse Léo Marjane chante les deux principales chansons du film, Marie-France gazouille une comptine « la bergère et le capitaine ».
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Si ces deux gamines sont un vrai régal kitsch (doublé d’un gros succès commercial, y compris à l’étranger), on ne pourra en dire autant de Musique en tête, sorte de devoir de vacances bâclé de l’orchestre de Jacques Hélian : quel laisser aller et quelle indigence dans ce navet où seules les chansons de Rudy Hirigoyen sauvent la mise. Marie-France y va aussi de son petit refrain tout en jouant à la marelle.
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La petite fille incarne sainte Thérèse de Lisieux dans un bien conventionnel Procès au Vatican (genre de films qu’on rediffusait l’après midi dans les années 70. Le coté mystique (apparitions..) et un peu morbide (nombreuses scènes où Thérèse est alitée) m’avait fait peur d’ailleurs à l’époque). Dans le genre mélo, elle incarne une fillette atteinte de leucémie dans son dernier Noël (1952) avec Tino Rossi, qui n’omet pas de reprendre son fameux petit papa Noël. Dans le genre tire-larmes dégoulinant de bons sentiments et de roucoulades, difficile de faire pire. Le film inspirera plus tard l’arbre de Noël avec Bourvil.
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Préparez vos mouchoirs !

Je n’ai pas vu le gamin de Paris (1955) dernier film interprété par Marie-France dans lequel elle retrouve Christian Fourcade autre chanteur enfant de la radio. Il s’agit encore d’un remake d’un vieux mélo de Feuillade, genre devenu complètement anachronique.
Dans ces films, c’est son coté petite bonne femme qui amuse. Sinon, la petite actrice n’a pas à mon avis le talent de Margaret o’Brien ou de Brigitte Fossey. Mais elle peut se venter d’avoir donné la réplique à Jean Marais, Michèle Morgan, Noël Noël, Gisèle Pascal et Jean Gabin. Pas mal non ?
En 1957, Marie-France se produit encore à la kermesse aux Etoiles et enregistre avec Sacha Distel et Maurice Chevalier la version française des chansons du film Gigi. Elle tourne dans quelques pièces de théâtre pour la télé comme le malade imaginaire avec Fernand Ledoux.
Au début des années 60, la gamine a bien grandi, et file le parfait amour avec Danny boy du groupe les pirates qu’elle quitte pour un autre chanteur yéyé
Dick Rivers des chats sauvages (et sa fameuse banane), avec lequel elle enregistrera un duo (je suis bien). Elle le laissera tomber pour le guitariste Mick Jones. Dick Rivers raconte que la jeune femme possédait une photo d’elle dans les bras d’Elvis Presley qui aurait peut être eut un flirt avec elle, ce qui le faisait mourir de jalousie.
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Le dernier disque de Marie-France avec Dick Rivers

Depuis Marie-France n’a plus jamais cherché à faire parler d’elle et se réfugie dans un anonymat qui lui convient parfaitement. Si le nom de Marie-France apparaît sur certains génériques, il s’agit d’homonymes (l’une d’elles joua justement avec Josélito, l’autre une chanteuse transsexuelle égérie de Pierre et Gilles, une autre encore a joué dans la version allemande du dernier des mohicans). Si cela fait belle lurette qu’elle a préféré tourner la page, les cinéphiles ne pourront que regarder d’un œil sympathique cette petite fille délurée aux grands écarquillés, amusant souvenir d’un autre monde.
Et si vous voulez goûter une expérience inédite et plus naphta que naphta, pourquoi pas un extrait de la fête de maman ou de je voudrais un mari ?
http://www.virginmega.fr/musique/titre/ ... ,page1.htm
Il suffit de cliquer sur « écouter le titre ». Bon courage.

Sur youtube, un extrait des deux gamines où l’on voit quelques secondes Marie-France qui annonce « la nouvelle chanson de maman (Léo Marjane) ».
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Major Dundee
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Major Dundee »

Bravo encore une fois Music Man.
Jamais je n'avais fait le rapprochement entre la gamine de "Son dernier noël" et la Marie France de Dick Rivers :shock:
Charles Boyer (faisant la cour) à Michèle Morgan dans Maxime.

- Ah, si j'avais trente ans de moins !
- J'aurais cinq ans... Ce serait du joli !


Henri Jeanson
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Music Man »

Merci Major!
Marie-France avait apparemment changé de refrain entre les comptines genre Cadet Rousselle et les twists endiablés. On peut la comprendre.
RClaude
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par RClaude »

J'ai passé un délicieux week-end à Amsterdam, une ville où on trouve au marché aux puces des 33t en bon état de Zarah Leander, Eartha Kitt ou des Supremes pour 1 euro ! Depuis la Libération du joug nazi, les Pays-Bas entretiennent des liens culturels privilégiés avec les anciens Alliés. Dans les années 60, les jeunes dutchmen & girls pouvaient écouter en primeur les nouveautés jazz, pop, rock et blues britanniques et américaines, leur pays étant un pays-test pour les labels. Ils étaient fans des radios pirates qui émettaient en mer du Nord. Ces éléments expliquent le nombre, la diversité et la qualité des disquaires d'Amsterdam qui proposent des merveilles sur tous les supports, du 45 t collector aux DVD dernières génération. Chaque fois, mon budget disques explose ! Dimanche avant de reprendre l'avion, on est tombés sur un magasin de disques au stock impressionnant avec un bac imposant uniquement consacré aux rééditions numériques de toutes les divas chantantes du cinéma: de Dorothy Lamour à Hildegard Knef. Un avant-goût du paradis. Ma compagne a du venir me rechercher car elle craignait que je dépense jusqu'au budget nouilles du mois de décembre dans cette échoppe affolante !
(C'est l'enseigne "Concerto" dans le centre ville un peu avant le quartier des musées: avec 8 salles spécialisées et des vendeurs-euses charmants et professionnels.)
Music Man
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Music Man »

Je vois que ton séjour à Amsterdam a été fructueux René Claude, et que comme moi tu doubles tes vistes touristiques d’un passage à basse altitude dans toutes les boutiques de disques et de cinéma ! :uhuh: :wink:
Cela fait 6 ans que j’y suis allé la dernière fois. J’avais trouvé une petite librairie de cinéma avec des livres et affiches ; je me souviens que le type reprenait ma prononciation de tous les noms d’artistes américains. Ce n’est pas Dick Powell, c’est Dick Pâwell, etc…
Pour ma part, je reviens des marchés de Noël de Wiesbaden (très biens d’ailleurs) et j’ai eu la surprise de trouver une boutique de 78T et de vinyles très achalandée (qui aurait fait ton bonheur !), avec aux murs des cartes postales dédicacées de stars teutones (Conny Froboess, Romy Schneider…) et internationales, et un poster de Zarah Leander dans Pages immortelles (pas à vendre). Ils vendaient aussi un vieux bouquin sur la star du muet Asta Nielsen, à prix très accessible.
Si tu passes un jour par Paris, je te filerai le peu d’adresses de boutiques dont je dispose, mais les prix sont élévés ! (alors qu’autrefois au marché aux puces de st Ouen on dénichait pour des prix dérisoires de très nombreux 33T neufs d’artistes d’Hollywood.)
Jordan White
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Jordan White »

RClaude a écrit :J'ai passé un délicieux week-end à Amsterdam[...]Ces éléments expliquent le nombre, la diversité et la qualité des disquaires d'Amsterdam qui proposent des merveilles sur tous les supports, du 45 t collector aux DVD dernières génération.
Velvet Music aussi est une excellente enseigne pas très loin là aussi de Museumplein et de Rembrandtplein.
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Je vote pour Victoria Romanova
RClaude
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par RClaude »

J'ai toujours autant de plaisir en lisant vos dernières bios et les commentaires et conseils des intervenants de ce forum.
Je suis tombé il y a quelques instants sur un numéro plutôt croquignolet dansé/chanté par Vera-Ellen et Danny Kaye extrait de "Wonder Man":

(j'espère qu'il ne s'agit pas d'un doublon...)
Music Man
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Hildegard Knef

Message par Music Man »

Hildegard Knef, une des plus grandes divas du cinéma allemand, avait toute les qualités pour devenir une seconde Marlene Dietrich, et l’interprète de l’Ange bleu, très admirative la considérait d’ailleurs comme sa fille spirituelle. Pourtant il a manqué sans doute un Sternberg pour que la carrière de la fascinante jeune femme soit aussi brillante que celle de son inspiratrice. Néanmoins, compte tenu des nombreux obstacles qu’elle a du affronter, on peut néanmoins grandement admirer le parcours de l’actrice et chanteuse allemande qui a tourné pour les plus grands (Henry King, Henry Hathaway, Billy Wilder, Carol Reed, Duvivier, Chabrol…) et créé à Broadway un musical de Cole Porter. Et on ne peut qu’être fasciné par son étonnante voix rauque et son visage, probablement l’un des plus sensuels de toute l’histoire du cinéma.
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Née en 1925 à Ulm, Hildegard Knef décroche un job de dessinatrice au rayon animation des studios UFA. Ses liaisons avec le réalisateur Arthur Maria Rabenalt puis surtout Demandowsky, patron de la firme Tobis et bras droit de Goebbels, vont lui permettre d’obtenir rapidement des rôles importants dans des films tournés à la fin de la guerre, notamment « sous les ponts » drame réaliste, mis en scène par Helmut Kautner le plus prometteur des réalisateurs allemands.
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A la fin du conflit, l’actrice doit tout reconstruire (son amant a été exécuté en 1946). Après avoir fait un peu de théâtre pour les soldats américains mobilisés en Allemagne et assuré le doublage de certains films soviétiques, l’actrice est engagée dans les assassins sont parmi nous (1946), mélodrame tourné dans un Berlin en ruine qui dépeint avec habileté l’anéantissement moral et la culpabilité de toute une génération d’allemands. Le film est un succès international : le producteur David O Selznick, séduit par son interprétation et sa présence lui propose alors un contrat à Hollywood mais exige qu’elle cache ses origines allemandes (on peut se douter qu’à l’époque les allemands étaient plutôt mal vus aux States !) et adopte le pseudo de Gilda Christian, ce qu’elle refuse catégoriquement. (Elle prendra néanmoins la nationalité américaine) ;
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En 1950, Hildegard Knef fait scandale dans les confessions d’une pécheresse, non seulement parce qu’elle y parait nue quelques secondes mais aussi parce que le film traite de l’euthanasie (une prostituée amoureuse d’un homme plus âgé, atteint d’une maladie incurable l’aide à mourir) sujet cher aux nazis, déjà traité dans le film Suis-je un criminel interdit par les alliés à la libération. L’église catholique demandera l’interdiction du film. Toutes ces mesures finalement feront une énorme publicité à ce mélo, fort bien mis en scène par le talentueux Willi Forst, dont l’œuvre mériterait d’être redécouverte.
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Darryl Zanuck, attiré par ce battage médiatique engage la blonde actrice qui tourne 3 films à Hollywood avec des réalisateurs aussi prestigieux qu’henry King ou Hathaway. Néanmoins la conduite de l’actrice (elle enchaîne coup sur coup des liaisons avec les acteurs mariés Gregory Peck et Tyrone Power) dissuadent Zanuck de poursuivre son engagement avec une comédienne si sulfureuse (n’oublions pas qu’il doit par-dessus le marché cacher au public son ancienne liaison avec un haut dignitaire nazi).
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De retour en Europe, Hildegard Knef tourne en France (sous le pseudo Hildegarde Neff), la comédie frivole la fête à Henriette où elle campe une artiste de cirque très sexy) et en Angleterre (avec le grand Carol Reed).
De retour en Allemagne, Hildegard joue et chante dans plusieurs films. En effet après avoir séduit les spectateurs en entonnant de sa voix rauque et sensuelle deux airs du répertoire de Marlène dans les neiges du Kilimandjaro (1952) (en anglais, en français et en allemand, selon l’endroit où le film est projeté), l’actrice va désormais intégrer quelques chansons à chacun de ses films.
D’ailleurs c’est surtout le refrain mélancolique qu’elle fredonne dans Illusions -1952 (repris en France par Lys Assia) que l’on retient (dans ce mélo assez déprimant, elle incarne une cancéreuse).
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Deux cœurs, une mélodie (1951) de Willi Forst est un musical optimiste plutôt sympathique. Cependant le faible niveau de la production allemande de l’ère Adenauer, conventionnelle en diable, ne laissait guère à Hildegard Knef la possibilité d’hériter de rôles intéressants. Aussi la vedette retourne aux USA pour accepter un premier rôle dans l’adaptation musicale de Ninotchka, la belle de Moscou, avec Don Ameche. Séduit par sa façon très personnelle de chanter dans les neiges du Kilimandjaro, le compositeur Cole Porter a personnellement choisi l’actrice. Qui mieux qu’elle aurait pu débiter « Paris love lovers » ?
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Encouragée par son amie Marlene Dietrich, la star triomphe et la presse souligne « sa merveilleuse performance ». Pour des raisons bassement contractuelles la liant encore à la Fox, l’actrice sera obligée de refuser l’offre de la MGM qui lui propose de reprendre son rôle à l’écran (Cyd Charisse reprendra la relève). De toute façon, le magnétisme particulier et un peu androgyne, la voix chargée et la sensualité sophistiquée et très affirmée de Miss Knef auraient-ils convenu aux spectateurs américains sous le charme de nouvelles bombes sexuelles latinos et des blondes écervelées dans la mouvance de Marilyn et de Jayne Mansfield ?
De retour en Allemagne, Hildegard Knef joue dans Madeleine et le légionnaire (1958) qui traite de façon très malhabile de la guerre d’Algérie : dans ce film, l’actrice joue le rôle d’une institutrice qui épouse la cause algérienne et quitte sa patrie : il sera interdit en France.
A Paris, l’actrice joue dans l’insipide « fille de Hambourg » de Marc Allégret dont on peut retenir la chanson principale écrite spécialement par Boris Vian pour la belle allemande ;
Je ne peux que conseiller aux amateurs de musical de visionner la version 1962 de l’opéra de 4 sous avec Sammy Davis jr. Rediffusée en son temps sur Canal+, c’est une adaptation très réussie qui n’a pas à rougir d’une comparaison avec le film de Pabst. Quant à Hildegard, elle est fascinante quand elle fredonne le chant de Barbara dans le bordel : on se croirait devant une toile de Toulouse Lautrec.
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Avec la déconfiture du cinéma allemand, l’actrice va recentrer, avec succès, sa carrière sur la chanson avec un répertoire de diseuse moderne que n’aurait pas renié Juliette Gréco. Ironie, sensualité, phrasé impeccable sont les principales qualités de ses interprétations, qui sur un plan strictement musical sont loin d’être parfaites (Ella Fitzgerald la surnommera la plus grande chanteuse sans voix du monde). Son magnétisme est très bien mis en valeur dans les shows télé auxquels elle participe et interprète avec une sensualité torride fever de Peggy Lee ou des airs de Bert Kaempfert.
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En 1968, Hildegard remporte son plus grand succès discographique avec für mich soll immer rote rosen regnen » un petit bijou, qu’elle interprète merveilleusement.
En 1970, elle rédige son autobiographie où elle révèle sa liaison avec le bras droit de Goebbels : salué pour sa franchise et ses qualités littéraires, le roman « à cheval donné » est un triomphe sans précédent (la plus forte vente en librairie en Allemagne depuis 1945 !) ;
Mais après de tels sommets, le sort va de nouveau s’acharner contre l’artiste.
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Guérie d’un cancer du sein, elle joue avec Henry Fonda dans Fedora, brillant film de Billy Wilder et vibrant hommage à la fascination du cinéma et aux stars d’autrefois. Marthe Keller y tient le rôle d’une star mystérieuse des années 30, inspirée par Garbo, vivant en recluse et restée mystérieusement jeune. En fait au fil de l’intrigue on découvre qu’elle est en réalité la fille de l’ancienne vedette (Hildegard Knef) qui cache ses rides et sa solitude. Un superbe film qui n’aura absolument aucun succès. Fatigué par l’exploitation que fera Hildegard Knef de sa lutte contre son cancer (à l’époque, il était indécent de parler de cette maladie), ses liftings, ses frasques, ses problèmes fiscaux, le public allemand va finir par se détourner d’elle tandis que la presse à scandale va s’acharner sur elle avec une rare férocité. Sa tournée mondiale est un flop terrible : elle doit annuler presque toutes les dates.
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En 1982, elle rédige une série d’articles consacrée à Romy Schneider qui vient de décéder, en prétendant qu’elle était une amie proche, ce que démentira Magda Schneider, la maman de la comédienne, qui qualifiera Hildegard d’opportuniste. On colporte qu’elle est devenue alcoolique et accro à la morphine.
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Très atteinte par ces attaques successives, l’actrice revient progressivement à la surface, notamment en jouant sur scène dans le musical Cabaret. En 1993, le groupe de rock Extrabreit a la bonne idée de reprendre en duo avec elle son fameux tube de 1968, dans une version rock très dépoussiérée et plutôt réussie dans son genre : c’est un triomphe et l’artiste est à nouveau invitée dans les shows télé où le public lui réserve une standing ovation (je me souviens notamment de sa belle prestation –en play-back hélas) au Patrick Lindner show, accueillie telle une Diva. En 1999, elle enregistre son dernier CD. Désormais de lourds problèmes de santé vont anéantir ses tentatives de come back. Affaiblie par la maladie, l’actrice n’est plus que l’ombre de la beauté qu’elle fut autrefois.
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Elle est décédée en 2002. Son roman autobiographique a fait l’objet d’une adaptation en comédie musicale et sa vie devrait faire l’objet d’un film dont la sortie est prévue en 2009. En tous les cas, son mythe demeure encore fort populaire et présent en Allemagne (dans les gares et les vitrines de librairie trônait encore ses jours derniers un album de photos avec son fabuleux visage). Une star fascinante qui en dépit de tous les aléas de sa carrière a réussi à laisser une emprunte mémorable, du moins dans son pays.

En 1963, Hildegard chante fever


Hildegard avec Extrabreit
Dernière modification par Music Man le 29 déc. 08, 21:22, modifié 3 fois.
francesco
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par francesco »

Je te remercie vraiment (et publiquement pour une fois) pour tous ces portraits d'actrices, en particulier "germanisantes", qui ont été diabolisées (avec plus ou moins de raison) jusqu'à occulter leur talent et leur filmographie. J'ai ainsi découvert Zarah, Martha, Marika !
Pour ce qui est d'Hildegard Knef je la connais très peu (je viens de commander sa Catherine de Russie qui vient de ressortir), mais j'ai été impressionné par ce que j'ai vu. Sa silhouette de milliardaire aux rapports complexes avec Peck dans Les Neiges du Kilimanjaro, à la fois élégante et blasée, très forte, un peu masculine. Et son personnage tout aussi compliquée dans L'homme de Berlin (le film de Carol Reed) avec James Mason et Claire Bloom. Manifestement une actrice qui n'a pas peur des personnages riches, mystérieux, sachant leur insuffler la dose d'ambiguité nécessaire, le côté "femme qui a vécu".
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par RClaude »

Impec' le billet biographique sur cette chère Hildegarde. Et les photos qui vont avec aussi.
J'ai relayé sur mon blog. http://pour15minutesdamour.blogspot.com ... orson.html
RClaude
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par RClaude »

Est-ce qu'il existe un livre de référence en français* sur les divas (contrariées) du cinéma allemand ? En allemand, on trouve des bios et des essais de référence, mais j'ai pas le courage de me lancer dans leur lecture, mon allemand étant tout juste suffisant pour parcourir des articles de presse et des billets en ligne... Merci.
*Ev. en anglais... ?
RClaude
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par RClaude »

Hildegarde morphinomane ? C'est la première fois que je lis ça. Comme la plupart des "grands formats" de l'écran, elle aimait indéniablement les trucs forts comme les passions amoureuses, son image publique et peut-être un bon verre de raide de temps en temps pour faire passer le blues, mais les opiacés... ?
Music Man
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Music Man »

RClaude a écrit :Est-ce qu'il existe un livre de référence en français* sur les divas (contrariées) du cinéma allemand ? En allemand, on trouve des bios et des essais de référence, mais j'ai pas le courage de me lancer dans leur lecture, mon allemand étant tout juste suffisant pour parcourir des articles de presse et des billets en ligne... Merci.
*Ev. en anglais... ?
Je ne connais pas de livres français sur le sujet. En revanche, il existe un livre écrit en anglais qui comblera toutes tes espérances : biographies détaillées et concises des principales vedettes féminines du cinéma allemand des années noires de Zarah Leander à Ilse Werner en passant par Marianne Hoppe. Pour chaque artiste, 3 à 5 films sont passés en revue, avec résumé, photos et critiques de la presse de l’époque (très peu objectives, est-il besoin de le préciser). Pas mal de recul aussi pour analyser la propagande distillée dans les romances et les films musicaux : un excellent ouvrage.

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Music Man
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Re: Les vedettes féminines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Music Man »

RClaude a écrit :Hildegarde morphinomane ? C'est la première fois que je lis ça. Comme la plupart des "grands formats" de l'écran, elle aimait indéniablement les trucs forts comme les passions amoureuses, son image publique et peut-être un bon verre de raide de temps en temps pour faire passer le blues, mais les opiacés... ?
S’agissant d’Hildegard Knef et de ses problèmes avec la morphine dans les années 80, on rappellera que la pauvre a mené une longue bataille contre le cancer pendant des années et supporté bien des souffrances avec beaucoup de dignité et de courage, et que dans son cas, il est fort probable qu’elle se soit habituée à certains soins palliatifs qui lui étaient administrés
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